Les relations tendues entre la Belgique et le Rwanda auront-elles un impact sur les Mondiaux UCI ? « Il n’y a plus d’ambassade belge à Kigali »

Le premier duel entre les deux hommes sera le seul sur un vélo de chrono mais il n’est pas le moins intéressant. On le décrypte en quatre questions avec Rik Verbrugghe, l’ancien sélectionneur de Belgian Cycling et ancien spécialiste de l’exercice chronométré (il est d’ailleurs toujours détenteur du prologue le plus rapide de l’histoire, sur le Tour d’Italie 2001 : 58,874 km/h).

Pourquoi Tadej Pogacar a-t-il décidé de s’aligner sur le contre-la-montre ?

Dixième en 2021 à Louvain, sixième en 2022 à Wollongong et 21e en 2023 à Glasgow. Ce sont les résultats de Tadej Pogacar sur les chronos des Mondiaux auxquels il a participé. Aucun podium. L’année dernière, le Slovène avait fait l’impasse sur le contre-la-montre de Zurich mais, cette fois, il sera bien au départ.

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« D’un côté, c’est un peu surprenant, d’autant que la décision a été prise tardivement mais, d’un autre côté, on sait que c’est un coureur qui aime les challenges et, ici, il a la possibilité d’aller chercher un titre de champion du monde qu’il n’a pas à son palmarès, indique Rik Verbrugghe, qui pointe la progression de Pogi dans l’exercice ces dernières années. Une évolution qui va de pair avec le fait que le Slovène s’entraîne plus souvent sur son vélo de chrono que par le passé. Lors des récents Tours de France, il était toujours un candidat sérieux à la victoire dans les chronos, même si des coureurs comme Evenepoel ou Ganna lui sont un peu supérieurs… sur un parcours plat. »

À qui le parcours convient-il le mieux ?

Avec ses 40,6 kilomètres et ses 680 mètres de dénivelé positif, le chrono de Kigali n’est pas plat. Mais il n’est pas non plus montagneux, là où Pogacar a l’avantage sur Evenepoel. Les deux seuls fois où Pogi a battu le double champion olympique sur un contre-la-montre, c’était sur des tracés difficiles : le chrono de Nice sur le Tour 2024 (33,7 km et 728 m de dénivelé positif) puis sur celui de Peyragudes sur le Tour 2025 (10,9 km et 675 m de dénivelé positif).

Les confrontations entre Evenepoel et Pogacar (contre-la-montre)Les confrontations entre Evenepoel et Pogacar (contre-la-montre) ©IPM Graphics

Le parcours de Kigali, on le qualifiera d’accidenté, avec deux passages sur la côte de Nyanza (2,5 km à 5,8 % dans un sens, 4,1 km à 3,1 % dans l’autre) puis sur la côte de Peage (2 km à 6 %) et une arrivée en haut de la côte pavée de Kimihura (1,3 km à 6,3 %).

Parcours du contre-la-montreParcours du contre-la-montre ©IPM Graphics

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Le profil du chrono de Kigali équilibre les choses entre les deux coureurs.

« Ce profil de parcours équilibre les choses entre Remco et Pogacar, reprend Verbrugghe. Cela va vraiment dépendre de la forme du jour. Et on a vu au Canada que le Slovène était en grande forme, tandis qu’Evenepoel n’était pas encore au sommet sur le Tour de Grande-Bretagne. Il était toujours en reconstruction après ce qu’il s’est passé sur le Tour de France. »

Qui est le favori ?

Double champion du monde du chrono (2023, 2024) le Belge s’élancera tout de même avec de sérieux atouts. « Le chrono est toujours la discipline où il excelle le plus. Selon moi, Remco est le favori. Il a complété sa préparation ces dernières semaines et cela devrait faire la différence pour qu’il soit à son meilleur niveau. »

D’autant qu’avec son aérodynamisme quasi naturel, Evenepoel semble avoir une petite longueur d’avance dans les parties plates, les descentes ou les bosses roulantes. « Tant Remco que Pogacar sont déjà venus réaliser des tests dans notre tunnel aérodynamique, détaille Verbrugghe, manager général de l’Aero Performance Lab à Beringen. D’un simple regard vers sa position, on comprend directement que Remco est vraiment fait pour l’exercice du chrono. Il est petit, compact et puissant. Ce qui lui permet de battre des spécialistes comme Filippo Ganna ou Wout van Aert, qui sont pourtant plus puissants que lui. »

En plus de l’aérodynamisme, Evenepoel (qui utilisera la même combinaison Bioracer que lors des JO 2024 de Paris, dimanche, à Kigali) se distingue aussi par sa préparation. « Il faut être vraiment minutieux pour arriver au moment du départ dans les meilleures conditions possible et dans ce domaine-là, Remco a un gros avantage par rapport à ses concurrents. Il a une capacité exceptionnelle à se mettre dans sa bulle pour les gros évènements et il l’a déjà prouvé à plusieurs reprises. Cela peut faire la différence par rapport à un Pogacar qui fonctionne différemment et donne l’impression d’être toujours relax et un peu détaché. »

Quel impact le chrono peut-il avoir sur la course en ligne ?

En venant défier Remco Evenepoel sur « son » terrain, Tadej Pogacar ajoute forcément un peu de pression sur les épaules du Belge. « Remco a envie de se mettre en confiance avant la course en ligne en s’imposant ce dimanche. Mais s’il ne gagne pas, cela pourrait avoir l’effet inverse. » Tout ou rien, en résumé.

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C’est moins le cas pour Pogacar. « Le Slovène n’a rien à perdre… à moins d’une vraie contre-performance, termine Rik Verbrugghe. Une victoire serait du bonus et un boost terrible car tout le monde attend Remco sur la plus haute marche du podium. Mais, en cas de médaille d’argent, le capital confiance de Pogacar ne sera pas entamé. » Et de manière plus générale, on voit mal qui pourrait empêcher le duo de monter sur les deux premières marches du podium. Reste à savoir dans quel ordre.

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