L’ancien ministre socialiste et commissaire européen, Pierre Moscovici, a annoncé jeudi son départ de la Cour des comptes, après cinq ans à sa tête. Car il nourrit désormais un autre projet : celui d’intégrer la Cour des comptes européenne, dont le rôle est de veiller à l’utilisation correcte des fonds de l’UE et à améliorer la gestion financière de l’Union.

« La France a proposé ma candidature en qualité de nouveau membre français de la Cour des comptes européenne. Cette proposition sera soumise au Parlement européen et au Conseil à l’automne, en vue d’une nomination à partir du 1er janvier 2026 », a-t-il écrit dans un courrier interne dont l’AFP a obtenu copie. « Cette proposition m’honore et constitue le prolongement de mon engagement depuis plus de quarante années au service des juridictions financières, de l’État et des institutions européennes », assure le responsable.

Pierre Moscovici, 68 ans, avait été nommé en 2020 premier président de la Cour des comptes, et a vu son mandat prolongé jusqu’à septembre 2026 par un décret reculant la limite d’âge à ce poste daté du 15 juillet dernier. S’il indique avoir décidé de « clore son mandat avant son terme de septembre 2026 », Pierre Moscovici assure que son « mandat ne s’achève pas aujourd’hui » : « jusqu’à son terme je serai pleinement mobilisé à vos côtés ». « En janvier, je partirai fier d’avoir été à la tête d’une institution et d’un collectif exceptionnels et tout entier dévoués à l’intérêt général », ajoute-t-il.

Un mandat remarqué

Son passage à la Cour des comptes a été marqué par quelques critiques. En juillet notamment, Le Monde avait notamment fait état du mécontentement de magistrats dont le report du départ à la retraite avait été rejeté. Ils dénonçaient dans le journal « des décisions arbitraires et discrétionnaires » ainsi qu’une gouvernance « très politique » par l’ancien homme politique socialiste.

Début septembre, Pierre Moscovici avait, lui, tancé « une poignée de magistrats » de la juridiction critiquant, selon lui mensongèrement, sa gouvernance par voie de presse, se défendant de tout parti pris politique dans sa gestion. Pierre Moscovici avait également répondu en juillet à des critiques sur la nomination de Najat Vallaud-Belkacem, ex-ministre socialiste de l’Éducation nationale, en tant que conseiller maître de la Cour – assurant que la procédure de recrutement avait été « parfaitement objective ».

Ses mandats ont également été émaillés de coups d’éclat et d’interventions fracassantes comme au début de l’année lorsqu’il a menacé de refuser de certifier les comptes de l’État si les recommandations de l’institution n’étaient pas mieux écoutées. Notant que, « pour la 19e année consécutive, les comptes de l’État ne sont pas en mesure d’être certifiés sans des réserves très significatives », Pierre Moscovici avait déclaré « qu’en l’absence de progrès en 2025, la Cour pourrait être amenée à (…) ne pas les certifier ».

Autre intervention remarquée : à l’automne 2024, inquiet de prévisions économiques mal évaluées ayant abouti à un dérapage inédit du déficit public cette année-là, celui qui est aussi président du Haut conseil des Finances publiques (HCFP) avait estimé qu’il verrait bien cet organisme prendre en main les prévisions économiques de la France.

Deux fois ministre

Fils d’un couple de grands intellectuels juifs venus d’Europe de l’Est, Pierre Moscovici a, dans sa jeunesse, flirté avec le trotskisme. Il revendique désormais, et depuis de longues années, un positionnement social-démocrate.

Ancien élève de l’ENA, entré au parti socialiste en 1984, il fait ses armes électorales en 1994 pour des élections cantonales sur les terres de Peugeot, celles où se trouve l’usine historique de Sochaux. Il sera également député du Doubs.

Fidèle parmi les fidèles de Dominique Strauss-Kahn, il a rebondi au sein de l’équipe de campagne de François Hollande après que son mentor a été balayé en 2011 par un scandale sexuel.

Il a également été député européen, et deux fois ministre : des Affaires européennes sous Lionel Jospin, puis patron de Bercy au début du mandat de François Hollande, dans deux gouvernements successifs de Jean-Marc Ayrault.