Il y a eu une dictature militaire au Brésil, entre 1964 et 1985. Elle a ses nostalgiques. Dans un hôtel de Brasilia, au début de cette époque pas si lointaine, un homme rencontre un gradé et enregistre, en douce, leur conversation. Il n’a pourtant rien d’un justicier. Il est là pour s’enrichir grâce au militaire qui touchera une commission. Alors, pourquoi enregistrer ? La vie, comme les bons livres, offre plus de contradictions que de réponses et plus de mystères que de certitudes.

L’enfant de cet homme, alors âgé de 7 ans, est le personnage central des Remplaçants, nouveau roman du Brésilien Bernardo Carvalho. Plus tard, il écoute l’enregistrement. Le gradé fait au père une proposition lucrative que celui-ci ne va pas refuser («Parce que son père vendait son âme, si tant est qu’il en ait une»). On est entre «pionniers». Ce que le militaire dit, et comment il le dit, annonce la spoliation des terres indiennes, leur déforestation, et la bonne et brutale conscience du fascisme : «Nous avons un plan. Et nous n’allons pas gâcher cette chance. Notre rêve est plus grand que tout ce qu’on a déjà imaginé pour ce pays. Nous n’allons pa