L’affaire, initialement qualifiée de nature criminelle, a finalement été correctionnalisée. Cette nuit du 1er mars 2024, vers 4 heures du matin, un mineur de 17 ans crée un faux profil sur l’application LGBT Grindr pour attirer une victime.
Le rendez-vous est fixé dans un appartement du centre-ville, pour une relation tarifée d’abord estimée à 50 euros puis ramenée à 30. La victime se présente sur les lieux, elle est accueillie par le plus jeune de la bande, les autres cachés dans la cuisine patientent.
L’homme demande à prendre à une douche, puis revient, fume une cigarette avec celui qu’il pensait être son partenaire, lorsque surgissent trois hommes cagoulés qui le tabassent et le dépouille. L’un est porteur d’un couteau et en fait usage. La victime parvient tout de même à s’échapper et à prévenir la police. Elle est blessée au menton, blessure qui devra être suturée, ainsi qu’à la main où elle devra être opérée. Résultat : 6 jours d’ITT.
« Des faits d’une extrême violence »
Arrivés rapidement sur les lieux, les agents découvrent une mare de sang sur le palier de l’appartement du 7e étage, ainsi que sur les montants de la porte. Ils interpellent quatre personnes, dont un mineur. Sur place et aux abords de l’immeuble, ils saisissent des armes blanches (couteaux suisses, Opinel), des cagoules, un cache-cou ainsi que du matériel de conditionnement de stupéfiants.
Au fil de l’enquête, il apparaît que le mineur de 17 ans a joué le rôle d’appât pour attirer une cible « faible », selon ses propres mots.
Les prévenus, Anelka Awitte-Lugier et Enzo Lannez-Blanchot âgés de 20 ans, tous deux arrivés de Clermont-Ferrand quelques jours plus tôt, ainsi que Belkheir Lassouag, originaire de Marseille, admettent être venus à Nice pour « charbonner », autrement dit participer à un trafic de stupéfiants, faute d’argent et d’emploi. Mais dans le box, deux trois prévenus rejettent la faute sur un autre.
Tous pointent Lassouag, 24 ans, présenté comme l’instigateur du piège. Celui-ci dément formellement et affirme au contraire avoir « aidé la victime à s’échapper ». Les autres dépositions, jugées concordantes, décrivent pourtant un plan imaginé par le Marseillais, en manque de produits stupéfiants. « Ça fait 19 mois que nous sommes en prison pour 50 euros », lâche l’un des prévenus dans le box. Une remarque qui fait bondir la présidente Agnès Vadrot qui le recadre : « Ce n’est pas seulement 50 euros, ce sont des faits d’une extrême violence ».
« Les fameux guets-apens Grindr »
Les réquisitions prononcées par la procureure Laura Goude sont lourdes. Elle dénonce des faits « parfaitement prémédités », rappelant la multiplication des « guets-apens Grindr » et requiert quatre ans pour Belkheir Lassouag considéré comme le donneur d’ordre et en état de récidive légale. Deux ans pour Enzo Lannez-Blanchot et Anelka Awitte-Lugier, ainsi que la révocation d’un sursis de 8 mois en prime pour ce dernier. Le mineur a été jugé séparément devant un tribunal pour enfants.
Le tribunal suivra les réquisitions du parquet pour Lannez-Blanchot et Awitte-Lugier et portera à trois ans la peine pour Lassouag. La juridiction retenant « une unité d’action » entre les quatre protagonistes.