« Cette jeune femme délicate (…) n’est heureuse que lorsqu’elle travaille avec un bloc de pierre de deux tonnes. » Lorsque René Lacôte écrit ces quelques mots en 1950, Alina Szapocznikow (1926–1973) n’a pas encore 25 ans. Mais elle travaille avec ardeur dans un atelier de taille de pierre proche du cimetière du Père-Lachaise, loue elle-même un espace pour ses propres œuvres, et expose pour la première fois dans un accrochage collectif à la grande synagogue de Paris. Elle est toute petite, amusante, rieuse, amoureuse d’un étudiant, et ses grands yeux clairs semblent dévorer le monde…

Pourtant, Alina Szapocznikow revient de loin. Arrivée à Paris en 1947, elle n’aime pas parler de ce qui lui est arrivé jusqu’alors, chassant pudiquement les questions d’un coup de tête, comme devant la caméra du documentariste Jean-Marie Drot en 1957. Juive de naissance mais pas pratiquante, elle a été enfermée dès 1940 avec sa mère et son frère dans un ghetto polonais puis un autre, avant d’être à nouveau transportée comme un ballot de paille dans les camps de concentration d’Auschwitz et de Bergen-Belsen.

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