PARIS – Ça balance pas mal à Paris. Elle-même ciblée pour d’importantes dépenses en note de frais, la maire de Paris Anne Hidalgo a riposté à sa manière ce jeudi 2 octobre. Sa méthode ? Rendre accessible, « dans un souci constant de transparence et de responsabilité », les « frais engagés par les maires d’arrondissement » de la capitale. De quoi tendre les élus de la Ville de Paris à l’approche du scrutin municipal de 2026.

Ces révélations permises par la maire parisienne interviennent dans un contexte de défiance autour de ses propres frais de représentation, récemment épluchés par Mediapart. « Cher et chère collègue, afin de répondre aux sollicitations des médias, la maire de Paris a souhaité, dans un souci de transparence, permettre l’accès des journalistes aux frais engagés par les maires d’arrondissement (…). Je souhaitais vous en informer », pouvait-on ainsi lire dans un mail envoyé par la Ville de Paris que rapporte Le Parisien ce jeudi.

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Après Anne Hidalgo, c’est Éric Lejoindre, fidèle de l’édile et lui-même maire PS du XVIIIe arrondissement de la capitale qui avait vu ses justificatifs de frais scrutés à la loupe après leur publication. Pour contre-attaquer, Anne Hidalgo a donc tout déballé. Et le journal Libération s’est donc empressé d’éplucher toutes ces dépenses de représentation des maires d’arrondissement.

Dati, la plus économe des maires

Dans le détail, ces justifications et factures correspondent aux documents remis chaque année par les maires à l’administration municipale. Et concernent la période s’étalant du 11 juillet 2020 jusqu’à la fin de l’année 2024. Et si la maire de Paris était attaquée, notamment pour l’achat de robe, elle ne devrait plus être la seule. Ainsi, Libération cite parmi les justificatifs apportés par les élus : « Repas dans les grandes tables parisiennes, apéritifs au champagne, dépenses en chocolats, mais aussi caisses de champagne, menus enfant, bougies antiodeurs de tabac et livres ». Sans oublier des « sommes folles » dans l’achat de vêtements durant ces quatre années.

Des frais autorisés, notamment ceux liés à l’apparence (habits, coiffure, pressing, soins de beauté) ou à la représentation (repas, dîners, réceptions et restaurants), sans oublier les « cadeaux protocolaires » comme l’explique Libé. Pour autant, ces frais sont limités à une enveloppe annuelle de 19 720 euros pour la maire de Paris et à 11 092 euros pour les maires d’arrondissement. Et avec comme conditions que les frais engagés soient « en relation directe avec l’exercice du mandat » et que les dépenses payées aient « un caractère raisonnable ». Ce qui n’est visiblement pas toujours le cas.

À ce titre, le journal cite les 35 779,65 euros de frais de vêtements en quatre ans et demi de la maire LR du VIIIe arrondissement, Jeanne d’Hauteserre. Ou les vingt rendez-vous chez le coiffeur de Florence Berthout, maire Horizons du Ve arrondissement. La maire du VIIIe répond que « ces frais font partie de la représentation qui est la nôtre », mais juge désormais nécessaire de les supprimer. « Dans le privé, on s’habille avec son propre argent. »

Autre exemple plus surprenant, les notes de Rachida Dati (maire LR du VIIe), qualifiée d’édile la plus économe. Libération relève à ce titre seulement deux repas au deuxième semestre 2020 et un dernier en octobre 2021. Ses seules dépenses au frais du contribuable de la capitale.

Instauration d’un « climat malsain »

La liste est encore très longue : on y apprend par exemple que le maire du XV, Philippe Goujon dépense en moyenne « 150 euros par bouche » au restaurant. Qu’Emmanuelle Pierre-Marie, maire écolo du XIIe arrondissement a demandé des remboursements pour une bouteille isotherme et « quatre bols à prénom » à Cherbourg. Ce qui est certes bien moins onéreux que les 745 euros en chaussures féminines que le maire LR du VIe, Jean-Pierre Lecoq, demande à se faire rembourser durant ses vacances en juin 2023. Ou les 65 euros de lampes antiodeurs de tabac achetées par la femme de Francis Szpiner, édile LR du XVIe, assez difficiles à justifier en frais de représentation.

Les révélations sont particulièrement nombreuses et agitent déjà la municipalité parisienne. Auprès du Parisien, certains s’inquiètent déjà des retombés après cette petite bombe lâchée par Anne Hidalgo, qui avait été particulièrement critiquée par l’opposition pour ses propres frais.

« Quand on va regarder les frais des autres, ceux de droite qui nous critiquent, on aura les mêmes remarques que pour Éric Lejoindre », estime un maire proche d’Anne Hidalgo. Mais globalement, tous regrettent l’instauration d’« un climat malsain à quelques mois des municipales, que cela génère une ambiance épouvantable ». « Un déballage qui nuira à tous », lâche également une maire d’opposition citée par nos confrères. Difficile de lui donner tort.

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