Le 1er août, la Suisse s’est vue imposer des droits de douane de 39% par Washington, un petit séisme pour l’économie helvétique.

L’inquiétude règne dans les vallées helvétiques. Des droits de douane aux États-Unis sur les produits pharmaceutiques pourraient conduire à une récession en Suisse, mais leur impact reste encore difficile à calculer en attendant d’en savoir plus sur les intentions de Donald Trump, selon un professeur d’économie zurichois. Vendredi, le président des États-Unis a dit vouloir appliquer des droits de douane «de 100%» aux produits pharmaceutiques «de marque ou brevetés» à compter du 1er octobre, «sauf si une entreprise CONSTRUIT son usine pharmaceutique en Amérique», a-t-il écrit dans un message publié sur sa plateforme Truth Social.

«De nombreux détails ne sont pas clairs», a estimé Hans Gersbach, professeur d’économie et codirecteur du Centre de recherches conjoncturelles de l’École Polytechnique fédérale de Zurich, lors d’un entretien avec l’AFP. «Si une large proportion des exportations vers les États-Unis dans le secteur de la pharmacie devait subir des droits de douane, et rester en place pour une longue période, il y aurait un risque clair de récession en Suisse», estime-t-il.


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Mais le champ d’application de ces droits de douane reste pour l’instant «particulièrement vague», insiste-t-il, et il va donc falloir attendre de savoir exactement quelles entreprises et quels produits pharmaceutiques seront touchés pour évaluer pleinement les répercussions pour l’économie helvétique, selon lui. Ce centre de recherches lié à l’Université de Zurich a mis au point un modèle qui permet de calculer rapidement l’impact d’un choc sur les échanges commerciaux, comme des droits de douane.

Le 1er août, lorsque la Suisse s’est vue imposer des droits de douane de 39% par Washington, ce centre de recherches avait donc pu réaliser en quelques heures une première évaluation, estimant alors l’impact sur le produit intérieur brut (PIB) de la Suisse aux alentours de 0,3% et 0,6%. Il s’agissait «d’un gros choc» pour l’économie helvétique, mais d’après ce modèle, une récession semblait pouvoir «être évitée», explique M. Gersbach.

7 à 8% du PIB

Car ces 39% touchent surtout l’horlogerie, les machines-outils et instruments de précision (comme les instruments de mesure) ou encore les produits alimentaires. Mais des droits de douane sur les médicaments, jusqu’alors exemptés, changeraient la donne compte tenu du poids de la pharmacie dans l’économie suisse. Le secteur de la chimie et de la pharmacie contribue à «environ 7 à 8% du PIB» de la Suisse, a quantifié M. Gersbach, et est le secteur qui a le plus contribué à la croissance des exportations au cours des dernières décennies, souligne-t-il.

En avril, Roche et Novartis ont néanmoins annoncé de colossaux investissements dans de nouvelles usines aux États-Unis, où les deux groupes disposent déjà d’importants centres de production. Vendredi, les cours de ces deux poids lourds du secteur en Suisse avaient d’ailleurs peu réagi en Bourse. «Les grandes entreprises comme Roche et Novartis pourraient être exemptées, mais de nombreuses entreprises plus petites vont être touchées», prévient M. Gersbach.

Face aux pressions pour faire baisser les prix des médicaments aux États-Unis, Novartis a annoncé lundi une nouvelle initiative avec le lancement début novembre d’une plateforme où son traitement appelé Cosentyx (utilisé contre plusieurs maladies inflammatoires) sera vendu directement aux patients aux États-Unis, avec un important rabais.