Par
Maréva Laville
Publié le
12 oct. 2025 à 18h04
Vendredi 17 octobre 2025. La date s’annonce cruciale pour le destin de Cédric Jubillar, accusé du meurtre de sa femme Delphine, portée disparue depuis la nuit du 15 au 16 décembre 2020. Ce jour-là, Cédric Jubillar connaîtra sa sentence, après quatre semaines de procès aux assises d’Albi (Tarn). Les six jurés, la présidente du tribunal et ses deux assesseurs décideront si oui ou non, cet homme de 38 ans, père de deux enfants, est déclaré coupable. Une telle décision ne doit pas être prise à la légère. Présomption d’innocence oblige, il suffit de peu pour que l’accusé soit acquitté. Voici sous quelles (complexes) conditions Cédric Jubillar peut être reconnu innocent ou coupable.
#1. Les derniers mots de l’accusé puis l’isolement
Vendredi 17 octobre, 9 heures, au lendemain des plaidoiries des avocats des parties civiles puis de la défense, Cédric Jubillar prononcera ses derniers mots. La dernière occasion de plaider son innocence, qu’il n’a eu de cesse de clamer depuis presque cinq ans. Les textes fondamentaux du Code pénal seront ensuite lus, notamment celui qui aborde l’intime conviction. À ne pas confondre avec l’opinion personnelle, l’intime conviction doit se baser sur des faits et sur l’ensemble des preuves — ou faisceau d’indices — apportées durant les débats. Elle ne doit pas omettre l’impartialité, l’indépendance et la présomption d’innocence. Serment prêté.
Après les lectures, place au délibéré. La Cour se lèvera. Le Palais de Justice d’Albi sera évacué. C’est l’heure de l’isolement pour les six jurés, la présidente du tribunal et les assesseurs. Personne ne pourra entrer en contact avec eux tant qu’ils ne se seront pas mis d’accord. « Ça va durer des heures », prédit un magistrat de liaison, interrogé par Actu Toulouse.
#2. La question cruciale : est-il coupable ?
Première question à laquelle ils devront répondre : « Cédric Jubillar est-il coupable du meurtre de Delphine Jubillar ? » Oui ? Non ? Chaque juré devra voter à bulletin secret. Écrire si oui ou non, l’accusé a donné la mort.
Il ne suffit que de trois réponses négatives pour acquitter Cédric Jubillar. La loi Dupond-Moretti a instauré, dès 2022, une « majorité qualifiée » de sept voix sur neuf pour reconnaître la culpabilité. De sorte, aussi, que la décision soit populaire, c’est-à-dire davantage décidée par les jurés citoyens que par les professionnels de la justice. « Le jugement des pairs par ses pairs », dit la formule pour les assises.
Vidéos : en ce moment sur Actu
Si trois bulletins répondent par la négative, Cédric Jubillar, acquitté, retournera quand même à la prison de Seysses — où il est incarcéré provisoirement depuis plus de quatre ans — pour des formalités, avant d’être remis en liberté. Si, au contraire, la majorité des jurés vote pour sa culpabilité, il faudra s’adonner à tout un ensemble d’autres étapes.
Existe-t-il des circonstances atténuantes ou au contraire, aggravantes ? Être le conjoint de la victime en est une, par exemple. Enfin, s’il est coupable, quelle peine doit-on lui réserver ?
Votre région, votre actu !
Recevez chaque jour les infos qui comptent pour vous.
S’incrire
#3. Le vote de la peine
Chaque juré et membre de la Cour inscriront sur un papier la durée d’incarcération la plus juste à leurs yeux. Nouveau scrutin. « Si la peine maximale sort au premier tour, c’est fini », assure le magistrat de liaison, questionné par Actu Toulouse. Mais ce n’est pas aisé. Car pour exiger la perpétuité, là encore, la majorité qualifiée de sept voix est de rigueur. Les peines plus faibles, quant à elles, ne nécessitent que la majorité absolue, soit cinq voix sur neuf.
Deux tours sont alors accordés. Si aucune peine ne ressort gagnante des deux scrutins, le troisième tour écartera la plus forte d’entre elles. Dans le cas précis de Cédric Jubillar, il s’agit de la perpétuité : 30 ans de réclusion criminelle.
#4. La peine maximale retirée à chaque tour sans majorité
Le vote devient donc dégressif. Les jurés ressortent de nouveaux papiers et recommencent en abaissant la peine maximale à 29 ans, puis 28, puis 27, 26, 25… Jusqu’à ce que cinq voix s’unissent pour une sentence. À noter que le vote blanc peut intervenir pour les peines, mais qu’il joue en la faveur de l’accusé.
À ceux qui croiraient alors que c’est terminé n’ont qu’à bien se tenir. La même opération se renouvelle pour les peines complémentaires, telles que l’interdiction de conduire par exemple. Idem pour la durée et les modalités d’un suivi socio-judiciaire.
Et les enfants ?
Cédric et Delphine Jubillar ont donné vie à Louis, aujourd’hui âgé de 11 ans, et Elyah, qui a désormais 6 ans. Depuis l’incarcération de leur père, en juin 2021, les deux enfants n’ont pu revoir leur père. Si Cédric Jubillar venait à être déclaré coupable, qu’en sera-t-il de ses liens avec Louis et Elyah ? « Ça, c’est une mesure civile », répond le magistrat de liaison. Le retrait de l’autorité parentale doit faire l’objet d’un nouveau jugement. Il en va de même pour les parties civiles qui pourraient alors réclamer des dommages et intérêts.
#5. Le verdict
Il est fort à parier que les jurés et la Cour enfermés dans le Palais de Justice ne voient pas les aiguilles de l’horloge avancer jusqu’à tard le soir… voire la nuit ? Les amateurs de cinéma se souviendront probablement du film Douze hommes en colère. Se mettre d’accord sur une peine, c’est long. Mais ce n’est qu’au terme du délibéré que le verdict sera prononcé publiquement.
Innocent ou coupable ? La première réponse tombera vendredi 17 octobre (ou samedi 18 octobre ?). Première, car à la lumière des trois premières semaines de procès, il reste assez certain, qu’importe la décision, que les avocats, d’un côté comme de l’autre, dégainent la carte « procédure en appel ».
Personnalisez votre actualité en ajoutant vos villes et médias en favori avec Mon Actu.