Rien ne se perd, tout se transforme. Sur ce terrain enclavé entre l’A5 et la gare de péage de Saint-Germain-Laxis, au nord de Melun, la société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR), propriétaire du site, a décidé d’agir. Dans le cadre de sa stratégie bas carbone, elle a converti ce « délaissé autoroutier »… en centrale photovoltaïque.
Pour mener à bien ce projet, elle a choisi TotalEnergies et son partenaire Altergie, société indépendante engagée dans le développement et l’exploitation de centrales solaires en France. Après deux dépôts de permis de construire et une course d’obstacles administratifs, le projet prend enfin forme au bout de huit ans !
Situé en léger contrebas de la D 1036 (anciennement N36), le chantier commencé en février 2025 arrive à sa fin. Après l’installation cet été de structures métalliques (163 tonnes d’acier !), 8 600 modules photovoltaïques ont été posés en cinq semaines. Reste à effectuer les raccordements électriques par Eiffage Réseaux Électricité. La mise en service est prévue en novembre prochain.
Exposés plein sud, ces panneaux fabriqués en Chine produiront 5,8 gigawatts heure par an, soit l’équivalent de la consommation électrique de 3 700 habitants (hors chauffage). Ils devraient éviter le rejet de 182 tonnes de CO2.
Total réalise 10 % de la production photovoltaïque francilienne
« 5 mégawatts, c’est environ 1 % de la puissance photovoltaïque installée Île-de-France. Mais aucun projet n’est négligeable. On est très fiers et contents », se réjouit Laurent Tricot, directeur régional délégué Île-de-France chez TotalEnergies. Selon lui, « si on additionne les 25 mégawatts crête (MWc) produits par son groupe à Grandpuits en Seine-et-Marne (46 000 panneaux solaires sur 12 ha), les 23 MWc de Gargenville dans les Yvelines et les 5MWc d’ici, on arrive à plus de 10 % de la production photovoltaïque en Île-de-France ».
Côté sécurité, un bardage anti-éblouissement a été installé entre l’autoroute et les panneaux afin d’éviter tout scintillement du soleil dans la vue des automobilistes qui empruntent l’A5. La nature n’est pas oubliée. L’écopâturage est prévu pour que des moutons assurent la tonte. La petite faune revient aussi, notamment beaucoup de lapins, nous dit-on.
Saint-Germain-Laxis, 23 septembre 2025. Après la pose de 8600 modules photovoltaïques au sol, le chantier se termine avec la phase de raccordement électrique en vue d’une mise en service en novembre prochain.
À Saint-Germain-Laxis, village d’un peu plus de 700 habitants, la municipalité soutient le projet depuis le début. « Ce terrain était une dent creuse. C’est bien d’en faire quelque chose et un beau projet », salue Didier Sontre, adjoint au maire. La commune devrait percevoir la taxe d’aménagement et la taxe foncière, mais aussi une partie de l’Imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (IFER).
Une région qui produit peu… mais consomme beaucoup
Un progrès pour l’Île-de-France qui produit peu d’énergies (gaz, électricité, pétrole, bois), mais dont les 12 millions d’habitants en consomment beaucoup. « Le plan solaire régional prévoyait 6 gigawatts (ou 6000 mégawatts) en 2030, mais nous en sommes à environ 6 % de l’objectif », alerte Jean-Charles Lavigne Delville, président d’Altergie.
Sa société a déjà mené deux réalisations sur des délaissés autoroutiers : l’une de 11 000 panneaux photovoltaïques en Savoie en bordure de l’A41 pour le compte d’une filiale d’APRR, l’autre en Saône-et-Loire avec 8 570 modules solaires le long de l’A6.
Directeur du département énergie climat à l’Institut Paris-région, Thomas Hemmerdinger salue cette initiative. « À notre connaissance c’est le seul délaissement autoroutier ainsi aménagé dans la région. Mais avec la loi APER de 2023 relative à l’accélération de production d’énergies renouvelables, chaque commune doit définir du foncier où privilégier cela. » Espoir donc.
« On ne fera jamais comme les Saoudiens qui couvrent leur désert »
Il confirme une certaine rareté du foncier disponible en Île-de-France. « Il est trop cher. On ne fera jamais comme les Saoudiens qui couvrent leur désert de centrales solaires. Mais on a de la place pour les toitures et les ombrières sur les parkings. Un gisement énorme, mais plus diffus que les centrales solaires au sol où il y a davantage d’hectares couverts et donc de puissance produite. »
Quid des centrales photovoltaïques sur les terres agricoles ? Un décret de la loi APER les autorise. C’est l’agrivoltaïque. Mais plusieurs conditions sont posées. L’agriculture doit rester l’activité principale de la parcelle, générer un rendement significatif et un revenu durable. L’installation de panneaux solaires verticaux doit rendre des services (améliorer la qualité du sol, limiter les effets néfastes du changement climatiques, etc). TotalEnergies l’expérimente à Valpuiseaux, en Essonne.