« L’Allemagne a besoin d’un tournant africain – et c’est maintenant ». C’est ce que préconise un rapport publié le 15 octobre dernier par l’Initiative Afrique subsaharienne de l’économie allemande (SAFRI), principal organe de coordination du secteur privé allemand pour la région.

D’après le document, ce virage s’impose alors que le protectionnisme des États-Unis se renforce et que l’influence de la Chine, notamment dans le secteur des minerais critiques, ne cesse de s’affirmer.

« Les dépendances unilatérales à l’égard des importations, en particulier celles provenant de Chine, comportent des risques considérables : aujourd’hui déjà, les arrêts des exportations chinoises entraînent une baisse de la production en Allemagne et menacent ainsi l’industrie européenne », indique le rapport. 

Face à ses évolutions, les auteurs soulignent que les décideurs allemands ont tout intérêt à se tourner vers le continent africain pour non seulement diversifier leurs sources d’approvisionnement en matières premières, mais aussi tirer le meilleur parti des opportunités qui s’y annoncent.

Changer de paradigme

Si dans la première puissance de la zone euro, les débats à propos de l’Afrique continuent de tourner autour des risques liés à l’investissement et à l’aide au développement, les auteurs estiment que le continent est l’un des principaux pôles de croissance au monde, affichant des avancées sur le plan industriel et technologique.

Dans un tel contexte, ceux-ci appellent les acteurs allemands à un changement de paradigme qui suppose désormais de considérer l’Afrique comme un « marché stratégique d’avenir » afin d’y établir des partenariats et bénéficier de nouveaux relais de croissance. Selon le rapport, un nouveau cadre de coopération Allemagne-Afrique peut s’appuyer sur plusieurs axes stratégiques.

Il s’agit notamment de la conclusion d’accords de partenariats bilatéraux dans les matières premières critiques comme le lithium, le cuivre et le cobalt en impliquant les entreprises allemandes, ainsi qu’un renforcement du soutien du gouvernement allemand à l’intégration régionale et à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). A cela s’ajoute, d’après les auteurs, la mise sur pied de programmes de transfert de technologies et de partenariats de compétences à travers notamment la création de centres germano-africains de technologie et de formation.

Des échanges commerciaux encore en demi-teinte

Cette recommandation du rapport sur l’amélioration de la coopération entre l’Allemagne et l’Afrique intervient dans un contexte où les échanges restent faibles entre les deux partenaires.

Selon les données de la plateforme TradeMap du Centre du commerce international (ITC), les exportations allemandes vers l’Afrique ont atteint 28,4 milliards $ en 2024, soit 1,7 % de ses ventes globales avec pour principaux marchés l’Afrique du Sud, l’Egypte, le Maroc, l’Algérie et la Tunisie. D’un autre côté, ses importations depuis le continent africain se sont élevées à 34,4 milliards $ durant l’année écoulée (2,4 % de ses achats totaux dans le monde).  

Sur ces dernières années, il faut noter plusieurs initiatives portées directement par le gouvernement ou des institutions financières pour renforcer la présence de la première économie de l’UE sur le continent africain.  

En septembre 2023, le pays annonçait son intention de mobiliser 450 millions d’euros de nouveaux financements climatiques axés sur les énergies renouvelables en faveur de plusieurs pays africains. Plus récemment le 8 octobre dernier, le Sénégal et l’Allemagne ont signé un accord financier de 17 millions d’euros pour le projet de promotion de la formation professionnelle et de l’emploi (PFPE 2).