Ce nouvel onglet est une réponse à la popularité croissante de ChatGPT pour effectuer des recherches sur internet.
Pour la seconde fois, une évolution du moteur de recherche de Google mâtinée d’intelligence artificielle paraît en Europe à l’exception de la France… au grand soulagement des éditeurs de sites web. Le groupe américain annonce le lancement ce mercredi sur le continent de l’onglet «AI Mode» (ou «Mode IA» en français) sur son célèbre moteur de recherche. Ce déploiement devrait prendre une semaine pour être effectif dans les 36 pays concernés.
Paru en mai dernier aux États-Unis et dans une centaine d’autres pays, «AI Mode» injecte un chatbot au sein du moteur de recherche. Il faut toutefois l’activer volontairement, en se rendant sur un onglet dédié. Ce dernier se trouve tout à gauche sur la version ordinateur de Google Search, et prend la forme d’un bouton lorsqu’on ouvre un nouvel onglet dans le navigateur mobile Google Chrome.
Des dizaines de recherche en simultané
«AI Mode» utilise la dernière version du modèle de langage (LLM) de Google, Gemini, ce qui lui permet de comprendre du texte, des photos, de la vidéo et du son. L’internaute peut poser une question complexe, comme «voici une photo des derniers livres que j’ai lu, pourrais-tu m’en suggérer d’autres dans ce style ?», ou bien «que faire ce week-end avec des amis à Nice, ils aiment bien manger et explorer des quartiers cool hors des sentiers battus».
L’IA va alors mener en parallèle des dizaines de recherches en ligne, et en rédiger la synthèse en quelques secondes. Sur le côté droit apparaît la liste, cliquable, des sites consultés. L’internaute peut ensuite rebondir ou ajouter des précisions, comme «il faudrait que ces lieux soient à 30 minutes maximum de la gare TGV en transports en commun».
«AI Mode» n’est pas sans faire penser à «AI Overviews», une fonctionnalité déjà intégrée au moteur de recherche (mais pas en France). Cette dernière affiche une réponse synthétique au-dessus de la traditionnelle liste de «liens bleus». Le groupe américain souligne que ces deux produits ne fonctionnent pas de la même manière. «AI Mode» s’appuie en effet uniquement sur les résultats de recherche -et donc, sur des sites internet – , tandis que «AI Overviews» se base d’abord sur les propres connaissances du LLM Gemini.
Bouleversement pour les éditeurs de site
Ces deux modifications profondes du moteur de recherche visent à le rendre toujours aussi pertinent à l’ère de l’IA générative. Le «réflexe Google» tend en effet à se perdre chez les jeunes générations, qui préfèrent se tourner vers ChatGPT d’OpenAI pour leurs moindres questions. Le «moteur de réponse» Perplexity est aussi un autre concurrent, même si son audience est largement inférieure à celle de ChatGPT. En France, 4,7 millions d’internautes se rendent chaque jour sur le chatbot d’OpenAI.
Mais les bouleversements de Google chamboulent aussi les éditeurs de sites web. Aux États-Unis, ils sont nombreux à déplorer une chute du trafic que leur renvoie Google depuis le déploiement de AI Overviews et AI Mode – ce qui a un effet non négligeable sur leurs revenus publicitaires. À quoi bon, en effet, cliquer sur un lien si la réponse apparaît devant ses yeux? Le groupe américain s’oppose à cette lecture des faits, et affirme que le trafic renvoyé est de bien meilleur qualité : les internautes restent longtemps, au lieu de refermer immédiatement l’onglet car le site ne correspond pas à ce qu’ils recherchaient.
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La France ne bénéficie ni d’AI Overviews, ni du Mode IA. Google le justifie par des «obstacles réglementaires», qu’il espère régler dans les prochains mois. La cause en revient à une sanction de 500 millions d’euros adressée par l’Autorité de la Concurrence en 2021 contre Google à la suite d’une plainte des éditeurs de presse sur le non-respect de la loi sur le versement de droits voisins. Elle s’est doublée en 2024 d’une nouvelle amende de 250 millions d’euros pour non-respect de ses engagements vis-à-vis de ce mécanisme de rémunération des médias en ligne. Le groupe américain n’a semble-t-il aucune envie de déclencher un nouveau contentieux avec la presse française.
Dans un échange avec des médias français, Kent Walker, président des affaires publiques du groupe américain, a souligné qu’il n’était «pas bon pour la France» que le pays ne bénéficie pas des dernières avancées en intelligence artificielle. «Les chatbots sont l’avancée la moindre importante apportée par l’IA. Cette technologie est réellement transformative pour certains secteurs-clé, comme la recherche scientifique», souligne-t-il. Google plaide plus largement pour un assouplissement de la réglementation européenne sur l’IA. Ce qui compte dans cette révolution «n’est pas les pays qui bâtissent ces technologies, mais ceux qui savent le mieux s’en servir. Et le monde change rapidement», prévient Kent Walker.