Faute d’accord entre les représentants des organisations patronales et syndicales qui le composent, l’Agirc-Arrco ne revalorisera pas ses pensions au 1er novembre. Le régime ne modifiera pas non plus la valeur d’achat du point au 1er janvier 2026.
Coup dur pour les quelque 14 millions de retraités du privé. Les pensions complémentaires des ex-salariés du privé ne seront pas revalorisées au 1er novembre, «faute d’accord» entre les syndicats et le patronat qui gèrent le régime, a annoncé vendredi l’Agirc-Arrco, après une séance tendue selon plusieurs sources, sur laquelle planait la suspension de la réforme des retraites.
Chaque année, les représentants du personnel et des employeurs se réunissent pour déterminer le taux d’évolution, qui doit tenir compte des prévisions d’inflation, de la conjoncture économique et des réserves du régime. Sans accord, la règle veut qu’elles ne soient pas revalorisées. L’année dernière, les pensions avaient été revalorisées de 1,6% au 1er novembre 2024.
«Ce 17 octobre, faute d’accord entre les représentants des organisations patronales et syndicales qui le composent, les retraites complémentaires Agirc-Arrco ne seront pas revalorisées au 1er novembre. La valeur d’achat du point Agirc-Arrco ne sera pas modifiée au 1er janvier 2026», écrit ce régime, l’Agirc-Arrco, dans un court communiqué vendredi.
La suspension de la réforme des retraites tend les débats
Le calcul des partenaires sociaux doit garantir, sur les quinze prochaines années, l’équilibre financier de l’Agirc-Arrco. Selon sa règle d’or, le régime doit avoir «à tout moment, au moins six mois de versements des pensions». Les réserves de l’Agirc-Arrco s’élèvent aujourd’hui à plus de 85 milliards d’euros.
En vertu d’un accord paritaire signé en 2023 pour la période 2024-2026, le conseil d’administration est supposé sous-indexer la revalorisation, en retranchant à l’inflation 0,4 point. Mais il a une certaine latitude: en fonction de la santé du régime, il peut élever ce taux jusqu’à hauteur de l’inflation. Avec une inflation estimée à 1% pour 2025 par l’Insee, les partenaires sociaux pouvaient ainsi choisir cette année un taux d’évolution compris entre 0,2% et 1%.
Arguant de la bonne santé du régime et d’un choc qui s’annonce pour les retraités, avec le projet du gouvernement de «geler» les pensions de retraite de base en 2026 pour faire des économies, les syndicats espéraient s’approcher au maximum de 1%. Mais la promesse de Matignon de «suspendre» la réforme des retraites jusqu’à la présidentielle, qui hérisse le patronat, est venue compliquer l’équation et tendre les débats.
Selon plusieurs sources présentes, les organisations patronales ont proposé la revalorisation minimale, soit 0,2%, et campé sur leurs positions, arguant de l’instabilité et des incertitudes économiques. Les syndicats ont eux refusé ce taux qu’ils jugeaient «inacceptable».
Une revalorisation à 0,6% aurait été «soutenable» selon la CFDT
Dans un communiqué, la CFDT pointe la «responsabilité du patronat» dans l’échec des négociations. Le syndicat réformiste estime que la revalorisation de «0,2%» proposée par le patronat était «totalement injustifiable». «Les projections financières montrent qu’une revalorisation à 0,6% était totalement soutenable. Avec une telle revalorisation, l’Agirc-Arrco restait financièrement à l’équilibre pour les 15 années à venir, avec des réserves continuant à croître», explique la CFDT.
Et d’ajouter, cinglant : «Au moment où il est question de confier plus de responsabilités aux partenaires sociaux dans la gestion des retraites, le patronat fait après le conclave et, pour la seconde fois en 2025, la démonstration qu’il n’en est pas à la hauteur.»