Insalubrité, nuisances sonores, insécurité, trafic présumé, c’est le cocktail explosif que décrivent les habitants de la rue Saint-Honoré, au cœur du quartier Magnan. Le problème? Au 17 de cette rue discrète, des logements seraient squattés, de la terrasse jusqu’à la studette en passant par les caves et les anciens parkings réaménagés en studio. Une partie serait louée mais il semblerait que des squatteurs s’immiscent parmi les locataires. Ici, les nuits ressemblent à un mauvais film qui se rejoue chaque soir. La bâtisse, aujourd’hui défraîchie, intrigue. Deux des trois propriétaires du dessous expliquent avoir acheté en 2018. Mais, les choses se seraient brutalement dégradées il y a deux ans, après un dégât des eaux avec le voisin du dessus. Selon eux, les lieux sont aujourd’hui occupés de manières irrégulières.

Le nom d’un « squatteur » revient dans les conversations. Plusieurs habitants assurent qu’il leur a montré « son obligation de quitter le territoire » mais aussi « des photos de trottinettes volées, des barrettes de cannabis et de la cocaïne entreposées sur place ». « Il en parle ouvertement, devant tout le quartier, sans aucune crainte », souffle un voisin. Un autre ajoute: « Depuis les terrasses, on les voit planquer des vélos et trottinettes sous des couvertures. » Un riverain martèle: « Les forces de l’ordre, elles, passent mais ne restent pas (…) cinq minutes après leur départ, ça recommence ». Dans la rue, beaucoup estiment que la police « sait mais ne peut rien faire ».

« Un sentiment d’insécurité »

Dans cette rue, les locations saisonnières sont nombreuses et les avis des visiteurs sont parfois alarmants. « Des clients m’ont signalé avoir trouvé des seringues derrière l’immeuble », déplore un propriétaire. « Les appartements sont sympas, mais les alentours font peur », reconnaît un autre. Certains touristes évoquent même « un sentiment d’insécurité permanent », au point de ternir l’attrait de cette artère de Nice, proche du centre.

Des départs de feu ont marqué les esprits. « Il y en a eu plusieurs, pas qu’un seul », insiste un habitant qui en a vu un de près depuis sa fenêtre. Certains craignent la catastrophe: un immeuble ancien, des appartements sur-occupés, de l’alcool, des flammes…

Les soupçons vont plus loin. Les riverains parlent « d’arrangements suspects » et évoquent même « un marchand de sommeil ». La peur se mélange à l’exaspération. « a donne une image déplorable de notre quartier On nous a dit d’écrire au préfet. On l’a fait, en recommandé, mais on n’a jamais eu de réponse », soupire un habitant. Sollicitée, la préfecture précise que ce dossier a été porté à la connaissance des services le 5 septembre, à la suite du signalement d’un riverain. À ce stade, aucune démarche entreprise par les propriétaires n’a été relevée. Ces derniers ont toutefois été identifiés, et des vérifications sont en cours afin de préciser les conditions d’occupation des bâtiments.

La Ville: « Nous continuons à mettre la pression »

De son côté, la mairie de Nice par la voix du premier adjoint, Anthony Borré commente: « Nous suivons ce dossier de très près depuis 2024. Nous avons adressé plusieurs mises en demeure aux propriétaires. Les trois du dessous ont été réactifs, mais celui du haut recevant des squatteurs refuse toute coopération. Nous avons tenté de lancer un arrêté d’insalubrité, mais il ne nous a pas ouvert les lieux. Face à cette inertie, nous avons saisi le parquet et signalé à la justice un possible marchand de sommeil. La Ville poursuit ses démarches, nous continuons à mettre la pression et nous irons jusqu’au bout »

« Un enfer » pour certains propriétaires

Franck R., propriétaire des huit studettes qui posent problème, connaît la situation de l’intérieur. Il avait acquis l’immeuble il y a douze ans aux enchères, alors qu’il était déjà squatté, pour en faire un investissement locatif. Tout avait été refait, et pendant plusieurs années, la location s’est déroulée sereinement. Aujourd’hui, il confie « perdre de l’argent » malgré des locataires qui continuent de payer leur loyer. Le point noir? La terrasse et les caves attenantes, régulièrement occupées par des squatteurs. « Ma femme vient toutes les semaines nettoyer et dégager les squatteurs, mais elle ne peut rien faire. Moi je ne vais pas risquer de prendre un coup de couteau. » Le couple raconte retrouver régulièrement sur la terrasse « des ordures, parfois même des matières fécales ». « Différents services sont déjà passés pour tenter de les déloger ou pour du trafic de drogue, mais les problèmes reviennent toujours. »

Sa conclusion est amère: « C’est un enfer ».