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            Ovale Masqué
        
Publié le
15 sept. 2025 à 18h31
Cela fait environ un mois que la Coupe du monde de rugby 2025 a débuté. Pour le plus grand plaisir des passionnés de rugby purs et durs, ceux qui sont prêts à mendier dans la rue pour avoir une stream en 540p d’Afrique du Sud – Brésil. Mais la compétition a aussi ses détracteurs, avec ce sempiternel argument déjà utilisé chez les hommes : les phases de poules sont inintéressantes, il n’y a que des scores fleuves, blablabla.
Heureusement, pour satisfaire ceux qui pensent que l’intérêt d’une manifestation sportive ne se juge que sur le critère du suspense concernant le vainqueur, le XV de France est là ! Un XV de France qui a entendu les critiques, et qui a décidé d’abaisser encore un peu plus son niveau de jeu, afin de transformer ce qui aurait dû être une formalité en bataille épique.
Enfin, on a tremblé, poussé, puis sauté du canapé devant un match des Bleues ! Enfin on a eu un score serré et une grosse trouille jusqu’au coup de sifflet final. Profitez-en. C’est vraiment pas dit que ça arrive à nouveau samedi prochain.
    
    Isabelle Ithuburu sous le déluge en bord terrain : on se croirait revenu en 2012 devant Canal +, juste avant un derby basque. Douce nostalgie. (©TF1)Le film du match
Bien sûr, « il faut respecter ces Irlandaises », 5e nation mondiale dans un sport pratiqué sérieusement par 7 pays. Mais il n’y avait a priori pas de quoi s’inquiéter plus que ça, sachant qu’elles n’ont plus battu la France depuis 2017. On en profite pour saluer l’impeccable bilan d’Emmanuel Macron sur ce point : aucune défaite contre le XV du Trèfle féminin depuis son élection.
    
    Laisse pas traîner ta gamine. (©TF1)
Mais un facteur complètement imprévisible est venu équilibrer les forces dimanche : la météo. Loin devant l’Angleterre, l’Afrique du Sud ou Craig Joubert, Evelyne Dhéliat reste la plus grande ennemie du rugby français. Combien de fois au cours de l’histoire un sélectionneur français s’est réveillé le matin d’un match importantissime, a ouvert ses volets et s’est dit « ah ben merde il pleut… on a prévu un plan B ?». On ne les compte plus.
Eh oui, parfois il fait moche en Angleterre, qui aurait pu prédire. Des conditions de jeu qui vont favoriser les Irlandaises, bénéficiant du vent dans le dos en première période et qui décident immédiatement d’aller jouer dans le camp bleu. Dannah O’Brien tape un grand coup de pompe au fond du terrain. Le vent, c’est chiant, certes. Mais en principe, ça ne fait pas oublier les règles du rugby. C’est pourtant ce qui arrive à Charlotte Escudero, qui dévie le ballon dans son en-but en tentant de l’attraper, puis qui va aplatir quelques secondes plus tard comme si de rien était. Les Bleues tentent de se mettre en position de renvoi d’en-but, au bluff. L’arbitre ne se fait pas avoir et donne logiquement une mêlée à 5m aux Irlandaises.
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    La prochaine fois qu’on retouche le ballon, c’est dans 40 minutes. (©TF1)
Les Bleues récupèrent le ballon, mais le perdent presque instantanément après une passe de Bourdon-Sansus pour Vernier qui sonnait comme un « ben vas-y débrouille-toi hein ». Les Vertes pilonnent la ligne française et finissent par marquer par l’intermédiaire de Monaghan. Un essai finalement refusé à la vidéo, les Irlandaises ayant commis un micro en-avant 14 jours plus tôt lors de leur match de poule face au Japon. Ça ne changera pas grand-chose puisque Djougang marquera quelques secondes plus tard. Enfin, si ça change quelque chose : 2 points en moins pour l’Irlande, la transformation étant plus compliquée que la première fois.
    
    La N°10 qui défend au ras, on sent que c’est travaillé à l’entraînement. (©TF1)
En 5 minutes, la France a donc encaissé autant d’essais que sur toute la phase de poule. Et la mauvaise passe va continuer un bon moment : incapables de trouver de la longueur sur le jeu au pied à cause du vent, les Bleues essaient de jouer de leur propre camp, envoient le ballon au large et se risquent même aux aufelodes. Mais comme d’habitude, elles le font en donnant l’impression qu’elles ont découvert l’existence de leurs mains un quart d’heure plus tôt, ce qui ne donne pas de grands résultats. Plus inquiétant encore, elles sont en difficulté même sur leurs points forts habituels, comme la mêlée.
    
