Ils décrivent une nuit longue, inconfortable et pleine d’incompréhension. Ce vendredi 3 octobre 2025, une poignée de personnes qui faisaient partie des 123 manifestants arrêtés jeudi 2 octobre dans l’après-midi devant le siège de l’entreprise d’armements Eurolinks, à Château-Gombert (13e) ont raconté devant le palais de Justice (6e) leurs 24 heures de garde à vue. Comme régulièrement depuis plusieurs mois, les militants, soutiens de la cause palestinienne, et qui accusent l’entreprise de fournir des composants militaires à Israël, ont voulu y manifester leur désaccord. « Nous avons à peine eu le temps d’arriver à proximité du site, en début d’après-midi, que nous avons été encerclés et nassés. On nous reproche de ne pas nous être dispersés, mais c’était strictement impossible », raconte Florence, 63 ans, une des coordinatrices à terre de la flottille pour Gaza, qui a vécu la première garde à vue de sa vie dans une cellule du commissariat du 15e arrondissement.
« Pendant cette manifestation sur la voie publique, où nous n’avons même pas eu le temps d’aller devant le portail d’Eurolinks, il n’y avait ni tension, ni violence. Notre démarche est pacifique depuis le début. Cette expérience est très révélatrice du climat de répression qui règne partout en France en ce moment », dénonce la sexagénaire épuisée. Comme la majorité des personnes arrêtées, et qui ont déjà pu être libérées, elle a reçu un avertissement pénal probatoire (nouvelle formule depuis 2022 du rappel à la loi).
« Les cellules des commissariats sont saturées »
Quatre des avocats qui défendent les militants gardés à vue ont dénoncé ce vendredi 3 octobre 2025 devant le tribunal ces « arrestations massives arbitraires », « sans motifs » qui puissent justifier de passer une nuit en cellule. « Les avertissements qui ont été distribués ne sont pas caractérisés, il n’y avait rien à leur reprocher. Ces sanctions sont du vernis pour justifier des gardes à vue qui sont illégales puisqu’elles ne reposent sur aucune infraction. Si nous avions pu aller au tribunal, nous aurions au moins pu obtenir des relaxes pour prouver leur innocence », précise Adrien Mawas, avocat au barreau de Marseille.
« Ce qui nous préoccupe, c’est la grave violation des droits fondamentaux, notamment celui de manifester, et la répression démesurée des forces de l’ordre face à des faits moindres », complète sa consœur du barreau de Marseille Mathilde Lanté. Les avocats demandent la libération immédiate des manifestants toujours en garde à vue, ce vendredi 3 octobre 2025. « Les méthodes employées sont complètement inédites, les cellules des commissariats sont saturées de Marseille à Aix, en passant par Marignane et la Ciotat. On sent la désorganisation des autorités vis-à-vis de cette démarche », estime aussi maître Julie Jarno.
Palpé, fouillé avant d’être embarqué vers le commissariat du 10e arrondissement Mathieu (le prénom a été modifié), dit ressortir de cette garde à vue avec « beaucoup de colère ». « On a voulu nous faire peur, nous intimider pour nous inciter à ne pas revenir sur le site d’Eurolinks, à arrêter de manifester pour la Palestine. Mais c’est tout l’effet inverse. On continuera d’être présents pour dénoncer le génocide à Gaza« , revendique le jeune homme.