Pour lutter contre les déserts médicaux, le nouveau Premier ministre vise 5 000 espaces d’ici 2027, qui seront pensés sur le modèle des maisons France Services.
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Publié le 14/09/2025 17:09
Mis à jour le 14/09/2025 17:11
Temps de lecture : 6min
Le Premier ministre Sébastien Lecornu en déplacement à Mâcon (Saône-et-Loire), le 13 septembre 2025. (JEFF PACHOUD / AFP)
Lors d’un déplacement à Mâcon (Saône-et-Loire), samedi 13 septembre, Sébastien Lecornu a consacré sa toute première annonce de Premier ministre à un des sujets de préoccupation majeure des Français : les déserts médicaux. Le nouveau chef du gouvernement veut bâtir, d’ici 2027, un réseau national de 5 000 maisons « France Santé ». « L’accès aux soins est encore trop souvent une source d’angoisse. Depuis 2017, nous avons commencé à inverser la tendance, notamment sur la formation et le recrutement de médecins, mais nous devons faire plus », a écrit Sébastien Lecornu sur X. Franceinfo revient sur sa promesse en trois questions.
Quel est l’objectif ?
Les maisons « France Santé » seront conçues sur le modèle des maisons France Services, lancées en 2020 et qui proposent un guichet unique pour diverses démarches administratives. « On doit avoir une offre de soins de proximité par bassin de vie a minima, et donc globalement quelque chose autour de 30 minutes de chez vous », a fixé pour objectif Sébastien Lecornu, lors de son premier déplacement en tant que chef du gouvernement. En 2024, « six millions de Français n’avaient pas de médecin traitant et 87% du territoire était classé en désert médical », rappelle le gouvernement sur son site internet.
L’envoi de médecins généralistes en renfort dans des déserts médicaux, jusqu’à deux jours par mois, a par ailleurs débuté en septembre. Au printemps, l’ex-ministre de la Santé Yannick Neuder avait dévoilé les 151 zones rouges concernées, principalement au centre et sud-ouest hors littoral de la France. Au total, 2,5 millions de patients vont bénéficier de ces renforts, qui fonctionnent sur la base du volontariat contre des contreparties financières.
Combien cela va coûter ?
Le développement du réseau « France Santé » sera inscrit dans les projets de budget de l’Etat et de la Sécurité sociale pour 2026, a précisé le Premier ministre. Sébastien Lecornu, qui n’a pas chiffré le coût de cette mesure, veut piloter lui-même ce projet qu’il considère comme une « grande priorité nationale ». Il l’a exposé samedi après un long échange avec des soignants d’un centre de santé départemental de Saône-et-Loire.
Le problème reste que les docteurs ne veulent pas s’installer dans un désert médical. « Cela nécessite au moins deux médecins par maison. Ça va faire le recrutement de 10 000 médecins. Où va-t-on les trouver ? », s’est interrogé samedi sur franceinfo Jean-Christophe Nogrette, secrétaire général adjoint de MG France, qui précise ne pas avoir été consulté. Il ajoute que « si on demande à des médecins déjà installés de rejoindre » ces lieux, « on va découvrir des endroits pour en couvrir d’autres ».
Du côté de l’opposition, Laurent Jacobelli, porte-parole du Rassemblement national, a dénoncé sur franceinfo un « marketing pur ». « Comment, au bout d’un jour, un Premier ministre peut-il déjà savoir qu’il va financer des maisons de santé et recruter des médecins ? »
Quelle différence avec ce qui existe déjà ?
Des structures à l’image des maisons « France Santé » existent déjà aujourd’hui. Il y a d’une part les centres de santé, qui proposent au tarif conventionné une palette de soins médicaux. On en compte « plus de 2 500 » (dont 582 pluriprofessionnels), et à l’exception des centres de soins infirmiers, « ils sont implantés majoritairement en milieu urbain », explique sur son site internet le ministère de la Santé.
Les centres de santé pluridisciplinaires sont considérés par beaucoup d’experts comme un modèle d’avenir pour faire face aux difficultés d’accès aux soins, en facilitant le suivi des personnes atteintes de pathologies chroniques, et en permettant aux paramédicaux de soulager les médecins de certaines tâches. Mais l’équilibre financier reste difficile à trouver pour ces centres qui appliquent le tarif conventionné et le tiers payant (la part directement payée par la Sécurité sociale sans que le patient n’ait besoin de l’avancer lors de sa consultation), et ont des contraintes en matière d’horaires et de jours d’ouverture.
D’autre part, on trouve en France des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), structures créées en 2007 et défendues par certains syndicats de médecins. Il y avait 2 501 maisons de santé pluriprofessionnelles en fonctionnement au 31 décembre 2023 et « l’objectif [était] d’atteindre 4 000 maisons de santé en France », selon le ministère. Dans les MSP, les différents professionnels – médecins, infirmiers, kinés – sont des libéraux, alors qu’ils sont salariés dans les centres de santé. Selon Gérard Raymond, président de France assos santé, la question des statuts devra justement se poser avec les maisons proposées par Sébastien Lecornu : « Est-ce que ce sera libéral ou salarié ? »
Le réseau « France Santé » sera « probablement une forme de label » attribué à l’existant, « car on ne peut pas créer 5 000 structures ex nihilo », a estimé le docteur Martial Jardel, cofondateur et président de l’association Médecins solidaires, dimanche matin sur franceinfo. Pour ce médecin, « l’idée de créer une dynamique dans laquelle des gens et des structures vont pouvoir s’installer (…) peut avoir du sens ». A condition qu’il y ait des financements.