C’est l’une des plus importantes affaires de blanchiment de ces dernières années, dévoilée ce mardi 23 septembre, par un simple communiqué du parquet de Marseille. Le démantèlement d’un réseau tentaculaire et international, mais centré sur la région marseillaise, qui permettait à des groupes criminels de la France entière, et notamment la DZ Mafia, d’écouler l’argent généré par le trafic de stupéfiants ou encore ses activités d’extorsion, par dizaines de millions d’euros. 

L’enquête ouverte le 6 janvier dernier par le parquet de la juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Marseille trouve son origine de l’autre côté des Alpes, lorsque, quelques semaines plus tôt, en décembre 2024, les enquêteurs milanais de la Guardia di Finanza, les douaniers italiens, ont alerté leurs collègues de la Section de recherches de Marseille au sujet des activités d’une vaste organisation criminelle spécialisée dans le blanchiment d’argent.

Quelque 2,4 millions d'euros en petites coupures ont également été saisis lors de l'interception du convois de collecteurs entre l'Italie et l'Espagne.Quelque 2,4 millions d’euros en petites coupures ont également été saisis lors de l’interception du convois de collecteurs entre l’Italie et l’Espagne. DR

En effet, depuis au moins le mois d’octobre 2024, cette équipe hétéroclite basée à Milan et dirigée par des Kosovars et des personnes originaires du Moyen-Orient, concentrait des fonds d’origine douteuse en provenance de Marseille, essentiellement, mais aussi de Lyon et Paris, afin de les convertir en or. Les torrents d’argent liquide qui affluaient par millions d’euros à un rythme hebdomadaire, devenaient ainsi des lingots d’or qui étaient ensuite exportés vers la Turquie et passant par le Kosovo.   

Des dizaines de lingots d’or dans les coffres

En un peu plus de dix mois, on estime que près de 30 millions ont ainsi traversé les Alpes après avoir été collectés par des équipes composées de Maghrébins et de ressortissants syriens, qui dissimulaient les masses de cash dans des véhicules spécialement aménagés.

Pour retracer l’origine des fonds, une équipe commune d’enquête franco-italienne a été mise en place, en lien avec les parquets anti-mafia de Milan et Rome. En France, durant des semaines, une centaine de gendarmes des Sections de recherches de Paris à Marseille, en passant par Strasbourg et Chambéry, appuyés par le GIGN, ont suivi les collecteurs en contact avec les réseaux locaux, dessinant peu à peu une vaste toile sur laquelle apparaissaient notamment des personnes liées au trafic de drogue et à la DZ Mafia.

Jusqu’à ce que le 7 septembre dernier, les juges d’instructions marseillais décident de déclencher une opération à l’occasion d’un énième convoi, détecté entre l’Italie et l’Espagne, permettant outre l’interpellation de sept suspects, de saisir 55 kilos d’or pur, sous forme de lingots de 1kg poinçonnés et numérotés (l’équivalent, au cours actuel de 5,5M€)  et près de 2,4 millions d’euros en billets, majoritairement de 10, 20 et 50€.

Un deuxième coup de filet au bord de l’étang de Berre

Deux semaines après cette spectaculaire saisie, un deuxième coup de filet a été déclenché ce mardi 23 septembre, en lien avec les autorités judiciaires italiennes. C’est cette fois autour de l’Étang de Berre que les gendarmes ont encore interpellé huit autres de leurs cibles, tandis qu’au même moment, cinq suspects étaient appréhendés de l’autre côté des Alpes.

Pas moins de 17 perquisitions ont été réalisées à Vitrolles, Marignane, Martigues et Berre, où ce sont encore près de 220 000€ en liquide qui ont été saisis, outre des véhicules et des objets de luxe, bijoux et maroquinerie. Les suspects sont désormais entendus en garde à vue par les gendarmes de la Section de recherches de Marseille.