    Si même Gaby s’y met… (©TF1)
Rose Bernadou, effarée par ce triste spectacle, décide de plaquer une Irlandaise avec sa tête et se fait exclure 10 minutes. Elle ne reviendra pas, son protocole commotion n’ayant pas été concluant.
    
    Elle aurait répondu « oui » à la question « pensez-vous que Stefan Etcheverry est un commentateur pertinent ? ». (©TF1)
En supériorité numérique, les Irlandaises se lancent dans une phase de possession d’environ 25 minutes : on croirait revoir l’Irlande de Johnny Sexton contre le XV de France de Philippe Saint-André, ces matchs où l’on avait l’impression que toucher le ballon était interdit si on avait un maillot bleu. La défense française est courageuse, mais ça finit à nouveau par craquer. Après une grosse charge d’Aoife Wafer, O’Brien écarte vers Flood qui marque le deuxième essai des Vertes.
    
    Flood, un nom qui donnera peut-être quelques cauchemars aux supporters toulousains. (©TF1)
0-10, puis 0-13 après une pénalité sifflée contre la mêlée française. Alors certes, c’est un challenge rigolo de se mettre un gros handicap à remonter en seconde période, mais là ça commence tout de même à faire beaucoup. Surtout que les Irlandaises décident de planter à nouveau leur Quechua près de l’en-but bleu, après un ballon porté qui a progressé sur 30 mètres (ça promet pour l’Angleterre dis donc).
    
    Plus Didier que Pauline sur ce coup. (©TF1)
À peu près rien n’a fonctionné côté français sur cette première période, mais on peut au moins se vanter d’un truc : la défense est courageuse. Et du courage, il en faut pour résister pendant 7 minutes et plus de 30 temps de jeu, surtout après un nouveau carton jaune infligé à Manae Feleu.
    
    Ces pick and go pendant 5 minutes, au moins, ça rappelle aux supporters d’Exeter les grandes heures de leur équipe. (©TF1)
Une séquence qui nous rassure : le XV de France n’est peut-être pas très bon en rugby, mais il est presque injouable en lutte gréco-romaine. Les Irlandaises rentrent au vestiaire avec « seulement » 13 points d’avance et peut-être le sentiment d’avoir loupé l’occasion de tuer le méchant du film d’horreur. Il va revenir, c’est sûr, et il ne sera pas content.
    
    Lina Queyroy termine ce premier acte avec des stats impressionnantes : un ballon touché, un défenseur battu (elle-même). (©TF1)
Les Bleues reviennent en effet du vestiaire « avec des intentions ». Mais les Irlandaises ont aussi des intentions, notamment celles de transformer les rucks en zones de guerre où tout est permis. Et, comme souvent, l’arbitre est aussi efficace que le droit international pour faire cesser les hostilités.
    
    Les bagarres chez les féminines : aussi nulles que chez les hommes, mais au moins ça s’attrape pas par le col pour faire genre on est des gros durs. (©TF1)
On notera que côté français, on se laisse aussi aller à quelques excès, à l’image d’Axelle Berthoumieu, suspectée d’avoir mordu la star irlandaise Aoife Wafer. Difficile de se faire un avis définitif sur les images, mais ma qualité de journaliste m’oblige à préciser que la troisième ligne française est originaire de l’Aveyron, terre où le cannibalisme est encore pratiqué de nos jours…
    
    Les Irlandais pourraient être compréhensifs, ils savent ce que c’est la grande famine. (©TF1)
Wafer, toujours elle, va s’illustrer avec une faute assez bête qui va offrir une pénalité cadeau aux Françaises en face des poteaux. Bourgeois transforme et ramène son équipe à 10 points. On sent les Bleues plus incisives, mais elles sont toujours pénalisées par cette étrange tactique mise en place depuis 3 ans, consistant à paniquer et balancer le ballon en l’air quand on ne sait plus quoi faire.
    
