« Terrorisme. »

Le mot est lâché. Baskhan Magamadov, porte-parole d’une communauté tchétchène endeuillée, n’hésite pas à l’employer à propos de la fusillade qui a fait deux morts et cinq blessés, vendredi soir à Nice. « Terroriser », le procureur de la République de Nice emploie lui-même le terme, pour décrire le mode d’action qui a frappé de stupeur le quartier de Moulins.

Interrogé ce lundi matin sur RMC, Damien Martinelli évoque « une volonté de terroriser et de faire obstacle au fonctionnement du point de deal, au travers de la crainte pour les consommateurs et tous les présents. » Le patron du parquet niçois est un fin connaisseur de la criminalité organisée : il gérait ce pôle au parquet de Marseille.

Ici, pas d’exécution ciblée. Les individus qui ont surgi avec un 3008 blanc ont manifestement « rafalé » à tout va, à grands coups de Kalachnikov, semblant « viser indistinctement ». Pas moins de vingt-cinq douilles de calibre 7-62 mm ont été retrouvées sur place. Cinq douilles de 9 mm également.

Omar (prénom d’emprunt), un habitant des Moulins, a tout entendu. « Ce n’était pas un pistolet. ça faisait ta-ta-ta-ta-ta. J’ai rempli les poches de compresses. Et je suis descendu. » Omar a découvert plusieurs victimes au sol. « Le premier avait déjà un bandage, on s’occupait de lui. Un autre homme était par terre. J’ai vu que ce n’était pas la peine… », élude-t-il en tentant de « ne pas y penser ».

Treize morts depuis début 2024

Selon son récit, Omar porte alors secours à un jeune assis. « Je me demandais : « Pourquoi il transpire ? Il fait bon… » Là, je soulève sa main. Il avait une balle, là », dit-il en pointant son abdomen. « Heureusement qu’il y avait les compresses. On l’a compressé jusqu’à ce que les sapeurs-pompiers arrivent, le temps que ce soit sécurisé. »

Trois jours après le drame, la vie a repris son cours aux Moulins. Après le marché du samedi, place à l’école. Les anciens du quartier ont repris leurs conversations au soleil. Certains commerces ont rouvert. D’autres non. Le business de la drogue, lui, tente de repartir après ce violent coup d’arrêt. Des voitures de police sérigraphiées sillonnent le quartier, en attendant le retour de la CRS 81, dépêchée à Nice pour quelques jours encore.

Pendant ce temps, les enquêteurs du SIPJ 06, cosaisis avec la DZPN 13, sont lancés dans une course contre la montre pour retrouver les assassins. Depuis samedi, c’est la juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Marseille qui pilote les investigations. Compte tenu de leur caractère ultra sensible, le parquet de Marseille se refuse à ce stade à toute communication.

Depuis début 2024, le bilan du narcotrafic dans les Alpes-Maritimes s’avère lourd. Très lourd. Meurtre d’un ado à Grasse, incendie criminel tuant sept innocents aux Moulins (déjà), règlements de comptes faisant trois morts à Nice-Est, et deux nouveaux morts à Nice : ce fléau a fait au moins treize victimes. Collatérales pour la plupart.