Le 15 mars, il fêtera ses 81 ans. Jean-François Spinelli sait déjà ce qu’il veut comme cadeau. Au soir du premier tour des élections municipales, le maire de Castagniers espère ravir un neuvième mandat. Cet enfant du village est installé depuis 1977 dans le fauteuil de premier magistrat de cette moyenne commune de la vallée du Var.
Lors de sa première élection il avait dû ferrailler contre deux autres candidats. « J’étais passé à deux voix près », se souvient-il. Les sept fois suivantes il n’y a même pas eu de second tour. En sera-t-il de même le 15 mars prochain ?
Trop vieux ?
Cette fois Jean-François Spinelli pourrait bien avoir une opposition. Un de ses administrés a semble-t-il l’intention de l’obliger à prendre sa retraite politique. Même si le concurrent ne s’est pas encore déclaré officiellement, cela n’a pas échappé au maire. D’autant moins que son futur adversaire n’est autre qu’un de ses conseillers municipaux. « Je l’ai pris avec moi pour les deux dernières élections, souffle Jean-François Spinelli. Il trouve que je suis trop vieux. Il a décidé de se présenter. Il a raison… Mais encore faut-il y arriver. »
« Trop vieux ? » Qu’en pense-t-il, lui-même ? À 80 ans, l’édile avoue avoir hésité. Mais après avoir dédié sa vie à son village, celui de son père, de son grand-père et de son arrière-grand-père avant lui, il ne sait pas trop ce qu’il pourrait « faire d’autre » du temps qu’il lui reste. « À l’école déjà c’est moi qui m’occupais de la coopérative. À 14 ans je suis allé voir le maire de l’époque pour lui dire que je voulais bien reprendre en main le comité des fêtes… mais qu’il allait falloir virer tous les vieux », ironise-t-il.
« Je crois que j’ai un peu une âme de chef », conclut celui qui a repris la scierie familiale tout en occupant la fonction de maire. Il est vrai qu’à l’époque les choses étaient « plus simples. On avait qu’une seule administration comme interlocuteur : la préfecture. Maintenant, il y a la Métropole, le Département, la Région… L’Europe », soupire-t-il en balayant du regard son bureau couvert de dossiers.
Entre Ciotti et Estrosi c’est l’amitié qui tranche
« Toute cette paperasse », c’est ce qui l’a fait le plus hésiter. « Avec l’informatique on était censé ne plus avoir de papier… En réalité il y en a quatre fois plus qu’avant », déplore ce maire élu pour la première fois à une époque où le Web n’existait pas. Pas plus que le Rubik’s cube ou le séquençage du génome humain. Il n’empêche que son ADN il le connaît : c’est Castagniers. Avant tout le reste et surtout ce millefeuille de collectivités locales avec lequel il doit composer. Tant bien que mal.
Jean-François Spinelli a annoncé il y a quelques jours à ses administrés qu’il rempilait, à l’occasion de la Saint-Michel, le festin du village. Il avait invité Christian Estrosi. « Il m’a écrit pour me dire qu’il ne serait ni présent ni représenté », déplore l’élu qui avoue ne pas toujours apprécier « les méthodes » du président de la Métropole à laquelle il appartient. Il fait partie des dix-huit « frondeurs » qui avaient refusé de voter les yeux fermés la charte de confiance qu’Estrosi exigeait d’eux l’an dernier.
Et Éric Ciotti ? Il est « pour ». Avant tout parce que « c’est un ami ». « Il pourrait adhérer au parti communiste que je serai toujours pour lui », tranche l’octogénaire attaché à certaines valeurs. Comme à la défense de la quiétude de ses administrés dont il s’est employé quarante-neuf ans durant à préserver le cadre de vie en bannissant tout programme immobilier démesuré. « J’aimerais bien atteindre les cinquante années consécutives de mandat », concède le maire candidat qui brigue dès lors une neuvième élection et le titre de « doyen des élus des Alpes-Maritimes ». Quitte à passer la main en cours de route. Il ne l’exclut pas, même s’il a encore des projets à mener.
Si c’est son fils, conseiller municipal, qui prend la relève, ça ne lui déplairait sans doute pas. Jean-François Spinelli a bien succédé à son père, adjoint au maire durant trente ans avant son élection, de 1947 à 1977. L’ADN encore…