Il y a des week-ends où le passé remonte à la surface comme une bulle d’or dans une pinte. À Maxéville, cet automne, le site des anciennes brasseries retrouve son effervescence. Sous le titre « Un Automne aux Brasseries », la commune rend hommage à un patrimoine qui fit jadis sa fierté : celui des Grandes Brasseries de Maxéville, actives entre 1857 et 1942, et dont la renommée dépassa longtemps les frontières de la Lorraine. La redécouverte des brasseries commence par une histoire de passion. Pendant plus de vingt-cinq ans, Pierre Forcher, collectionneur lorrain et ancien habitant du quartier, a rassemblé tout ce qui pouvait témoigner de cette aventure industrielle : affiches publicitaires, plaques émaillées, verres, cartes postales et documents d’époque. À force de patience et de chine sur les brocantes, il a constitué un ensemble d’une valeur patrimoniale inestimable. En 2020, une rencontre fortuite entre le collectionneur et la Ville scelle le destin de ce trésor : Maxéville acquiert la collection pour la préserver et la partager.

Une collection exceptionnelle

Avec plus de 200 pièces datées de 1890 à 1947, elle retrace l’âge d’or de la bière maxévilloise, quand la production locale s’exportait jusqu’en Amérique du Sud. Les affiches signées des artistes Victor Idoux et Eugène Ogé incarnent l’art de la réclame à la Belle Époque, entre typographies élégantes, humour et couleurs vives. Les Grandes Brasseries de Maxéville ont profondément marqué la vie ouvrière et économique de la région. De la rue de Metz à la rue Gambetta, des centaines d’ouvriers y brassaient des milliers d’hectolitres de bière dans un complexe industriel tentaculaire. Entre 1898 et 1914, leur production remporta de nombreuses médailles et symbolisa le dynamisme d’une Lorraine en pleine modernité. Aujourd’hui, il ne reste que quelques vestiges – une cheminée, quelques murs – mais la mémoire du site renaît à travers deux expositions : « Extra Blonde », au Préau de l’Inspé de Lorraine, dédiée à la réclame et à l’image, et « La Maxéville », aux Archives départementales, retraçant l’histoire architecturale du quartier.

Dans cet élan de transmission, la Ville a commandé trois œuvres contemporaines : Capsule — un bouchon couronne géant en marbre — de Jean-Guy Lattraye, Houblon de Yannick-Llwyt, et une installation vidéo et sonore signée Sophie Houot et Joël Defranoux. Ces créations font dialoguer la mémoire industrielle et la création actuelle, comme un pont entre deux époques. Enfin, la Fondation du Patrimoine a lancé une collecte de dons pour soutenir la restauration et la valorisation de la collection, afin d’en assurer la pérennité.

Depuis 2020, Maxéville s’est engagée dans la réhabilitation du site des brasseries, où la collection trouvera bientôt sa place permanente. Le grand week-end d’octobre en sera le prélude : visites guidées, concerts et expositions viendront rappeler qu’ici, jadis, la bière faisait battre le cœur de la ville. Aujourd’hui, c’est la culture qui reprend le flambeau, et à Maxéville l’histoire continue de mousser.