« Plus que jamais, je sens que la race humaine est une. Au-delà des différences de couleurs, de langues, de cultures et de possibilités, les sentiments et les réactions de chacun sont identiques. » Sebastião Salgado, photographe né au Brésil, progressiste engagé, montreur d’humanité aux quatre coins du globe, représentant spécial de l’Unicef, nous a quittés le 23 mai 2025.

Quelques semaines plus tôt, l’Opéra national de Bordeaux proposait une soirée consacrée à ses œuvres, des images en noir et blanc que soulignaient les mille couleurs de l’orchestre, dans une séquence « Brasiliade » mémorable. L’Amazonie révélait alors ses trésors et ses drames à la fois dans l’œil d’un homme généreux, engagé pour la sauvegarde de notre environnement, et dans la musique de son compatriote, Heitor Villa-Lobos.

Espace citoyen

Alors, quand la triste nouvelle est tombée, l’Opéra de Bordeaux a souhaité rendre hommage à Sebastião Salgado une nouvelle fois, en remettant à l’honneur son travail, qui résonne avec l’engagement de son directeur, Emmanuel Hondré, de faire de l’institution un espace citoyen au service du plus grand nombre. Cette volonté d’ouverture et de générosité affichée à de nombreuses reprises dans les colonnes de « Sud Ouest » trouve un écho dans le travail de Sebastião Salgado. L’engagement écologique aussi.

Pour l’accompagner dans ce travail quasi pictural, l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine fait appel à une figure célèbre du monde classique : le chef Jean-Claude Casadesus

En 2018, aux Rencontres de la photographie d’Arles, le photographe présentait son exposition « Aqua Mater », consacrée à l’eau, élément fondamental de l’équilibre et de la vie sur Terre. Reprise de nombreuses fois, notamment en 2022 sur le parvis de la Défense à Paris, cette série d’images issues des voyages de Salgado va trouver une résonance nouvelle dans les soirées hommage des 30 et 31 octobre, à l’auditorium de Bordeaux.

Debussy et Beethoven

Selon le même procédé que le concert « Amazonia », les images seront projetées sur un écran derrière la scène, pendant que l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine jouera une œuvre de circonstance : « La Mer », de Claude Debussy. Avec ses flux et ses reflux, ses ondoiements et ses couleurs, la musique de Debussy est une évocation, elle aussi très imagée, de l’eau. Une partition d’une grande fluidité qui s’exécute en un souffle, dans une sorte d’impressionnisme sonore dont seule la musique française a le secret.

De la même manière que le noir et blanc de Salgado souligne les contrastes et fait exister la lumière, Debussy transforme le concret en une image poétique à la fragilité assumée. Preuve, une fois de plus, que la musique classique a encore tellement de choses à dire dans notre monde moderne.

Pour l’accompagner dans ce travail quasi pictural, l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine fait appel à une figure célèbre du monde classique : Jean-Claude Casadesus. Au pupitre, le chef français aura également à diriger la « Symphonie n°7 » de Beethoven et son immense crescendo au deuxième mouvement. Un thème poignant qui se murmure dans la pénombre d’abord, avant de trouver sa place au soleil, dans une douce lumière. Franchement, pouvait-on trouver mieux pour rendre hommage à la vie de Sebastião Salgado ?