    Alors non, le ballon n’explose pas si vous le gardez au sol. (©TF1)
Au bout de 55 minutes, on commence enfin à réaliser que ce serait peut-être mieux de faire des choses simples. Contre l’avis du staff, les joueuses décident de taper en touche et de partir sur un ballon porté, puis de se lancer dans des grands tout droits. Comme Bernadou en première période, Moore est sanctionnée d’un jaune pour un choc tête contre tête. Les Bleues insistent et après une belle inspiration de Bourdon-Sansus, Escudero franchit l’en-but. Enfin.
    
    Serait-ce… un lancement de jeu ?? (©TF1)
Dans ce genre de match, c’est pas mal d’avoir une buteuse qui sait passer des transfos en coin, ce que réussit Morgane Bourgeois malgré un vent à décorner un Premier ministre. 13-10. La bande à Feleu semble avoir enfin pris le dessus physiquement, et on peut même apercevoir des bouts de rugby, comme sur une action où Fall-Raclot déchire la défense et parvient à transmettre pour Marine Ménager – l’occasion de découvrir qu’elle dispute bien ce match. Mais un grattage de Flood vient encore sauver la Verte Erin.
Cette pauvre Wafer a décidément eu droit à un traitement spécial de la part des Bleues. (©TF1)
En plus de s’arracher en défense, les Irlandaises ont encore des ressources en attaque. Encore une fois, elles kidnappent le ballon sur une longue séquence et rejoignent leur résidence secondaire dans les 22 mètres français. Il ne reste qu’un quart d’heure à jouer, et on se dit que le staff tricolore a peut-être enfin trouvé la solution ultime pour ne pas perdre contre l’Angleterre en demi-finale : ne pas aller en demi-finale.
    
    Quand tes ambitions se fracassent sur la réalité. (©TF1)
Mais comme souvent avec la France, c’est quand on semble au fond du seau qu’un miracle se produit. Rentrée en jeu, Manon « Kwagga » Bigot gratte un ballon précieux au sol. Et, inexplicablement, les Françaises décident de le jouer. Et inexplicablement, elles ne commettent pas un en-avant.
    
    Ca va tout de suite mieux quand on n’essaye pas des passes après contact qui ne marchent que dans Jonah Lomu Rugby Challenge sur PS3. (©TF1)
Joanna Grisez est décalée en bout de ligne, et même si l’en-but est loin, on ne doute pas une seule seconde : elle va aller au bout.

Bourgeois rate la transfo, 15-13. Mais l’arrière française se rattrape en passant une pénalité qui permet au XV de France de se donner un peu d’air, 18-13. Normalement, on devrait connaître 5 dernières minutes tranquilles. Mais rien n’est jamais très normal avec cette équipe, qui nous offre une gestion de fin de match digne des meilleurs moments de l’ASM Clermont-Auvergne. Le chef-d’œuvre : alors que Manon Bigot, encore elle, avait gratté le ballon de la victoire, la pénalité est retournée contre la France pour un plaquage haut.
    
    Manon Bigot : la coupe à Tom Cruise dans Vanilla Sky, à peu près la même taille, mais plus d’actions que dans un Mission Impossible. (©TF1)
Les Irlandaises vont en touche pour une action qui va durer 2 minutes, ressenti 3 ans. Il y a d’abord un ballon porté qui échoue près de la ligne bleue. Puis un deuxième après une pénalité française (au moins la 17e du match). Mais finalement, le ballon est libéré, et les Françaises délivrées. Victoire 18 à 13.
    
    Quand t’es soulagée parce que c’est pas toi qui en prendre 70 contre l’Angleterre dans une semaine. (©TF1)
Que penser d’un tel match ? Évidemment, rugbystiquement tout est quasiment à jeter à part une grosse séquence défensive en fin de première période et un bel essai sur ballon de récupération en seconde. Mais c’est aussi le genre de match qui peut consolider le caractère d’un groupe et le pousser à réaliser des exploits que l’on pensait impossibles. Car oui, je la connais, la recette du French Flair : une équipe qui joue mal, un staff qui se taille dans la presse, des supporters qui n’y croient pas un seul instant… mélangez tout ça dans un mixeur, et la magie peut opérer.
Bon, après, si ça se trouve, c’est une recette de merde que j’ai trouvée sur Marmiton et on aura juste envie de vomir à la fin. Réponse dans 5 jours.
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