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Rédaction Marseille

Publié le

9 oct. 2025 à 6h33

C’est un médicament antiépileptique dont l’usage a été détourné et dont la consommation a littéralement explosé. Le tribunal correctionnel de Marseille (Bouches-du-Rhône) a prononcé ce mercredi 8 octobre des peines de prison dans une affaire de trafic de prégabaline, surnommée la « drogue du pauvre », entre la Grèce et la France.

Plus de 300000 gélules en un an et demi

Les six condamnations, assorties de sursis, vont de 18 mois à trois ans de prison. Sur les quatre prévenus en détention provisoire, tous primo-délinquants, trois pourront être immédiatement relâchés, leur peine étant couverte par leur détention provisoire. Deux condamnés en détention écopent aussi de cinq ans d’interdiction sur le territoire français.

Avec des mules qui prenaient l’avion et des colis envoyés par la poste entre la Grèce et Marseille, ce « réseau international » est accusé d’avoir fait entrer en France, au moins entre octobre 2022 et avril 2024, plus de 300000 gélules d’une valeur de plus de 600000 euros.

Une grosse prise à l’aéroport de Marignane

L’affaire illustre l’augmentation ces dernières années de la consommation d’opioïdes et le mésusage de médicaments. La prégabaline, utilisée aussi pour soigner les troubles de l’anxiété, est de plus en plus populaire dans les milieux les plus précaires.

L’existence du réseau a été détectée à l’automne 2023 quand un contrôle douanier à l’aéroport de Marignane permet de retrouver plus de 10000 gélules dans les valises d’une assistante radiologue fraîchement débarquée de Grèce.

L’enquête permettra d’établir que cette jeune femme a pris l’avion près de vingt fois pour venir en France. Mais les gélules étaient aussi acheminées via des colis, envoyés par la poste ou DHL.

Une « augmentation importante des cas d’addiction »

En 2021, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait durci en France les conditions de prescription de la prégabaline, confirmant une « augmentation importante des cas d’addiction » couplée à une « augmentation du mésusage » – « essentiellement à visée de défonce/euphorie, dans un contexte de polyconsommation de substances psychoactives ».

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« Les personnes sont majoritairement des hommes jeunes (27 ans en moyenne) dont des mineurs en situation de précarité, et parfois en détention ou centres de rétention administrative », avertit l’ANSM.

Des prévenus Algériens, qui vivent dans la pauvreté

Six prévenus étaient poursuivis. L’un, en fuite, a été jugé en son absence. La passeuse grecque, se trouve en Grèce sous contrôle judiciaire. Les avocats de la défense ont brossé un univers de misère dans lequel survivent les autres, tous Algériens.

L’un d’eux, qui fait des petits travaux de plomberie et vivait dans un squat, dont la compagne a été secrétaire dans une crèche, a d’abord pris le médicament pour des troubles d’anxiété. Avant de plonger dans la dépendance.

Un autre, coiffeur le week-end quand il ne travaillait pas dans un snack, a assuré qu’il n’avait pas de quoi payer son loyer et vendait les médicaments sur des marchés ou au café.

« Des petites mains »

« Ce sont des gens qui sont dans la précarité, qui consomment ‘la drogue du pauvre’ parce qu’elle est accessible financièrement. Ce sont des petites mains, qui s’inscrivent par ailleurs dans quelque chose de beaucoup plus important et de beaucoup plus international », a indiqué Me Bruce Blanc, qui représentait un des prévenus.

Après le jugement qui ouvre la voie à des libérations, Me Maximilien Neymon, un autre avocat, a salué une « justice humaine », qui « prend le temps d’écouter les défenses. »

Avec AFP

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