Vendredi 18 avril, au lendemain de la fusillade, Charles Compagnon a encore la voix qui tremble. Depuis tôt le matin, il raconte inlassablement à la presse comment il a vu trois jeunes se faire tirer dessus dans le Subway de Villejean où il se trouvait par hasard. Comment il aurait pu être touché par une balle, lui aussi, s’il ne s’était pas couché au sol, tiré par un de ses collègues élus. « Aujourd’hui, je veux apporter un témoignage en tant que victime, confie-t-il. Je ne suis pas en état de faire une analyse. Mais si notre traumatisme peut servir à la prise de conscience, alors on ne l’aura pas vécu pour rien. »

Ainsi, Charles Compagnon fait le choix de mettre entre parenthèses les polémiques. Elles reprendront, à n’en pas douter. Le patron de la droite et du centre à la Ville de Rennes s’apprête à entrer en campagne pour les municipales de 2026. L’impact politique de cet événement est impossible à prédire. Une chose est sûre : la légitimité de l’opposant à dénoncer le narcotrafic et ses guerres de territoires s’en trouve, bien malgré lui, renforcée.

Vers l’union de la droite et du centre ?

Depuis son élection, en 2020, l’ancien restaurateur a fait de l’insécurité son principal cheval de bataille. Un thème qu’il aborde quasiment à chaque conseil pour dénoncer l’« inaction » et le « dogmatisme » de la maire, Nathalie Appéré. Au point que l’entourage de cette dernière l’accuse de tenir des propos insultants. Entre l’édile et lui, l’inimitié est réelle, mal cachée par leur échange saisi à la volée par les caméras, dans la foulée de la fusillade.

Avant les élections municipales de 2020, pourtant, la maire socialiste et celui qui représentait les commerçants du centre-ville se faisaient la bise. Charles Compagnon raconte d’ailleurs qu’une place sur la liste de la sortante lui avait été proposée. Pour ses débuts en politique, il a plutôt choisi de se présenter contre elle, en tandem avec le maire de Saint-Grégoire, Pierre Breteau, décédé depuis. Verdict des urnes : 17,15 % au second tour, à quelques dixièmes de la macroniste Carole Gandon.

Cinq ans après, Charles Compagnon n’est plus un débutant. Devenu référent municipal d’Horizons, le parti d’Édouard Philippe, il a occupé le terrain et s’est fait un nom auprès des habitants. Et, cette fois, lui et Carole Gandon sont bien partis pour faire l’union sacrée au nom de « la situation dramatique dans laquelle se trouve la ville ». Un récit conforté par la fusillade du 17 avril, la dernière en date. Suffisant pour faire basculer une ville qui s’offre à la gauche depuis bientôt 50 ans ?