Plus de trente ans après les « années Sida », le VIH reste toujours une menace mondiale : en 2024, 1,3 million de nouvelles infections ont été enregistrées, malgré une baisse de 40 % depuis 2010, selon les données d’Onusida. Mais dans un contexte toujours tendu, un nouvel espoir accessible voit le jour pour les personnes atteintes du VIH : le générique du lenacapavir, un traitement préventif apparaît comme une arme décisive. Ces génériques devraient être disponibles pour 40 dollars par an dans plus d’une centaine de pays dès 2027, ont annoncé Unitaid et la fondation américaine Gates. 20 Minutes fait le point sur ce nouveau traitement générique qui pourrait révolutionner la prévention du Sida.

Comment lenacapavir marche ?

Le lenacapavir cible la capside du VIH, agit comme un bouclier contre le VIH. Il s’attaque à la capside, la « coquille » qui protège le virus. À faible dose (0,5 nM), il empêche le virus d’entrer dans le noyau des cellules pour s’y multiplier. À doses plus fortes (5-50 nM), il bloque la fabrication de son ADN et d’autres étapes clés de sa reproduction. Plus généralement, il stoppe le virus à plusieurs niveaux, l’empêchant de se propager dans le corps.

Les essais cliniques, comme Purpose 1, montrent une efficacité de 100 % chez les femmes, 99,9 % chez divers genres ayant des relations avec des hommes et 96 % pour les hommes, selon Science. « Le lenacapavir est le premier médicament à longue durée d’action pour la prophylaxie préexposition (PrEP) ne nécessitant que deux injections par an », soulignent Unitaid et la Fondation Gates. Cette administration semestrielle, contre une pilule quotidienne pour les PrEP orales comme le Truvada, réduit les risques d’oubli et améliore l’adhésion, notamment pour les populations vulnérables.

Pourquoi le prix est révolutionnaire ?

Actuellement, le traitement original Yeztugo commercialisé par la biotech américaine Gilead Sciences coûte 28.000 dollars par an aux États-Unis, un frein pour les pays à faible revenu. « C’est une percée révolutionnaire et essentielle pour élargir la prévention contre le VIH », déclare Carmen Perez Casas, responsable stratégique VIH chez Unitaid, à l’AFP. Pour démocratiser l’accès, Unitaid et la Fondation Gates ont conclu des accords avec des laboratoires indiens. « Des génériques d’un traitement préventif contre le VIH, le lenacapavir injectable, devraient être disponibles pour 40 dollars par an dans plus d’une centaine de pays dès 2027 », annoncent-ils. Unitaid s’associe à Dr Reddy’s, avec la Clinton Health Access Initiative et Wits RHI, pour fournir 120 pays à revenu faible ou intermédiaire. « Le produit sera initialement fabriqué en Inde […] mais nous œuvrons pour régionaliser la production à l’avenir », précise Perez Casas. La Fondation Gates collabore avec Hetero Labs. En attendant, un accord Fonds mondial-Gilead, soutenu par les États-Unis, livrera les premières doses originales en Afrique d’ici fin 2025.

Ce traitement comporte-t-il des risques ?

Le lenacapavir est bien toléré, avec des effets secondaires mineurs : douleurs ou gonflements au site d’injection et nausées occasionnelles. Des cas rares d’élévation des enzymes hépatiques ou de syndrome de reconstitution immunitaire (IRIS) ont été signalés chez les patients traités, mais pour la PrEP, les essais montrent une sécurité comparable à un placebo, selon The Centers for disease control and prevention. Ce profil rassurant en fait un candidat idéal pour une prévention à grande échelle, notamment dans des contextes où le suivi médical est limité.

Ce générique peut-il éradiquer l’épidémie ?

« Avec ce produit, nous pouvons mettre fin au VIH, […] c’est à notre portée », affirme Perez Casas. « Les avancées scientifiques comme le lenacapavir peuvent nous aider à mettre fin à l’épidémie de VIH, à condition qu’elles soient accessibles aux personnes qui en bénéficient le plus », ajoute Trevor Mundel, président de la santé mondiale de la Fondation Gates. Élu « Breakthrough of the Year 2024 » par Science, le lenacapavir pourrait atteindre l’objectif d’Onusida : zéro infection d’ici 2030. Des projets pilotes au Brésil et en Afrique du Sud, menés par Unitaid, évaluent son intégration dans les systèmes de santé, avec un prix aligné sur les PrEP orales.

Quels sont les défis logistiques de son déploiement ?

Le succès du lenacapavir dépend de sa distribution rapide. Les injections nécessitent un stockage à température contrôlée, un défi dans certaines régions, notamment en Afrique et Asie du Sud. Pour anticiper la logistique, Gilead a accordé en octobre 2024 des licences volontaires à six fabricants pour 120 pays, couvrant l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud-Est et l’Amérique latine. Les initiatives d’Unitaid et du Fonds mondial visent à surmonter ces obstacles, avec un déploiement prévu dès fin 2025 pour les doses originales et 2027 pour les génériques.