Mais que se passe-t-il à la frontière entre le Pakistan et l’Afghanistan ? Islamabad a promis ce dimanche « une réponse musclée » à l’opération de représailles menée par l’Afghanistan contre ses forces dans la nuit à leur frontière commune et qui aurait tué, selon Kaboul, « 58 soldats pakistanais ». 20 Minutes fait le point sur ces affrontements entre les deux pays, dont les relations sont tendues depuis le retour au pouvoir des talibans en Afghanistan à l’été 2021.

Que sait-on de ces attaques ?

Samedi soir, le ministère taliban de la Défense avait indiqué avoir mené « avec succès » une opération armée « de représailles » contre les forces de sécurité pakistanaises, « en réponse à des violations répétées et frappes aériennes sur le territoire afghan par l’armée pakistanaise ». Le porte-parole d’une unité talibane basée à la frontière avait indiqué samedi soir que des forces talibanes s’étaient engagées « dans de violents affrontements contre des forces de sécurité pakistanaises dans diverses zones » frontalières. Kaboul avait finalement annoncé, autour de minuit heure locale, la fin de son opération.

Le Pakistan assurait avoir répliqué à des affrontements depuis les provinces afghanes de Kunar, Nangarhar, Paktia, Khost et Helmand, tout le long de la ligne Durand, qui divise les deux pays. « 58 soldats pakistanais ont été tués lors de cette opération et 9 talibans ont perdu la vie », a assuré ce dimanche, lors d’une conférence de presse, le porte-parole du gouvernement taliban, Zabihullah Mujahid. Le Pakistan n’a pas confirmé ce chiffre.

Quelle est la réaction du Pakistan ?

« Chaque provocation sera suivie d’une réponse musclée et efficace », a mis en garde ce dimanche le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif dans un communiqué, avertissant qu’il n’y aura « aucun compromis sur la défense du Pakistan » et accusant Kaboul d’abriter des « éléments terroristes ». Islamabad n’a pas confirmé être à l’origine des bombardements sur la capitale afghane et dans le sud-est du pays jeudi.

« L’Afghanistan joue avec le feu et le sang », a aussi mis en garde le ministre de l’Intérieur Mohsin Naqvi, assurant que son voisin recevra, « comme l’Inde, une réponse écrasante afin qu’il n’ose plus jeter ne serait-ce qu’un regard hostile sur le Pakistan ». Le ministre faisait référence à la pire confrontation depuis des décennies avec son voisin indien, survenue en mai et dans laquelle les deux ennemis historiques avaient échangé tirs de missiles, envois de drones et barrages d’artillerie.

Quelle est la situation actuellement ?

Au petit matin, deux points de passage clés entre le Pakistan et l’Afghanistan, Torkham et Spin Boldak, où transitent notamment des milliers d’Afghans expulsés ces derniers mois par Islamabad, étaient fermés et le personnel civil retiré, ont indiqué des hauts responsables afghans et pakistanais. Des troupes paramilitaires supplémentaires ont été déployées, a également indiqué un haut responsable pakistanais.

« Le poste-frontière de Chaman a été fermé pour tous types de passages, douaniers ou humains, par le Pakistan », a de son côté indiqué Mohammad Haqmal, responsable du département Information et Culture à la frontière de Spin Boldak, en Afghanistan.

Quel est le passif entre les deux pays ?

Les relations entre les deux pays sont en dent de scie depuis le retour au pouvoir des talibans afghans à l’été 2021, Islamabad accusant son voisin « d’abriter » des talibans pakistanais (TTP). Ce mouvement, formé au combat en Afghanistan et qui se revendique de la même idéologie que les talibans afghans, est accusé par Islamabad d’avoir tué des centaines de ses soldats depuis 2021.

Plus tôt samedi, le TTP a revendiqué des attaques meurtrières dans le nord-ouest du pays qui ont causé la mort de 23 personnes, dont trois civils. Elles ont eu lieu vendredi non loin de la frontière avec l’Afghanistan, dans la province du Khyber Pakhtunkhwa. Pour Islamabad, ce sont les talibans afghans, de retour au pouvoir à Kaboul depuis l’été 2021, qui favorisent cette résurgence du TTP.

Un rapport du Conseil de sécurité des Nations unies publié plus tôt cette année estimait que le TTP « a sans doute été le groupe extrémiste étranger en Afghanistan qui a le plus profité » du retour des talibans afghans, « qui ont accueilli et activement soutenu » le mouvement. Mais Kaboul dément fermement et renvoie l’accusation à Islamabad, assurant que le Pakistan soutient des groupes « terroristes », notamment la branche régionale du groupe Etat islamique (EI).