Il est assis sur le banc des accusés, impeccable et d’un calme olympien, vêtu d’un polo bleu ciel et d’un pantalon marine.

Joao., qui comparaît libre, est accusé de tentative d’assassinat sur la personne de Vitor, surnommé « Tambour ». Des faits qu’il conteste mais pour lesquels il encourt jusqu’à la réclusion à perpétuité.

Tout commence le 15 janvier 2020. A 20 h 24, un homme vêtu d’une doudoune sombre, d’une cagoule ne laissant entrevoir que les yeux, d’un bas de jogging sombre, de gants et d’un sac à dos pénètre dans le Dream Gourmet, un bar à chicha situé boulevard Paul Montel, dans le quartier des Moulins à Nice. Dans sa main droite, un pistolet automatique.

Parmi les habitués qui discutent et jouent aux cartes, c’est tout à coup le silence. L’individu semble chercher quelqu’un. L’ayant trouvé en la personne de Vitor, il tire à trois reprises. La victime s’effondre. Le tireur tente de lui porter 4 nouveaux coups. Mais son arme ne fonctionne pas.

Une minute et vingt-sept secondes après être entré dans le bar, il quitte les lieux en courant, selon les images des caméras de surveillance de la ville de Nice. La victime, quant à elle, est relevée puis conduite dans une clinique de Saint-Laurent-du-Var. Vitor s’en tire avec 8 jours d’ITT.

Renseignements anonymes et vengeance

Interrogée par les enquêteurs, la victime affirme ne pas comprendre pourquoi il a été la cible du tireur, « n’ayant de problème avec personne ».

Alors que l’enquête semble au point mort, un renseignement anonyme rapporte que l’auteur des coups de feu n’est autre qu’un certain « Berdiane », que Vitor aurait gravement blessé il y a plusieurs années, dans le même quartier des Moulins. « Tambour » aurait également tué en 2015, un ami de « Berdiane » surnommé « Guinée », toujours aux Moulins.

Dix ans plus tard, voilà l’heure de la vengeance venue ? C’est ce qu’affirment plusieurs témoins et la victime, qui est revenue, entre-temps, sur ses premières déclarations.

Après quelques recherches, les enquêteurs établissent que « Berdiane » n’est autre que Joao, alias José, interpellé en novembre 2018 dans le cadre d’un mandat européen pour des faits de meurtre, délivré par les autorités belges. Sept jours après les tirs au Dream Gourmet, l’homme est interpellé.

Doudoune, match à l’Ariane

Pendant toute cette semaine, témoins, experts et enquêteurs repasseront les faits à la loupe. Devant la cour et les jurés, les enquêteurs de police ont détaillé ce lundi leur travail, décrivant la difficulté à obtenir des témoignages, dans un milieu où l’on préfère se taire plutôt que de « passer pour une balance ».

Une enquête que la défense n’a pas manqué de dénoncer, parfois de manière virulente. « Quand vous dites « c’est évident », ne vous éloignez-vous pas de l’impartialité ? », a demandé maître Yassine Maharsi au commandant de police responsable de l’enquête, regrettant, au passage, que dans ce dossier, de nombreux détails n’aient pas été creusés. Comme le sac à dos du tireur, jamais retrouvé, ou encore que tous les témoins présents dans le Dream Gourmet n’aient pas été sollicités. Une tâche qui aurait semblé bien difficile.

Ce lundi, alors que la présidente de la Cour expliquait le déroulé de la semaine et qu’étaient énumérés les témoins appelés à comparaître, il est apparu que beaucoup manquaient à l’appel voire restaient injoignables. Et la défense, laconique, de décompter : « Huit témoins absents sur quatorze ». Voilà, en effet, qui fait beaucoup.