Le procès d’Erik Tégner, directeur de la publication d’extrême droite Frontières, n’a finalement pas eu lieu. Deux avocates rennaises, soutenues par le barreau de Rennes et la conférence des bâtonniers de France, attaquaient le magazine en diffamation pour avoir été nommément citées dans le numéro intitulé « Invasion migratoire, les coupables », publié en janvier 2025. Sur les réseaux sociaux, une vague de haine et d’intimidation avait immédiatement déferlé sur les professionnels spécialisés dans les droits des étrangers ainsi fichés par Frontières.
Depuis, certains de ces avocats ont déposé des plaintes pour « actes d’intimidations », « risque causé à autrui » ou ont entamé des procédures en diffamation. « Comme au tribunal de Bobigny, ainsi qu’à Lyon et à Marseille, où un délibéré doit être rendu cette semaine », informe Me Antoine Hellio, conseil des deux professionnelles rennaises. À Saint-Brieuc, où l’affaire était audiencée ce mardi 30 septembre 2025, les débats ont tourné court ; ils n’ont pour ainsi dire jamais commencé. L’avocat d’Erik Tégner, Me Frédéric Pichon, a soulevé deux nullités qui ont fait couler toute la procédure.
Des propos jugés diffamatoires… Mais pas assez précisément visés
Ces deux vices concernaient la citation à comparaître adressée directement au directeur de la publication de Frontières. Les avocats rennais n’ont notamment pas été assez « précis » dans le listing des propos jugés diffamatoires. « Ces incidents auraient pu être joints au fond, ce qui aurait permis que ce débat très important puisse se tenir », regrettaient, à la sortie du tribunal, les avocats qui avaient fait le déplacement pour soutenir leurs consœurs. Le conseil d’Erik Tégner, lui, jubilait : « Je suis spécialisé en droit de la presse depuis 27 ans, c’était évident que cela se terminerait comme ça. »
Dans sa publication, Frontières présentait ainsi les avocats spécialisés en droit des étrangers comme les rouages d’un prétendu « système » qui favoriserait l’immigration clandestine. Éminemment politique, l’examen de ce dossier devait faire valoir la parole de ces avocates qui, de leur côté, dénoncent des « accusations graves portant atteinte à leur honneur » et qui peuvent s’avérer dangereuses en ce qu’elles alimentent un climat politique déjà tendu concernant les questions migratoires. Le magazine dressait même, dans ce numéro, un « podium » des avocats « défenseurs des clandestins ».
Le conseil des plaignantes attendait de les consulter pour étudier la possibilité de faire appel de la décision du tribunal.