Par

Aurélien Delavaud

Publié le

23 sept. 2025 à 21h44

Les prix et les récompenses ne sont pas tous agréables à recevoir. C’est le cas pour la ville de Saint-Pierre-lès-Elbeuf (Seine-Maritime), qui a reçu le dimanche 21 septembre 2025 une Pelleteuse d’argent. Un trophée synonyme de deuxième place aux Pelleteuses d’or, un concours ironique organisé par l’association Urgences patrimoine, pour dénoncer ce qu’elle considère comme des destructions évitables de monuments ou de symboles du patrimoine. La maire de la commune, elle, y voit un acte politique intéressé.

Plus de 8 000 votants

« On n’est pas réputé pour faire dans la dentelle, reconnaît d’emblée Alexandra Sobczak-Romanski, la présidente de l’association. On avait déjà fait ça en 2021, puis ça avait continué doucement… Cette année, on l’a relancé plus fort, pour appuyer là où ça fait mal. »

Au début de l’été, sept sites ont été retenus dans toute la France et, pour la première fois, ce sont les internautes qui les ont départagés. En tout, 8 750 personnes se sont prononcées, plaçant la ville de Provins largement en tête pour « avoir démoli une tourelle médiévale sans autorisation ».

Saint-Pierre-lès-Elbeuf arrive à la deuxième place avec 1 710 voix, pour « avoir démoli le Château de la Haline, alors qu’elle s’était engagée à le réhabiliter », selon Urgences patrimoine.

C’est cette notion de réhabilitation qui a mené à cette nomination. Annoncé au printemps, le chantier mené pour transformer le château en logements prévoyait de détruire la partie centrale de l’édifice, pour reconstruire un bâtiment neuf. Une étape qui est en cours de réalisation. Pour Alexandra Sobczak-Romanski, « dans le langage du patrimoine, réhabiliter ce n’est pas foutre les trois quarts par terre et remplacer par un cube ».

Pas une affaire politique ?

Pour la présidente de l’association, ce dossier comprend une dimension personnelle. « Oui, je suis moi-même habitante de Saint-Pierre-lès-Elbeuf, admet-elle. Ça m’a posé un vrai problème de conscience. J’ai honte parce que c’est à 800 m de chez moi et je n’ai pas été capable de me rendre compte de la chose. J’ai vu le mot  »réhabiliter », donc je ne me suis pas inquiétée avant de voir les pelleteuses arriver. J’aurais dû mieux me renseigner. »

Chateau de la Haline Saint-Pierre-lès-Elbeuf
Voici à quoi devrait ressembler le Château de la Haline, après les travaux. ©Atelier 970

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Pour autant, Alexandra Sobczak-Romanski assure que la nomination du château de la Haline aux Pelleteuses d’or n’est pas une obsession personnelle : « C’est parce que ça venait d’être fait ! » Surtout, elle se défend de toute volonté politique.

Oui, mon mari a été élu d’opposition, mais mon mari ce n’est pas moi. Ça pourrait être considéré comme un acte politique contre la mairie, mais ce n’est pas le cas. Nous, chez Urgences patrimoine, on est complètement apolitique.

Alexandra Sobczak-Romanski

Interrogée sur la question, Nadia Mezrar, la maire de Saint-Pierre-lès-Elbeuf, balaye complètement cet argument : « Cela vient de la femme d’un homme qui se présente sur la liste de monsieur Persichetti (candidat déclaré à la mairie, NDLR), donc pour moi, évidemment que c’est politique. »

Sans vouloir plus réagir à ce sujet, l’élue « espère juste que les gens qui vont y loger seront ravis de vivre dans cette résidence ».

Un diplôme symbolique

De son côté, Alexandra Sobczak-Romanski rappelle que la Ville n’est pas la seule impliquée dans ces travaux, qui sont portés par un bailleur privé. « Ce que l’on voulait pointer du doigt, c’est l’écart entre la communication qui a été faite et la réalité. On ne comprend pas comment offrir un avenir à un site qui n’existe plus », justifie-t-elle.

Pour l’association, ce prix a une valeur symbolique, comme il était trop tard pour envisager un recours : « Ça ne servait à rien de dépenser de l’argent et de l’énergie, ça ne va pas ramener le château ! »

Mais elle ne comptait pas pour autant rester les bras croisés. « Il n’y a pas de cérémonie ou de trophée, mais j’enverrai un diplôme, pour marquer le coup », conclut Alexandra Sobczak-Romanski.

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