Les ministres des Finances de l’UE ont critiqué le projet de taxe sur les sociétés à l’échelle européenne, le qualifiant de menace pour la compétitivité et remettant en question le financement du plan budgétaire à long terme de 2 000 milliards d’euros de la Commission européenne.
Cette taxe, connue sous le nom de CORE (ressource pour l’Europe provenant des entreprises), permettrait de collecter environ 6,8 milliards d’euros par an auprès des entreprises opérant dans l’UE et dont le chiffre d’affaires net annuel dépasse 100 millions d’euros.
« Nous sommes préoccupés par l’impact que [cette taxe] pourrait avoir sur la compétitivité », a déclaré le ministre français de l’Économie, Roland Lescure, lors de la réunion des ministres vendredi 10 octobre à Bruxelles.
Le revirement de la France marque un revers majeur pour Bruxelles. En tant que fervent partisan des nouvelles sources de revenus de l’UE et deuxième économie de l’Union, l’opposition de Paris pourrait bien sonner le glas de cette taxe sur les sociétés déjà fortement critiquée.
Quinze pays, dont les première et troisième économies de l’UE, l’Allemagne et l’Italie, se sont également prononcés contre une telle mesure.
« Elle est naturellement perçue de manière très négative par notre communauté d’affaires », a expliqué l’ambassadeur slovaque auprès de l’UE, Juraj Nociar.
En parallèle, le commissaire européen au Budget, Piotr Serafin, défend cette taxe, arguant qu’elle ne concerne que les très grandes entreprises, à un niveau comparable à « la prime annuelle type d’un PDG dans une telle entreprise ».
Le ministre polonais des Finances, Waldemar Żurek, a pour sa part qualifié la CORE d’« idée intéressante » — ce qui est ce qui se rapproche le plus d’un soutien, les ministres ayant fait part de leurs points de vue — mais a reconnu que cette taxe « nécessite une analyse de son impact sur la compétitivité ».
Actuellement, la majeure partie du budget actuel de l’UE (2021-2027) est financée par les contributions directes des États de l’UE, calculées sur la base de leur revenu national brut, mais la Commission souhaite obtenir de nouvelles ressources pour l’UE après 2027. Il s’agit notamment d’une taxe sur les sociétés, d’une taxe sur le tabac (TEDOR) et de trois taxes vertes, afin de financer un budget plus important sans exercer de pression directe sur les budgets nationaux.
Budget de l’UE : les propositions de taxes sur les entreprises et le tabac contestées par les États membres
En juillet, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a présenté le budget 2028-2034 comme…
4 minutes
Unanimité
La contestation va au-delà de la taxe elle-même. La proposition de la Commission concernant le budget repose sur les cinq nouvelles sources de revenus. Si l’une d’entre elles devait ne pas voir le jour, la Commission pourrait devoir revoir sa copie — une enveloppe de 2 000 milliards d’euros — afin d’équilibrer les coûts entre les 27 pays de l’UE.
Étant donné que les États de l’UE doivent adopter le budget à l’unanimité, chaque gouvernement devrait s’efforcer de protéger ses intérêts nationaux, en veillant à payer moins et à recevoir plus.
« Veuillez considérer cette proposition comme un ensemble », a déclaré Piotr Serafin lors de la réunion. « Si nous considérons l’ensemble, il y a de bonnes chances que vous voyiez une opportunité politique de donner suite à cette proposition. »
L’impôt sur les sociétés toucherait principalement les pays les plus riches de l’UE, qui contribuent déjà davantage au budget de l’Union. Il compenserait en partie l’impact des nouvelles taxes vertes et des réductions prévues des fonds régionaux et agricoles, qui pèseraient autrement plus lourdement sur les États membres les plus pauvres.
Mais même les pays moins prospères ont critiqué la CORE vendredi. « Nous estimons également que notre contribution augmentera fortement », a déclaré Juraj Nociar.
L’équation complexe d’une taxe Zucman made in UE
Le feuilleton politique français se poursuit, et la taxe Zucman réclamée par la gauche en…
6 minutes