FIGAROVOX/TRIBUNE – Un rapport de la Cour des comptes, publié ce mardi, alerte sur « la situation financière critique » de France Télévisions. Le fondateur de l’Institut pour l’Audace Politique (think-tank), Antonin Ferreira Roche, invite le groupe public à en tirer les leçons nécessaires.
Antonin Ferreira Roche est analyste financier et négociant au sein d’un fonds d’investissement. Il est le fondateur de l’Institut pour l’Audace Politique (think-tank libéral-conservateur).
Alors que le sujet du dérapage de la dépense publique et des comptes de l’État occupe tous nos responsables politiques, le rapport qui vient d’être publié par la Cour des comptes sur France Télévisions est une bombe.
Voilà des semaines que journalistes éditorialistes du groupe détenu à 100% par l’État sont en boucle sur la promotion de la fameuse taxe Zucman, censée rapporter 15 milliards d’euros en ponctionnant le capital des plus riches à hauteur de 2% par an.
On comprend mieux ce militantisme chevronné à la lecture de ce rapport accablant. L’État, qui finance déjà le groupe à hauteur de 80 % de son chiffre d’affaires chaque année (2,6 milliards pour 2024), va devoir être appelé à la rescousse pour renforcer les fonds propres du groupe, dans le rouge depuis 2021 !
En effet, le Code de commerce exige que la valeur des fonds propres d’une entreprise ne soit pas en dessous de la moitié de la valeur de son capital social. Dans le cas de France TV, c’est le cas depuis 2021 et, si rien n’est fait d’ici 2026, le groupe risque tout simplement la dissolution – un terme à la mode en ce moment.
Plus accablant encore, le rapport indique que ce problème grave ne semble visiblement pas vraiment inquiéter le conseil d’administration, qui y prête une attention plus que légère depuis quatre ans. La Cour des comptes, pourtant dirigée par un ancien haut cadre socialiste, Pierre Moscovici, ne mâche pas ses mots lorsqu’il s’agit de décrire la gestion financière du groupe audiovisuel public.
Sur les rémunérations de ses 8932 collaborateurs d’abord, qui bénéficient en 2024 d’un salaire brut moyen d’environ 74 000 €, lorsque l’INSEE indiquait en 2023 que moins de 10% des employés d’Île-de-France touchaient plus de 70 000 €, et qu’une grande partie des collaborateurs du groupe sont en région.
On apprend ainsi dans le rapport que 396 des collaborateurs du groupe gagnent plus de 100 000 € bruts par an, 31 personnes plus de 200 000 € (davantage que le Président de la République), et 5 personnes plus de 300 000 €.
On comprend mieux la fébrilité de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, qui accusait récemment CNews d’être une « chaîne d’extrême droite »
Antonin Ferreira
Les charges de personnel ont par exemple explosé de +105% chez France Info entre 2017 et 2024, alors que les audiences de la chaîne d’information ne parviennent toujours pas à décoller, bonne dernière à 0,7% de parts de marché contre 3,3% pour le leader CNews.
Sont également pointés du doigt des dépenses de taxi qui ont explosé, passant de 2,1 millions d’euros en 2019 à 3,8 millions d’euros en 2024.
Le groupe met également à disposition de ses dirigeants 53 véhicules de fonction, qui, à la différence des véhicules de service, peuvent être utilisés hors du travail et pendant les congés. Un dispositif qui n’a « pas d’équivalent chez d’autres entreprises publiques ni même chez la plupart des ministères », toujours selon le rapport de la Cour des comptes.
On comprend mieux la fébrilité de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, qui accusait récemment CNews d’être une « chaîne d’extrême droite », et avait publiquement déclaré en audition devant l’Assemblée nationale en 2023 que la mission de l’audiovisuel public était de « représenter la France telle qu’on voudrait qu’elle soit », et non comme elle est.
Ce rapport illustre parfaitement toute la légèreté avec laquelle les institutions étatiques gèrent les deniers du contribuable, ainsi que son détachement de toute réalité économique et politique, bien loin de la qualité et de la discipline que l’on est en droit d’attendre d’une mission de service public.
Une dépendance aux deniers publics du contribuable qui interroge aussi fortement lorsque l’on observe le traitement des chaînes publiques de la crise budgétaire actuelle, poussant le narratif bien facile du « taxez les riches » plutôt que celui plus réaliste de « coupez dans la dépense publique excessive ».
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Un mélange des genres qui s’est également illustré par la nouvelle recrue du JT de 20h de France 2, Léa Salamé, pourtant compagne du leader NFP Raphaël Glucksmann. Cette dernière a consacré son 20 heures à plusieurs reprises à la taxe Zucman poussée par le groupe d’extrême gauche auquel son compagnon adhère, allant même jusqu’à déformer sur X (anciennement Twitter) les propos du co-fondateur de Mistral AI, Arthur Mensch, le faisant passer pour « favorable » à la mesure lorsqu’il disait précisément qu’il ne pourrait pas s’acquitter de cette taxe.
À l’heure du ras-le-bol fiscal et de la colère sociale qui monte, on espère que ce rapport ne restera pas une fois de plus sans conséquences, ou bien nous courrons le risque bien réel de troubles politiques majeurs dans les années à venir. L’histoire de notre pays est pleine d’exemples et d’enseignements en la matière, dont les serviteurs de l’État feraient bien de s’inspirer…