Propriétaire de nombreux crus bordelais, Philippe Castéja aborde la crise actuelle avec optimisme.
Guillaume de Laubier/SDP
Philippe Castéja, propriétaire de plusieurs domaines à Bordeaux, porte un regard relativement optimiste sur le futur du vignoble.
Une des forces de Bordeaux réside dans sa souplesse face aux changements, climatiques ou économiques, et dans sa capacité à continuer à s’inscrire dans le temps long à une époque où chacun réagit de façon hystérique à l’annonce la plus anodine. «Nos marchés connaissent des phases compliquées», reconnaît Philippe Castéja. Les mots sont pesés et la réflexion mérite attention, venant du président de la Société Borie-Manoux S.A, aussi président du Conseil des Grands Crus Classés 1855 Médoc et Sauternes, propriétaire de Château Batailley, Château Lynch-Moussas, à Pauillac, Château Beau-Site à Saint-Estèphe, mais aussi, sur la rive droite, Château Trottevieille, Château du Domaine de l’Église et Château La Croix du Casse.
Avec recul, il analyse les grands marchés de Bordeaux, à commencer par la Chine «qui nous avait permis d’amortir le choc de la crise des subprimes en 2008, en absorbant les stocks. Le ralentissement a débuté avec la crise du Covid. La mésentente entre l’Australie et la Chine, en 2021-2022, a joué en notre faveur, mais, depuis 2024, ce marché s’est rouvert à l’Australie et a libéré les stocks de vins australiens. Les interdictions d’offrir des vins et spiritueux nous sont aussi défavorables. La Chine reste importante, mais elle représente la moitié de ce qu’elle pourrait être […] Mais il faut noter, là-bas comme ailleurs, au Japon par exemple, le passage de marchés de mode à des marchés de consommateurs. Ce qui est positif.» Philippe Castéja envisage l’avenir avec une relative sérénité. «De nouvelles affaires se développent, au Vietnam, en Thaïlande…»
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Le long terme a un sens
Depuis longtemps, l’Inde est dans le viseur de Bordeaux : «Nous allons trouver un accord douanier, sans doute un taux de douane oscillant entre 10 et 20 %, qui permettrait à tout le monde de s’en sortir.» Il évoque avec prudence Dubaï, met l’accent sur la manne des compagnies aériennes pour les vignobles disposant de volumes. Quant aux États-Unis, pays le plus important, ils auraient atteint «le pic de consommation.» «Après douze années d’euphorie, nous vivons une période plus difficile. En ce moment, aucune appellation ne tire son épingle du jeu», dit-il. Mais il reste calme. Il faut visiter le caveau de Château Trottevieille, découvrir les formidables réserves de chaque millésime mises de côté par la famille pour comprendre qu’ici, comme dans la plupart des grandes propriétés viticoles, le long terme a un sens. «Oui, en ce moment, la consommation diminue. Mais on note toujours autant d’intérêt pour nos vins !»