Un hall de HLM quelconque. Une rangée de boîtes aux lettres rouges. Une femme d’une soixantaine d’années retire son courrier, croise des ouvriers et s’en va. Une scène du quotidien tout ce qu’il y a de quelconque. Rien de très sexy là-dedans.
Sauf que la sexagénaire est suivie par une caméra et a le charisme d’Anouk Grinberg. L’ex-égérie du misogyne Bertrand Blier devenue figure de proue du combat féministe anti-Depardieu tourne actuellement dans la tour panoramique de Nancy La dernière patiente.
Dernier témoignage d’une époque révolue
Le réalisateur Rémi Bassaler, dont c’est le premier long-métrage, et son équipe, composée d’une trentaine de techniciens dont la moitié originaire de la région, ont investi ce lieu emblématique de l’agglo nancéienne depuis fin septembre et doivent rester là jusqu’au 25 octobre. Leur film, à la fois intimiste et social, raconte quarante-huit heures de la vie d’une médecin qui accepte une ultime patiente, une femme enceinte, alors qu’elle doit quitter son logement et son cabinet, tous deux situés dans une tour sur le point d’être détruite.
La fiction colle de façon troublante à la réalité puisque la tour panoramique qui sert de décor principal au long-métrage est effectivement vouée à disparaître, pour de vrai, du paysage nancéien dans les mois à venir. Le film sera donc une forme de dernier témoignage sur ce qu’a été ce bâtiment, symbole spectaculaire d’un autre temps, celui de l’urbanisme des années 70.
« Je dois aller au boulot, moi ! »
Une quinzaine de locataires vivent encore là. Pas tous ravis de voir le cinéma s’emparer de leur quotidien. Comme cet habitant qui fait franchement la gueule lorsque l’ascenseur s’ouvre et qu’il découvre le hall d’entrée bloqué par le tournage de la scène des boîtes aux lettres. « Je dois aller au boulot, moi ! », ronchonne-t-il.
Quelques secondes de patience et, dès la prise terminée, l’homme peut passer et rallier la sortie de l’immeuble. « En général, cela se passe bien… Mais heureusement quand même qu’il ne reste qu’une quinzaine de logements occupés », sourit Lucy-Blue Ferry, la directrice de production.
Car, outre la touche de réalisme que cela apporte, le fait que le bâtiment soit quasi désert permet à l’équipe ciné de faire à peu près comme elle veut. Elle a transformé le 19e étage en cantine, le 16e en cabinet médical et le 23e en studio. C’est là, en effet, que se trouve le décor principal c’est-à-dire l’appartement en cours de déménagement du personnage d’Anouk Grinberg mais aussi les bureaux de la production et l’atelier où sont conçus et stockés accessoires, éléments de décor et costumes.
L’équipe ciné se joint à la manif
Quelques images ont également été tournées dans le quartier et à l’hôpital central. L’équipe a également mis en boîte des scènes de la manif du 2 octobre à Nancy.
« Ce n’était pas prévu. C’était une journée off normalement. Mais comme il y avait des scènes de manifestation prévues dans le scénario, nous avons profité de l’événement. Nous avons pu intégrer le cortège grâce à l’aide de la CGT », confie la directrice de production. Quand la réalité rejoint la fiction… Et vice-versa.