L’ESSENTIEL

  • Laure a été diagnostiquée avec un cancer du sein en aout 2020.
  • La chimiothérapie et l’isolement liée à la Covid-19 ont été particulièrement difficiles pour elle.
  • Comme Laure, 20 % des anciens malades de cancer présentent après la maladie des symptômes de dépression ou d’anxiété.

En juillet 2020, Laure alors âgée de 44 ans, sent une boule sur le haut de l’un de ses seins. Faisant des kystes régulièrement et sortant d’une importante endométriose adénomyose avec une hystérectomie, cette découverte ne l’a pas immédiatement inquiétée.

« Je me suis dit : encore un kyste. Ça va partir, ce n’est pas grave. Mais, la boule ne partait pas et surtout elle ne bougeait pas comme d’habitude », se souvient Laure. Elle a alors appelé sa gynécologue. « Comme elle connaissait mon parcours, elle m’a tout de suite dirigée vers une échographie et une ponction. Et voilà, j’avais coché la case : cancer du sein. »


Cancer du sein : « j’étais terrifié, mais j’ai aussi tout de suite pensé : comment je vais le dire à mes parents »

« Jambes coupées » sont les termes qui décrivent le mieux l’état de sidération de la quadragénaire sans antécédents familiaux face au diagnostic de cancer du sein, tombé début août. Laure a eu peur… mais pas seulement pour elle. « Lors du diagnostic, j’étais terrifié, c’est sûr, mais j’ai aussi tout de suite pensé : comment je vais le dire à mes parents et à mes sœurs. » La situation n’était pas plus simple pour son conjoint. Parti en voyage, il était difficilement joignable. « Avant son départ, on s’était dit que je l’appellerais uniquement en cas d’urgence. Et là, je me suis dit : ce n’est pas possible que je l’appelle, il va savoir qu’il y a quelque chose de grave ».

L’annonce du cancer du sein a été suivie d’incertitudes stressantes. « Le début – après le diagnostic et avant les traitements – est très angoissant, je trouve… parce qu’on ne sait rien. Il ne faut pas s’inquiéter pour ne pas envenimer les choses. Mais, on est face à l’inconnu. C’est vraiment une période compliquée. »

Mais rapidement, un protocole pour combattre ce crabe a été établi par l’équipe médicale de l’hôpital européen Georges Pompidou qui l’avait prise en charge : deux types de chimiothérapie, une opération et une radiothérapie.


Chimiothérapie : « Manger, même respirer semblait une épreuve »

Pour éviter une mastectomie totale, la chimiothérapie a été la première arme utilisée contre la tumeur mammaire maligne. Et si Laure s’est lancée dans ses premières séances, combative, elle reconnaît que la bataille a été rude. « La première chimio, quatre injections à trois semaines d’intervalle, m’a ravagée avec une intensité inouïe au point que je me demandais si le traitement n’allait pas me tuer. Cela a été d’une violence extrême. Manger, même respirer semblait une épreuve. Je me sentais aspirée vers le bas, vidée de toute énergie ». À cela s’ajoutaient aussi des palpitations, un goût métallique persistant dans la bouche, la perte des cheveux, des cils et des sourcils ainsi qu’une fatigue chronique intense. « Ça a été tellement violent que j’ai eu peur de mourir. »

Pour faire face aux effets secondaires et au stress, Laure a entre autres utilisé la sophrologie. « Comme j’ai une formation de sophrologue, je faisais beaucoup de respiration et de visualisation. Je faisais les gestes d’un combat de boxe. Je castagnais vraiment la tumeur », s’amuse-t-elle.

