« Le monde libre a besoin d’un nouveau leader. C’est à nous, Européens, de relever le défi », s’exclama Kaja Kallas, la nouvelle cheffe de la diplomatie européenne, au lendemain de l’altercation spectaculaire opposant Donald Trump à Volodymyr Zelensky à la Maison-Blanche. Le vrai défi à relever, en l’occurrence, serait plutôt de doter l’Union européenne d’une diplomatie digne de ce nom. Celle-ci est en train d’illustrer jusqu’à la caricature son caractère partial, et, qui plus est, inopérant.

Alors que, dans toutes les régions du monde, s’expriment l’indignation et les plus fermes condamnations de la rupture unilatérale du cessez-le-feu par Israël à Gaza, du bilan humain effroyable de sa nouvelle agression et des menaces directes d’annexion de parties de l’enclave palestinienne, l’Union européenne s’est, une fois de plus, déshonorée en se contentant de « déplorer » la rupture de la trêve et d’appeler Israël « à la retenue » ainsi que « toutes les parties » au respect de leurs obligations. Sans l’ombre d’une sanction.

En plus de son insupportable partialité au Proche-Orient, la diplomatie européenne – fût-elle élargie à d’autres États que ceux de l’UE – apparaît d’une inefficience troublante en ce qui concerne la recherche d’une issue au terrifiant conflit russo-ukrainien. Ainsi, à quoi a abouti, à ce jour, l’impressionnante succession de sommets de chefs d’État ou de gouvernement (avec le concours du secrétaire général de l’Otan) qui marque depuis peu, comme jamais auparavant, l’agenda européen ?

Les seules annonces qui émergent tiennent plutôt d’une croisade pour la militarisation de l’Union européenne.

Qu’on en juge : 17 février, Emmanuel Macron réunit un sommet informel de sept pays, dont la Grande-Bretagne. Rebelote deux jours après, avec 11 autres pays. Le 2 mars, c’est au tour du Britannique Keir Starmer d’inviter 15 pays européens (dont la Turquie et la Norvège) à Londres afin de constituer une « coalition de bonnes volontés ». Le 11 mars, Macron s’entoure de 37 chefs d’état-major d’armée, européens mais aussi canadien et australien, tandis que, quatre jours plus tard, Starmer réunit depuis Londres un sommet virtuel de 25 pays.

Enfin, le président français invite à son tour à Paris, ce 27 mars, la « coalition des volontaires » constituée à Londres ! Pour quel bilan jusqu’ici et quelle perspective prochaine ? Emmanuel Macron nous en donne une idée : « On a fait un gros travail avec les Britanniques sur les conditions d’encadrement du cessez-le-feu, et donc, là, je pense que ça va être l’occasion d’en discuter et de le préciser… »

En attendant, les seules annonces qui émergent de ce chapelet de rencontres de haut niveau ont peu à voir avec l’élaboration annoncée d’un « plan pour faire cesser les combats en Ukraine » ou de garanties pour une paix durable. Elles tiennent plutôt d’une croisade pour la militarisation de l’Union européenne, élargie à ses alliés de circonstance. Et, dans ce contexte, le président français, manifestement fier d’être à la tête du « seul pays doté » (de l’arme nucléaire) parmi les « 27 », a estimé être dans son rôle en prenant l’initiative.

Lui qui brûle depuis longtemps d’étendre son « parapluie nucléaire » à ses partenaires européens entend saisir l’occasion historique qui se présente – « aujourd’hui » où les missiles russes déployés en Biélorussie « nous exposent » 1 – pour se hisser à l’avant-garde de la « protection » des Européens, tout en rendant « la France plus forte » 2. Dès lors, « l’autre » puissance nucléaire d’Europe occidentale, le Royaume-Uni, qui estime, en plus, pouvoir encore tirer quelque profit de son (ex)- « relation spéciale » avec Washington, se devait de disputer à son collègue français le prestigieux leadership.

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