La CGT a annoncé une mobilisation réussie pour cette journée de grève intersyndicale, ce jeudi, avec plus d’un million de personnes dans les rues de France. A Lille, dans le Nord, s’il est difficile d’estimer la taille du cortège au moment où nous écrivons ces lignes, on peut dire sans risque que les manifestants n’étaient pas moins de 5.000. Des manifestants aux revendications multiples, de la Palestine aux choix budgétaires du gouvernement, mais tous motivés pas un même ras-le-bol.

Horaire classique et parcours habituel pour cette manifestation lilloise. En tête de cortège, la CGT et son gros ballon gonflable entouré de militants venus en nombre. Gilet rouge floqué de l’acronyme du syndicat, Quentin, la trentaine, a déjà arpenté le pavé une paire de fois. « Je suis intermittent du spectacle, ça fait depuis 2021 que je suis dans la rue », assure-t-il. Logiquement selon lui, il était aussi présent pour « Bloquons tout », le 10 septembre dernier. « Que ce soit pour dégager Macron ou pour des revendications plus générales, les gens se mobilisent. J’en ai vu qui n’avaient pas manifesté depuis longtemps et beaucoup de nouvelles têtes aussi », poursuit le trentenaire. Et lui, il est chaud pour descendre dans la rue « jusqu’à plus soif ».

« A un moment, y’en a ras le bol »

Un peu plus loin dans le cortège, les drapeaux de la CGT ont fait un peu de place à ceux de la Palestine, tenus majoritairement par des jeunes. Sarah, étudiante, la vingtaine, en est. « Ce n’est pas possible ce qu’il se passe à Gaza, sous les yeux de tout le monde et personne ne fait rien », lance-t-elle. Ce que l’étudiante voudrait, ce sont des actions concrètes : « Ça parle beaucoup du côté des politiques, mais ça ne fait pas grand-chose. On en est où de la reconnaissance de la Palestine par la France ? »

Hélène, la quarantaine, s’est mise sur le côté du cortège, comme si elle était trop timide pour s’incruster dedans. Pourtant, elle n’est pas là en touriste : « Quand on a des enfants et des personnes retraitées dans son entourage, quand on voit que c’est sur le dos de gens comme nous, des classes moyennes, qu’on tape dans arrêt pour éponger les dettes, à un moment, y’en a ras le bol. » Employée dans le privé, Hélène n’est pas une pro de la manif. « Je suis là aujourd’hui mais je ne peux pas me permettre de manifester toutes les semaines », explique-t-elle. « Financièrement d’abord, mais aussi parce que je ne veux pas pénaliser mon employeur », ajoute la quadragénaire.

Même chose pour Richard, un commercial reconverti en chauffeur routier. « Quand je me suis retrouvé au chômage, c’était au moment de la réforme du travail, et la durée de mes droits a été presque divisée par deux », se souvient-il. Lui non plus n’est pas habitué à battre le pavé, mais il y a eu la goutte d’eau : « Les solutions que propose le gouvernement pour cette histoire de dette ne sont pas correctes, déplore-t-il. On veut nous sucrer un jour férié pendant que les ultra-riches sont épargnés. » Loin de s’extasier sur le décret Lecornu qui supprime aux anciens ministres leurs avantages, il estime juste que « c’est bien le minimum qu’il pouvait faire ». Et lui aussi est prêt à remettre ça, « mais pas toutes les semaines non plus ».