La recherche de
vie extraterrestre vient de prendre un tournant inattendu. Alors
que les astronomes s’acharnent depuis des décennies à construire
des télescopes toujours plus grands et plus circulaires, une équipe
de chercheurs propose une approche radicalement différente :
abandonner la forme ronde traditionnelle au profit d’un design
rectangulaire surprenant. Cette innovation pourrait transformer
notre capacité à détecter des planètes semblables à la Terre dans
leur zone habitable, ouvrant la voie à la découverte de dizaines de
mondes potentiellement habitables dans notre voisinage
cosmique.

Le défi de
l’infiniment petit

Imaginer détecter une
planète de la taille de la Terre autour d’une étoile distante
équivaut à tenter de distinguer une luciole voltigeant autour d’un
phare depuis l’autre bout du continent. Cette comparaison n’a rien
d’exagéré : en lumière visible, une planète terrestre apparaît un
milliard de fois plus faible que son étoile hôte.

Les astronomes ont
néanmoins trouvé une parade en observant dans l’infrarouge,
particulièrement à une longueur d’onde de 10 microns. À cette
fréquence spécifique, la vapeur d’eau présente dans l’atmosphère
d’une planète émet un signal caractéristique, et le contraste avec
l’étoile s’améliore considérablement. La planète ne paraît alors
« que » un million de fois plus faible que son astre – un
exploit qui demeure extraordinairement difficile mais techniquement
réalisable.

Le télescope spatial James Webb exploite déjà
cette approche avec succès, détectant la vapeur d’eau dans
l’atmosphère de planètes géantes et chaudes. Cependant, son miroir
de 6,5 mètres de diamètre reste insuffisant pour observer des
mondes de taille terrestre dans la zone habitable d’étoiles
similaires au Soleil.

L’impasse
des télescopes géants

La physique impose des
contraintes impitoyables. Pour résoudre une planète terrestre à 30
années-lumière de distance, la résolution angulaire requise exige
un télescope de près de 20 mètres de diamètre. Un tel mastodonte
circulaire représenterait un cauchemar technique et financier : sa
construction coûterait des dizaines de milliards, et son
déploiement dans l’espace nécessiterait des prouesses d’ingénierie
jamais tentées.

Les alternatives
traditionnelles ne sont guère plus encourageantes. L’idée de lancer
plusieurs petits télescopes fonctionnant en interféromètre –
combinant leurs signaux pour simuler un télescope géant – bute sur
des défis d’alignement d’une précision quasi impossible à atteindre
avec les technologies actuelles.

Cette impasse a longtemps
découragé les astronomes, repoussant aux calendes grecques l’espoir
de détecter directement des exoplanètes habitables.

La
révolution rectangulaire

Heidi Newberg,
astrophysicienne au Rensselaer Polytechnic Institute, propose
une solution aussi élégante qu’inattendue :
abandonner la forme circulaire traditionnelle pour un design
rectangulaire de 20 mètres sur 1 mètre. Cette géométrie
inhabituelle exploite une propriété fondamentale de l’optique :
seule la dimension du télescope dans la direction perpendiculaire à
la ligne reliant la planète à son étoile détermine la capacité de
résolution.

Cette approche
révolutionnaire transforme complètement l’équation économique. Là
où un miroir circulaire de 20 mètres de diamètre nécessiterait une
surface collectrice de plus de 300 mètres carrés, le design
rectangulaire se contente de 20 mètres carrés – soit à peine moins
que le télescope James Webb actuel.

Le télescope rectangulaire
fonctionnerait en s’alignant longitudinalement avec l’orientation
de la planète cible par rapport à son étoile. Pour observer des
systèmes planétaires dans différentes orientations, il suffirait de
faire pivoter l’ensemble de l’instrument, une manœuvre
techniquement simple à réaliser dans l’espace.

télescope
Conception d’un télescope spatial rectangulaire, inspiré du
Diffractive Interfero Coronagraph Exoplanet Resolver (DICER).
Crédit image : Leaf Swordy/Rensselaer Polytechnic
Institute.Un
chasseur d’exoplanètes optimisé

Cette innovation pourrait
transformer notre exploration de l’univers proche. Dans un rayon de
32,6 années-lumière autour du système solaire, les astronomes ont
identifié environ 69 étoiles similaires au Soleil et près de 300
naines rouges plus froides – autant de cibles potentielles pour ce
nouveau type de télescope.

Les projections de Newberg
sont particulièrement encourageantes : son équipe estime qu’un tel
instrument pourrait détecter la moitié des planètes terrestres
existant autour d’étoiles comparables au Soleil en moins de trois
ans d’observation. Si les statistiques actuelles se confirment –
environ une planète terrestre par étoile similaire au Soleil –
cette mission pourrait révéler une trentaine de mondes
potentiellement habitables dans notre voisinage cosmique
immédiat.

L’avenir
de l’exploration spatiale

Cette approche
rectangulaire représente bien plus qu’une simple optimisation
technique : elle incarne une philosophie différente de
l’exploration spatiale, privilégiant l’ingéniosité à la force
brute. Plutôt que de construire des instruments toujours plus
colossaux, cette stratégie exploite intelligemment les propriétés
physiques pour maximiser les performances tout en minimisant les
coûts.

L’étude arrive à point
nommé alors que les agences spatiales planifient la prochaine
génération de télescopes. Si cette proposition séduit les
décideurs, nous pourrions assister dans les prochaines décennies à
une révolution dans notre compréhension des mondes habitables,
transformant définitivement notre vision de notre place dans
l’univers.

Dans cette quête séculaire
de vie extraterrestre, parfois les solutions les plus
révolutionnaires émergent des approches les plus inattendues.