De notre envoyé spécial en Lassallie,
A l’entrée du théâtre de la tour Eiffel, un petit stand vend toute sorte de babioles à l’effigie de la star du soir. Livres politiques de Jean Lassalle, bien sûr, mais aussi affiches de Jean Lassalle, bérets de Jean Lassalle, T-shirts et sweats avec la trogne de Jean Lassalle. Le public venu assister à la première parisienne du one man show est conquis d’entrée.
Et cela se confirme quand le colosse du Béarn débarque sur scène. Le double candidat à la présidentielle salue la foule et lance en parodiant de Gaulle : « Paris occupé ! Paris martyrisé ! Paris outragé, mais Paris libéré… Moi, je suis venu vous dire, beaucoup plus modestement, comment j’ai découvert Paris à mes 18 ans… »
Gouaille et anecdotes
L’ancien député centriste des Pyrénées-Atlantiques, qui a quitté (pour l’instant) le monde politique après sa défaite aux législatives 2024, évoque donc son arrivée dans la capitale, qui se confond finalement avec celle de son grand-père berger. « Il était venu pacager les moutons sur le Champs-de-Mars ». Puis Mai 1968 : « Mon père s’était dit qu’il faudrait des bras chez nous, à cause de la désertification des campagnes. Alors, quand il avait vu les gaillards de mai 1968 qui retournaient des bagnoles, il disait : « voilà ce qu’il nous faut ! » » On peine à suivre quand Lassalle évoque à tour de bras les Brigades rouges, la bande à Baader, Action directe, le commandant Massoud, des bergers et des pêcheurs…
Le public s’amuse plus aisément lorsque, avec sa gouaille légendaire, il dépeint sa conception dans les hautes montagnes du Béarn et sa naissance. « Maman a mis neuf jours à me mettre au monde. On me dit souvent « comment ça se fait que vous soyez toujours en retard ? » Je leur dis : je pense que ça vient de trop loin pour que je puisse vous le dire ».
A 70 ans, l’homme politique n’a rien perdu de la verve qui amusait déjà ses collègues dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Il se moque de lui-même lorsqu’il évoque ses « tests psychologiques » à l’école : « Enfant ne présentant aucun intérêt. Son regard, si par bonheur vous le croisez, n’exprime rien. Point ! Quant à son QI, il doit être très proche ou voisin de zéro ».
« J’avais le sentiment de ne plus servir à rien »
A 13 ans, il est fasciné par le maire de sa commune. Et en 1977, le fils de berger raconte comment il réussit à se faire élire à 21 ans, devenant l’un des plus jeunes maires de France, dans son village natal de Lourdios-Ichère. « Je demande à tous ceux qui voudraient former un gouvernement de m’écouter attentivement, je veux dire un gouvernement qui pourrait durer un peu plus de 36 heures… Moi, j’avais pris l’habitude de convoquer mes colistiers tous les soirs car j’avais peur qu’ils passent à la concurrence ! » La description de son premier enterrement en tant qu’élu, qui voit deux curés blessés tomber au sol, ou de son voyage à Moscou où, après quelques verres de vodka avec des Russes, il est invité à chanter au Bolchoï devant Brejnev avec le cœur de l’Armée rouge, séduit son public.
Les dernières actus sur Jean Lassalle
Les anecdotes burlesques s’enchaînent, s’entremêlent, parfois dans la confusion. A la fin du spectacle, Jean Lassalle remercie les médecins qui l’ont soigné après son opération du cœur en 2022, qui l’avait empêché de se présenter aux législatives cette année-là. « J’ai alors sombré dans une forme de nullité, j’avais le sentiment de ne plus servir à rien », reconnaît-il. L’écriture du spectacle, terminé il y a un moins seulement, l’a finalement sauvé. Jean Lassalle a prévu 12 représentations à Paris, avant une tournée dans toute la France, en 2026. De quoi l’aider, aussi, financièrement ?
En novembre 2024, Jean Lassalle avait indiqué avoir accumulé « un million et demi » d’euros de dettes après ses échecs aux européennes et aux législatives. Ce sont d’ailleurs ses fils qui ont lancé la marque de vêtements, proposés à l’achat au théâtre et sur un site internet. A la sortie, un groupe de jeunes fait le bilan de la soirée : « C’était génial. Au début, j’ai eu très peur. C’est pas un sketch d’humour, il nous raconte sa vie, mais c’est très drôle », s’amuse l’un d’eux. « C’était décousu et sur 2 heures de spectacle, y’a 30 minutes que j’ai pas compris. Mais à chaque fois qu’il sortait une expression, je chialais de rire ».