Heureusement, ce traitement ainsi que la seconde chimiothérapie « plus supportable » ont eu les effets escomptés. Une tumorectomie a pu être programmée comme prévu. « Ils ont bien gratté la tumeur et je n’ai même pas eu besoin de reconstruction mammaire. »


Cancer pendant la pandémie : « Face à la Covid-19, je m’étais mis une armure »

Durant ce parcours thérapeutique, Laure a fait face à une difficulté sans précédent : la pandémie de la Covid-19. « Ce cancer du sein, je l’ai eu pendant la Covid-19. J’étais ainsi très isolée. À part mon conjoint, ma famille et mes proches ne pouvaient pas vraiment être à mes côtés. Je ne pouvais pas trop sortir ou voir les gens. C’était super dur. »

En plus de l’isolement, elle était confrontée à un climat particulièrement anxiogène : le décompte des morts dans les journaux, le risque d’être infecté…. « Je m’abstenais de regarder la télé pour éviter ces informations. C’était trop pour moi. Face à la Covid-19, je m’étais mis une armure. Je résistais comme je pouvais. »

Et finalement, le moment tant espéré – la victoire sur le cancer – est arrivé. Mais le franchissement de la ligne d’arrivée reste teinté d’une grande prudence. « Il n’y a pas de grande annonce des médecins : “vous êtes guéri”. Ils sont sur la réserve pendant tout le traitement. Ils disent que cela avance bien, mais c’est tout », se souvient Laure. « Ce n’est vraiment qu’à la fin de la radiothérapie où mon oncologue m’a dit : Madame, vous pouvez boire une coupe de champagne. Ça a été le soulagement et j’en ai même bu deux. »








Après-cancer et dépression : « Ça m’est tombé dessus d’un coup »

Pour s’assurer que le cancer du sein reste dans le passé, Laure a revu son mode de vie. Pas de tabac, pas d’alcool – si ce n’est « une goutte de champagne » de temps en temps – une alimentation bio, du télétravail…. « Je bouge beaucoup plus aussi. Avec l’hormonothérapie qui a été prolongée, j’ai dû renoncer à certains sports, car je suis facilement fatiguée, mais je marche beaucoup. Je fais du yoga aussi », explique Laure.

Elle a également concrétisé un projet qu’elle avait de longue date avec son conjoint : quitter la ville pour vivre à la campagne. « C’est une vie beaucoup moins stressante. J’ai trouvé un équilibre que je n’avais pas avant ».

Mais, l’après-cancer n’a pas été uniquement soulagement, renouveau et bien-être. Laure a été rattrapée par les épreuves traversées. « Comme j’étais en mode combat, j’ai emmagasiné plein de choses et mon cerveau les a mises dans des cases qui n’étaient pas les bonnes. Et j’ai fait une dépression, il y a deux ans. C’était comme un coup de grosse fatigue. Ça m’est tombé dessus d’un coup. » 

Il n’est pas rare que les anciens patients atteints de cancer rencontrent ce genre de difficulté. On estime qu’environ 20 % d’entre eux souffrent d’anxiété ou de dépression. Laure s’est “prise en main” et s’est fait soigner. Une psychologue qui pratique l’EMDR et une psychiatre l’ont aidée à comprendre l’origine de ses angoisses et comment les surmonter. « Ça va beaucoup mieux maintenant. »


Octobre Rose : « Le cancer du sein est le cancer le plus meurtrier chez les femmes »

S’il faut faire attention toute l’année, Octobre Rose est une bonne occasion pour faire “une piqûre de rappel” sur l’importance de l’auto-palpation, de la prévention et du dépistage du cancer du sein, estime Laure. « Il ne faut pas oublier que le cancer du sein est le cancer le plus fréquent et le plus meurtrier chez les femmes », souligne-t-elle.

En effet, une femme sur 8 développe une tumeur mammaire maligne au cours de sa vie. Et si le risque est plus élevé chez les 50 et 74 ans, de plus en plus de jeunes femmes – comme Laure – sont touchées. Une récente étude a révélé qu’en France les cas avaient augmenté de +63 % chez les trentenaires et 33 % chez les quadragénaires qu’au cours des trente dernières décennies.

Cinq ans après son diagnostic et son combat, Laure tient également à souligner le travail des professionnels de santé de l’hôpital Pompidou qui se sont occupés d’elle. « Ils ont été extraordinaires. Il y avait une grande bienveillance. Même avec la Covid-19, je n’ai jamais ressenti leur stress et ils étaient très présents ». Et à toutes celles qui traversent actuellement l’épreuve du cancer du sein, Laure a un conseil : « Il faut penser à soi, s’entourer de personnes bienveillantes… et sortir les gants de boxe. »