Les habitants du projet « Gaïa », installés il y a un an dans le quartier Flaubert de Rouen en construction, ne s’inquiètent pas de leur proximité avec l’usine Lubrizol. Six ans jour pour jour après l’incendie industriel, le promoteur est prêt en cas de nouvelle catastrophe.

Cela fait six ans ce vendredi 26 septembre 2025 que les incendies des entrepôts de l’usine Lubrizol de Rouen – classée Seveso seuil haut – et de Normandie Logistique se sont déclenchés. Environ 9.500 tonnes de produits chimiques ont brulé, plus de 200 pompiers ont été mobilisés, et un énorme nuage de fumée noire de 22 km de long et 6 km de large s’est formé au-dessus de la ville.

Six ans après, la vie a repris son cours, y compris dans le nouveau quartier Flaubert. Depuis l’été 2024, la majorité des 104 logements du projet « Gaïa », construits par le promoteur Odyssée Immobilier, sont habités. Ce sont deux résidences de 250 habitants et 13.000m² de commerces ou bureaux situés à environ un kilomètre de l’usine Lubrizol, juste à côté du pont Flaubert.

« Une acceptabilité du risque »

C’est là que vit Laura, aujourd’hui étudiante en école d’infirmière. Elle avait douze ans au moment de la catastrophe, mais n’y a pas pensé en louant son appartement. « Ce sont les aléas de la vie. On espère que ça n’arrivera pas, mais ça ne m’a pas inquiétée. » Même chose pour une voisine, Axelle, âgée de 30 ans : « Je ne me suis même pas posée la question et je n’ai pas spécialement pensé à ça. Je ne pense pas que mon conjoint non plus. On sait que ce n’est pas très loin, mais ce n’est pas quelque chose qui nous a freinés. »

D'ici la fin du chantier en 2032, la Métropole prévoit environ 4.000 logements et jusqu'à 20.000 usagers du quartier Flaubert de Rouen. D’ici la fin du chantier en 2032, la Métropole prévoit environ 4.000 logements et jusqu’à 20.000 usagers du quartier Flaubert de Rouen. © Radio France – Juliette Bourgault

Salim et sa compagne sortent eux d’une visite d’appartement dans cette partie du quartier Flaubert. Le risque industriel dans la Métropole rouennaise ne fait pas partie de leur liste de critères. « C’est un emplacement plutôt accessible et plutôt proche de notre travail. Donc, il y a un risque et il y a une acceptabilité des risques. On est dans la zone acceptable. »

« On pensait que les habitants en feraient un frein »

Odyssée Immobilier a déposé le permis de construire seulement trois mois après ce fameux 26 septembre 2019, raconte Lucie Carton, directrice opérationnelle de l’entreprise. « On a paniqué, on s’est dit que ça allait être compliqué. Évidemment, on n’abordait pas le sujet en premier lieu. On pensait vraiment que les habitants en feraient un frein, mais au bout de huit à dix mois, les gens ont carrément arrêté d’en parler. » Le projet a quand même dû être adapté après l’incendie.

Le promoteur a en effet formé un gardien d’immeubles qui sera logé dans le quartier à partir de cet hiver, en même temps que la fin de la mise en service de tous les bureaux. « Ce gardien a une formation spécifique pour les incidents industriels. Il coupe les ventilations si nécessaire. On forme aussi un référent par immeuble qui va savoir orienter les gens, les zones d’attente sécurisées en cas d’incident industriel. Tous les SAS se déverrouillent pour que les passants totalement extérieurs à notre opération puissent venir se mettre en sécurité dans le hall. » Il existe des précautions pour tout le quartier Flaubert, qui doit accueillir jusqu’à 20.000 usagers quand les travaux seront terminés d’ici 2032, et environ 4.000 logements.

« Pas plus de risques » à proximité de l’usine

Fatima El Khili, adjointe au maire dédiée à l’urbanisme et au patrimoine bâti, est également conseillère métropolitaine en charge du quartier Flaubert : « Des choses ont été intégrées à la conception même des immeubles et des lieux pour pouvoir éventuellement se confiner. Par exemple, les VMC doivent s’éteindre automatiquement. Sachant que ce n’est pas parce que l’on est à proximité de l’usine qu’il y a plus de risque que lorsque l’on habite juste en face, de l’autre côté de la Seine, sur la rive droite. » À ce jour, 60% du quartier Flaubert a fini d’être construit, selon Fatima El Khili.