l’essentiel
Ces dernières semaines ont été particulièrement riches en sorties de bandes dessinées, offrant une belle diversité de genres et de styles. Entre récits historiques poignants, aventures haletantes et explorations de l’imaginaire, les nouveautés ne manquent pas de captiver.
Green Witch Village
Green witch village
Le Lombard
Tabatha, jeune citadine d’aujourd’hui, se réveille dans un corps qui n’est pas le sien : celui d’une inconnue en 1959 à New-York. Son esprit, prisonnier de l’époque, doit maintenant naviguer entre la misogynie ambiante, une carrière improbable de mascotte publicitaire et des complots plus complexes. Possédée par l’esprit d’une femme du futur, elle fait face à un environnement d’une époque qui ne lui ressemble pas.
Son quotidien se transforme en enquête sur des nazis cherchant à faire exploser une bombe atomique pour déclencher la guerre mondiale. Ses colocataires l’aident à comprendre ce monde, mais Tabatha, pleine de réparties et de courage, ne laisse personne la brimer. Avec l’aide d’un fantôme venu du futur, elle résout les mystères et affronte les dangers de la Guerre froide, entre espions russes et menaces nucléaires.
Formellement, Green Witch Village est un bijou de narration, inspiré des « Sunday Pages » des années 50, et on sent que Trondheim s’est beaucoup amusé à cet exercice de style. Les cases sont découpées avec soin pour être lues de manière autonome, tout en gardant un fil narratif fluide et captivant.
L’album joue avec l’humour, l’aventure et une touche d’espionnage, dans un style graphique vintage sublimé par les couleurs de Franck Biancarelli. Une œuvre qui se déroule à toute vitesse, avec un rythme effréné et une histoire qui ne laisse pas de place à l’ennui. Un parfait mélange entre comédie et suspense, digne d’un film en technicolor, mais avec un twist féministe et audacieux.
Le Lombard, 21,95€
L’Ogre
L’ogre
Glénat
1427, France dévastée par la guerre de Cent Ans. Alors que l’Angleterre domine une grande partie du pays, un tueur impitoyable, surnommé « L’Ogre« , ravage les campagnes, tuant sans pitié femmes et enfants. Guillaume de Blamont, un capitaine loyal au roi Charles VII, reçoit la mission de l’éliminer. Mais l’Ogre rencontre Jeanne d’Arc, qui va bouleverser son destin et celui de la France.
Ce premier acte d’une saga historique explore un Moyen-Âge brutal, où la guerre, la famine et la violence sont omniprésentes. Jean Dufaux imagine une France ravagée, où l’Ogre devient une allégorie de la guerre elle-même : un monstre dévorant tout sur son passage. Jeanne d’Arc, symbole d’espoir, se trouve face à ce tueur, dans une dynamique où rédemption et violence s’entrelacent.
Le dessin de Juan Luis Landa est réaliste, fluide et dynamique, renforçant l’intensité de l’intrigue et la brutalité du contexte historique. L’album est un parfait mélange de fiction et d’Histoire, où les personnages historiques comme Jeanne d’Arc sont réinventés. Ce premier tome promet une suite palpitante, pleine de rebondissements, en approfondissant les personnages et les enjeux géopolitiques de la guerre de Cent Ans.
Une aventure haletante où l’Histoire prend une nouvelle dimension, avec des personnages brutaux et des enjeux fascinants.
Glénat, 29€
Lefranc – La régate
Lefranc La régate
Casterman
Guy Lefranc, le journaliste d’aventure, reprend du service dans une régate entre Darwin, en Australie, et Davao, aux Philippines. Lors de cette course, un typhon fait échouer Lefranc et son équipage sur une île déserte. Là, ils sont capturés par des militaires néerlandais, et leur mésaventure se transforme en un complot géopolitique.
En plein cœur de la décolonisation, l’Indonésie lutte pour son indépendance, et un consortium néerlandais veut maintenir son contrôle sur les ressources minières de l’archipel. Le jeune sultan de Walang, menacé par ces intérêts coloniaux, devient l’objet d’une manipulation politique. Lefranc et son équipe doivent naviguer dans cet enchevêtrement de complots et de luttes pour déjouer les plans des autorités néerlandaises.
Roger Seiter livre une intrigue complexe sur fond de décolonisation, où les enjeux géopolitiques se mêlent aux aventures palpitantes. Le dessin de Frédéric Legrain restitue la beauté sauvage des paysages indonésiens, tout en rendant l’intensité de l’action.
Le traitement du néo-colonialisme dans cette période post-Seconde Guerre mondiale est au cœur du récit, et les auteurs réussissent à mêler action et réflexion sur l’exploitation des ressources et les luttes d’indépendance. Un 36e album dynamique qui captive à la fois par son action et la profondeur de ses enjeux politiques.
Casterman, 13,50€
Reines de sang – Messaline, la déesse des miroirs
Messaline
Delcourt
Messaline, impératrice romaine, est un personnage à la réputation sulfureuse, accusée de luxure, de meurtre et de manipulation. Dans cet album, son histoire est revisitée à travers la symbolique du miroir, un reflet de son âme tordue et de ses désirs insatiables. Après sa condamnation à mort par son époux, l’empereur Claude, Messaline est effacée de l’Histoire par la damnatio memoriae, une tentative d’effacer son nom. Mais l’album explore l’ambiguïté de son héritage : victime ou coupable, femme de pouvoir ou simple manipulatrice ?
