Publié le
6 oct. 2025 à 6h48
Les personnels des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) se mobilisent à Paris, jeudi 9 octobre 2025, à l’appel des organisations syndicales CGT et SNEPAP-FSU. Ils dénoncent une invisibilisation de leurs métiers et une politique « sécuritaire et stigmatisante » menée par l’État, surfant sur des idées de l’extrême droite plutôt que de se baser sur la recherche internationale.
« Le gouvernement surfe sur la vague des idées reçues »
Après le 6 mai et le 17 juin, il s’agira du troisième acte d’une bataille – d’abord idéologique – dont l’origine remonte au 17 février dernier quand le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, qualifiait des activités du SPIP de « ludiques ou provocantes ». Une réaction à l’emporte-pièce du ministre de la Justice à la rumeur fallacieuse lancée par un syndicat de surveillants, évoquant une « séance de massage aux frais du contribuable pour la Saint-Valentin » à destination de détenus.
« Plutôt que d’expliquer nos objectifs – qui ne sont pas toujours compréhensibles pour ceux qui n’appartiennent pas au monde carcéral -, de rappeler qu’ils sont basés sur des études solides, le gouvernement surfe sur la vague des idées reçues et fait le jeu de l’extrême droite », juge auprès d’actu Paris une représentante des personnels SNEPAP-FSU.
Avant d’ajouter : « Si l’on creuse un peu, on se rend compte que l’activité consistait, en réalité, à prodiguer des conseils en soins du visage à une vingtaine de personnes détenues, qu’en travaillant sur l’image qu’ils ont d’eux, on peut avancer dans le processus de réinsertion… » Selon le syndicat, quelque 150 activités dans au moins 74 établissements pénitentiaires auraient été annulées ou reportées après la déclaration de Gérald Darmanin. « Le yoga ou l’équithérapie ont notamment été sacrifiés alors que leur efficacité est prouvée », regrette-t-elle encore.
« Plus on crée d’établissements pénitentiaires, plus il y a de peines de prison prononcées »
« Nous ne sommes par contre la prison. Nous sommes contre la prison comme seule peine, comme peine de référence, poursuit-elle. Cela sécurise la population de manière illusoire et, dans bien des cas, cela exacerbe des éléments favorisant la récidive. Au lieu de surfer sur l’idée portée d’une justice laxiste, de privilégier l’enfermement parce que cela rassure le grand public ; souvent à tort puisqu’il s’agit de courtes peines ; il faut se demander ce qu’on met en place pour favoriser la réinsertion. Pour qu’il n’y ait plus de victimes dehors, justement. Cela marche ailleurs, comme dans les pays nordiques, pourquoi pas chez nous ? »
En défilant de la cour d’appel de Paris à la place Vendôme, de 13 heures à 13 heures 30, jeudi, les SPIP disent vouloir, avant tout, défendre des valeurs. « Aujourd’hui, l’administration favorise la création d’établissements pénitentiaires, le contrôle, etc. Mais les chiffres montrent que plus il y a de nouveaux établissements, plus il y a de peines de prison prononcées. Que les juges sont de plus en plus sévères. Que fait-on de la surpopulation en détention ? Des conditions indignes dans lesquelles les personnes sont détenues ? », clament les syndicats.
Ils demandent aussi un réarbitrage de l’utilisation du budget de la justice, « déjà bien inférieur à ce qu’il est ailleurs » : « Une personne en détention, c’est 100 euros par jour, tandis que sous bracelet c’est 10 euros ! Dans le même temps, certains collègues piochent dans leurs salaires pour mettre en place des ateliers parce qu’ils savent que ça marche… Depuis trois ans, plus aucun poste n’est ouvert dans les SPIP. Psys, coordinateurs culturels, personnel administratif, etc. plus de 1 200 postes manquent à l’appel… »
Votre région, votre actu !
Recevez chaque jour les infos qui comptent pour vous.
S’incrire
Plus de 170 000 personnes placées sous main de justice en milieu ouvert
Les syndicats ont, également, dans le viseur l’ouverture des quartiers de lutte contre la criminalité organisée, qu’ils estiment « axés sur l’isolement », et le projet de création d’un corps d’officier de probation, « uniquement focalisé sur le contrôle », selon eux.
La mobilisation aura, enfin, vocation à rappeler les missions du SPIP, largement méconnues du grand public : « Dès qu’il y a un cas de récidive, il fait les gros titres, mais personne ne parle de toutes les fois où cela fonctionne. Près de 84 000 personnes sont détenues, mais quasiment 175 000 sont sous main de justice en milieu ouvert. Il est nécessaire d’éduquer le public, d’expliquer ce que nous faisons et ne pas céder à la démagogie ».
Personnalisez votre actualité en ajoutant vos villes et médias en favori avec Mon Actu.