De 1895 à 1950, l’Hôtel des Voyageurs et l’Hôtel Poupon, à Pont-Croix, ont joué un rôle déterminant dans l’accueil d’artistes, leur offrant ateliers, pension et créant ainsi les conditions d’émergence d’un foyer de création dans la petite cité de caractère. C’est ce que permet de découvrir la très belle exposition « Peindre Pont-Croix » présentée dans le cadre historique du Marquisat jusqu’à la fin du mois de septembre et peut-être davantage au vu de son succès.
Le lieu doit probablement son nom au fait qu’il a été, à la fin du XVIIe siècle, la propriété de Madame de Forcalquier, dernière marquise de Pont-Croix. Un formidable écrin pour des œuvres de Lionel Floch, Paul de Lassence, Gaston Bouillon, Yann Durest, Max Jacob, Oscar Chauvaux, Antonio Conceição Silva ou encore Henri Matisse. De ce dernier ne sont présentées que des reproductions. Cependant, plus qu’une succession de tableaux, ce qui est proposé ici c’est un véritable cheminement géographique et historique richement détaillé. Un gros travail de recherches mené par Bertrand Caroff qui a conçu l’exposition avec Céline Goudédranche. La majorité des œuvres ont été prêtées par les particuliers.
Au détour d’un bel escalier : un grand tableau d’Émile Simon intitulé « Bretagne Mystique ». (Le Télégramme/Lannig Stervinou)L’arrivée du chemin de fer, un point de départ
« J’avais envie de rendre hommage à ces hôtels qui n’existent plus et à ceux qui favorisaient la création artistique à l’instar de Valentine Gloaguen, dite la bonne hôtesse », explique Bertrand Caroff qui se réjouit de la fréquentation estivale de l’exposition. Jusqu’à ce jour, 5 000 visiteurs ont pu apprécier la jolie cité sous toutes ses coutures picturales. Le véritable point de départ de son histoire artistique, c’est l’arrivée du chemin de fer, en 1894. En 1895, le jeune peintre Antonio Conceição Silva arrive à Paris en compagnie d’amis portugais.
Suivant les recommandations du peintre Jean-Paul Laurens, ils prennent le train en direction de Pont-Croix. Bien que sa célèbre fresque, qui ornait la salle à manger de l’Hôtel des Voyageur, ait été détruite lors de sa fermeture en 1958, le bâtiment ayant accueilli les ateliers existe encore. C’est d’ailleurs là que Bertrand Caroff a découvert une porte peinte par l’Américain Abel George Warshawsky dont une reproduction est présentée. « La porte était trop fragile pour être exposée mais elle est dorénavant en sécurité », indique-t-il.
Je savais que cette peinture existait. Il a fallu mener l’enquête
Les petits miracles de l’exposition
« C’est un des petits miracles de cette exposition », comme se plaît à dire Bertrand Caroff. Mais ce n’est pas le seul : « On a retrouvé dans le grenier de l’ancien Hôtel des Voyageurs deux peintures sur contreplaqué de Michel Mousseau du début des années 50. L’artiste a désormais 92 ans et vit à Paris. Je l’ai appelé pour lui demander un petit mot pour le catalogue et mieux encore, il est venu nous rendre visite. Un type merveilleux qui m’a beaucoup touché », raconte Bertrand Caroff.
Un tableau de Max Jacob n’a intégré l’exposition qu’en cours de route. « C’est une œuvre qui est passée d’un musée à l’autre et a été perdue. Je savais que cette peinture existait. Il a fallu mener l’enquête. En fait, elle était dans les réserves du musée départemental mais pas répertoriée comme lui appartenant », relate-t-il.
L’exposition offre un regard aiguisé sur une ville où l’art continue à s’exprimer sous toutes ses formes : dessin, peinture, poterie, vitrail, textile, musique, théâtre, poésie, littérature, photographie… Autant de disciplines qui témoignent de la vitalité créative contemporaine du lieu et de sa capacité à inspirer de nouvelles vocations. Nul doute que cette cité d’artistes a encore bien des jours devant elle.
Pratique
Le Marquisat, 6 rue de la prison à Pont-Croix. Ouvert tous les jours de 11 h à 13 h 30 et de 13 h 30 à 18 h.