À travers une narration intense, l’album présente une version plus complexe de la reine déchue, confrontée à des intrigues de cour et des désirs de pouvoir. Le dessin classique, riche en détails, renforce l’atmosphère de l’Antiquité romaine, entre luxure et violence. Les personnages, bien caractérisés, sont porteurs d’émotions fortes, et les scènes de manipulation et de meurtres sont rendues avec un réalisme frappant.
Le miroir devient un outil puissant pour pénétrer dans la psyché de Messaline, révélant ses facettes sombres. Un album qui, sans juger son personnage, livre une vision percutante de la femme de pouvoir, prise entre son désir de liberté et la cruauté de son époque.
Delcourt, 15,95€
Wonder Woman Harley Quinn – La souffrance et le don
Wonde Woman Harley Quinn La souffrance et le don
Urban Comics
Sur l’île de Themyscira, un vent de crise souffle. Harley Quinn, ex-compagne du Joker, demande asile aux Amazones, perturbant l’harmonie de l’île. Sa présence divise les sœurs, exacerbant les tensions, d’autant que l’une d’elles est enceinte, et qu’un complot pour renverser la reine Hippolyte se dessine. Wonder Woman se retrouve en médiatrice, confrontée à des choix difficiles entre tradition et ouverture, pouvoir et compassion.
Cet album ne se contente pas d’un simple affrontement héroïque : il aborde la sororité, la responsabilité du pouvoir et les dilemmes moraux des héroïnes.
Sylvain Runberg, en écrivant le scénario, explore des thèmes profonds comme l’émancipation féminine, la peur de l’autre et la gestion du pouvoir. Wonder Woman, fidèle à son rôle de protectrice, doit arbitrer entre ses valeurs et la réalité des tensions internes de son peuple. Harley Quinn, plus humaine et vulnérable, n’est plus simplement un chaos ambulant.
Le dessin de Miki Montlló, inspiré par l’interprétation de Gal Gadot au cinéma, rend l’île de Themyscira majestueuse mais fragile. Une œuvre introspective qui réussit à mêler action, réflexion et émotion, tout en réinterprétant l’univers des super-héros sous un angle européen.
Urban Comics, 20,50€
À lire aussi
Rita Perdido – La clef des champs
Rita Perdido, héroïne des romans Agence Perdido, plonge ici dans un passé chaotique, où sa quête pour retrouver des objets volés par les croquemitaines l’amène à Paris. En fuite du Chili, elle découvre ses pouvoirs de retrouveuse, capables d’explorer des mondes parallèles. À 15 ans, elle s’engage dans une enquête sur les disparitions de chiens, qui la conduit vers des recoins mystérieux sous la capitale. Le roman éponyme prend vie grâce aux dessins vibrants de French Carlomagno, tandis que l’écriture de Victor Dixen magnifie cette histoire initiatique et horrifique. Rita Perdido est une aventure riche en suspense, magie et dangers, où l’espoir se mêle à la peur, fidèle à l’univers du roman. Un premier tome prometteur !
Bayard Jeunesse, 12,50€
Rita Perdido
Bayard Jeunesse
Promenons-nous dans l’espace
Yamato Kobayashi, adolescent en difficulté scolaire, se cache derrière une image de mauvais garçon. Mais sa rencontre avec Keisuke Uno, un lycéen qui lutte pour accomplir les tâches les plus simples de la vie quotidienne, va bouleverser sa vision du monde. Ensemble, ils forment un duo improbable, entre compréhension mutuelle et quête de sens. Le manga explore la différence et les difficultés personnelles avec une douceur et une poésie touchantes. Portée par un dessin expressif, cette série récompensée au Japon se distingue par son approche inclusive et humaine, offrant une réflexion sur la norme, la solidarité et la recherche de soi.
Glénat, 7,90€
Promenons-nous dans l’espace
Glénat
Les Sentinelles
En 1914, la France, en guerre contre l’Allemagne, mise sur une invention révolutionnaire : une pile au radium capable de doter des soldats d’armures mécaniques. Gabriel Féraud, créateur de cette technologie, devient le super-soldat Taillefer après une blessure grave. Les Sentinelles mêle l’Histoire à la science-fiction avec brio, explorant un monde alternatif où la guerre est menée par des soldats augmentés. Xavier Dorison et Enrique Breccia imaginent une guerre encore plus dévastatrice, où les inventions scientifiques tournent en armes de destruction. Une belle réédition au moment où l’histoire quitte les pages pour devenir une série sur Canal +.
Delcourt, 16,50€
Les sentinelles
Delcourt
Les Enfants Cachés 1939-1945
Ce récit poignant raconte l’histoire de jeunes enfants juifs durant la Seconde Guerre mondiale, contraints de se cacher pour échapper à la déportation. En retraçant leur quotidien, l’album montre l’horreur de l’Occupation, les rafles et la traque des familles juives. Témoignages sensibles, ces récits donnent voix à ceux qui ont survécu aux camps de concentration, mais à quel prix. Chaque histoire est une leçon de souffrance et de résilience, éclairant un aspect sombre de l’histoire de France. Cette bande dessinée, rééditée avec soin, vient rappeller l’importance de la mémoire, pour que de tels drames ne se reproduisent jamais.
Soleil, 21,95€
Les enfants cachés
Soleil