Le Pacte vert européen, porté en 2020 par Ursula von der Leyen, subit de nombreux coups de rabot. Le premier lifting vient de l’intérieur, avec le projet de loi Omnibus en cours de discussion, censé “simplifier” la charge administrative des entreprises et repousser certaines directives, au risque d’éroder la portée réformatrice du Green Deal. Cette “simplification” s’inscrit aussi dans un contexte politique plus large. La montée des partis conservateurs et la crainte d’un “ras-le-bol vert” chez une partie de l’électorat poussent Bruxelles cherche à calmer le jeu avant les prochaines échéances électorales.

Plusieurs États membres – dont l’Allemagne, la France et l’Italie – plaident désormais pour un ralentissement du calendrier climatique, arguant du poids que représentent ces nouvelles obligations pour les entreprises déjà fragilisées par la crise énergétique. De plus, cette “simplification” européenne n’est pas qu’une affaire interne. De l’autre côté de l’Atlantique, les États-Unis font eux aussi pression en faveur d’un allègement des contraintes environnementales.

Une “surréglementation” verte qui fâche Washington

Le Financial Times rapporte que Washington a demandé à Bruxelles l’exemption des entreprises non européennes (donc américaines) de l’obligation d’établir des plans de transition climatique dans le cadre de la directive CSRD, un texte conçu pour renforcer la transparence environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) des entreprises.

Autre point de blocage : la directive CS3D (Corporate Sustainability Due Diligence Directive), qui impose aux entreprises un devoir de vigilance sur leurs fournisseurs et sous-traitants en matière sociale et environnementale.

Ces règles représenteraient une “surréglementation injustifiée”, relate le Financial Times, imposant des coûts économiques et administratifs jugés excessifs. Les sanctions potentielles – des amendes pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires mondial – nuiraient, selon Washington, à la compétitivité des firmes américaines sur le marché européen.

Business is business : Washington ne veut aucune contrainte climatique

Les exigences américaines s’inscrivent dans une offensive plus large contre les réglementations environnementales. Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a acté le retrait américain de l’accord de Paris ; multiplié les mesures en faveur des énergies fossiles et de l’industrie automobile ; taillé drastiquement les effectifs des organismes nationaux en lien avec la protection de l’environnement ou encore coupé les fonds alloués pour dédommager les pays victimes de catastrophes causées par le changement climatique.

En septembre, à l’ONU, le président américain a qualifié le changement climatique de” plus grande escroquerie jamais perpétrée dans le monde”. Un signal clair : les États-Unis entendent freiner toute avancée contraignante en matière climatique, y compris sur le terrain européen.

Un nouveau recul pour le calendrier du Green Deal

Face à ces pressions, la Commission européenne ajuste le cap. Selon ESG Today, elle aurait informé début octobre les régulateurs financiers de l’UE de sa volonté de reporter – ou du moins d’étudier un nouveau décalagede l’application des règles de reporting pour les entreprises non européennes. Initialement prévues fin juin 2024, ces obligations avaient déjà été repoussées à 2026 ; elles le sont désormais à… octobre 2027.

Un nouveau signe d’essoufflement du Green Deal, alors que l’Europe semble prête à multiplier les reports et les ajustements pour ménager ses partenaires économiques – et ses propres divisions internes.