La scène est pour le moins saugrenue, jeudi 25 septembre, à Pertuis (Vaucluse), pourtant journée nationale d’hommage aux Harkis. À 14 h 30, une poignée de membres et soutiens de l’association Français Musulmans Rapatriés de Pertuis se sont vu interdire l’accès groupé à la stèle pour commémorer, le temps d’une minute de silence, les soldats musulmans de l’armée française pendant la guerre d’Algérie (1954-1962).

À défaut du mémorial communal, les participants, fils, petit-fils de Harkis et un ancien combattant, ont fait face aux policiers municipaux et aux gendarmes missionnés pour faire respecter l’arrêté municipal, tombé quelques heures plus tôt. La cérémonie officielle, elle, était prévue quelques heures plus tard, en présence du maire de Pertuis, Roger Pellenc, et du sous-préfet d’Apt, sur le site de l’ancien camp Harkis du Clos des Jardins.

Accusée de « militantisme islamiste »

« C’est la première fois qu’on voit ça », déplore Cherif Lounès, membre de l’association, contestant fermement la méthode de la mairie pour interdire cette « manifestation » annoncée, il y a quelques jours, sur les réseaux sociaux.

Le 22 septembre, la municipalité a informé par voie de communiqué de sa décision d’interdire la manifestation, car celle-ci n’était « pas déclarée ». « L’association mêle, dans ses prises de position, un militantisme islamiste à des thématiques mémorielles, ce qui constitue une instrumentalisation de l’Histoire inacceptable », mentionne également le texte de la Ville. Une accusation réfutée par l’association qui envisage de porter plainte pour « diffamation ».

Plus surprenant, la mairie « déplore » dans son communiqué l’utilisation des symboles républicains comme le drapeau français, « sans autorisation ». Deux arguments qui n’apparaissent pas dans l’arrêté municipal publié ce jeudi.

Une décision sur fond de litige ?

Pour expliquer cette interdiction, l’arrêté mentionne, entre autres, « le risque de troubles à l’ordre public », et « des désaccords persistants depuis plusieurs mois entre différentes associations locales à propos de l’usage d’un local associatif », dont l’affaire fait désormais l’objet d’une procédure judiciaire en cours.

Mais pour l’association, cette décision serait surtout en réponse à « la convention précaire », c’est-à-dire au bail que l’association n’a pas souhaité signer en 2023. Selon une proche de l’association présente, l’affaire semble surtout « politique » et sonne pour elle comme une réponse à une « islamophobie ambiante ».

Très émue, elle est allée se recueillir seule devant le mémorial sur lequel est inscrit « en hommage et reconnaissance au courage des Harkis victimes de la Guerre d’Algérie, désarmés et abandonnés à leur sort par l’exécutif ».

Contacté par La Provence, le maire, Roger Pellenc, n’a pas répondu aux sollicitations.