Un policier municipal a été révoqué en juillet après avoir rapporté, selon lui, de nombreux dysfonctionnements et propos racistes dans sa brigade. Mardi, le maire a tenu à rétablir «sa» vérité, en dénonçant de la «politique politicienne».
Rétablir la vérité face aux mensonges, telle était la volonté de Joseph Segura, maire de Saint-Laurent-du-Var (Alpes-Maritimes), lors de la conférence de presse organisée mardi. La même volonté que celle qui anime Jean-Louis Perrier, policier municipal révoqué en juillet dernier, après plus de vingt ans de carrière. «J’ai rapporté des faits à ma hiérarchie et j’ai été puni. Si je ne l’avais pas fait, j’aurais été puni aussi», assure-t-il.
Que s’est-il passé au sein d’une des quatre brigades de la police municipale dans cette ville près de Nice ? «J’y étais depuis huit ans», relate Jean-Louis Perrier. «Tout s’est dégradé à partir de 2020. J’ai demandé un avis à ma hiérarchie – rapporté, pas dénoncé – car je constatais des manquements, des dysfonctionnements», assure-t-il. Le quadragénaire assure également avoir été «rabaissé en permanence, car je suis issu d’une minorité, celle des gens du voyage.»
Dysfonctionnements et propos racistes
Il enverra des dizaines de mails, certains alertant sur un «dépassement des prérogatives, des débordements». «Je me suis dit qu’on ne pouvait pas laisser passer», insiste-t-il. D’après nos informations, il s’agirait notamment d’un passage à tabac, qui serait survenu en janvier 2025, au cours d’une interpellation, pendant laquelle un jeune homme menotté à l’arrière d’une voiture de police aurait été frappé. «Un voyou», se défend le maire (LR), lui-même ancien policier. « Il venait d’être maîtrisé lors d’une intervention après un signalement par deux femmes qui avaient appelé les secours. Il n’a par ailleurs pas déposé plainte.»
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Jean-Louis Perrier évoque en outre des faits de discrimination et des propos racistes de la part de ses collègues. «C’était tout le temps, et sous prétexte de soi-disant blagues. La goutte d’eau, ça a été quand, après avoir demandé pendant deux ans des chaussures qui font partie du matériel de dotation des agents, j’en ai reçu une paire, d’occasion et avec des poils d’animaux dedans. C’était trop», se remémore-t-il avec émotion.
En conférence de presse, le maire de Saint-Laurent-du-Var est revenu méthodiquement sur les «deux enquêtes administratives distinctes» ouvertes à ce sujet. «Tous les agents ont été auditionnés. Les conclusions sont nettes : les accusations de racisme n’ont pas pu être matériellement établies au regard des témoignages recueillis», maintient l’édile. «Seules quatorze personnes sur quarante ont été interrogées, certaines avec qui je ne travaillais même pas», rétorque Jean-Louis Perrier. «En revanche, un harcèlement d’ambiance a été caractérisé dans un climat de tension suscité par plusieurs dénonciations contre des collègues avec l’intention de les nuire», continue le maire à propos de son ancien policier.
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Un conseil de discipline, en juillet 2025, a donc été saisi, présidé par un magistrat et composé d’élus et de représentants du personnel, à nombre égal. À son issue, la révocation de Jean-Louis Perrier a été décidée, ainsi que la mise à pied d’un second agent, puis un avertissement envers le policier municipal accusé de faits de violence au cours d’une intervention. «Il n’y a pas eu de tirage au sort des jurés de la commission», conteste le principal intéressé, qui parle à plusieurs reprises d’une «impression de cabale» contre lui et qui a déposé un recours en ce sens auprès du tribunal administratif de Nice. «C’était plus facile de virer quelqu’un que de changer le comportement de plusieurs», grince-t-il avec ironie. «L’ambiance est bien meilleure parmi les agents, tout le monde l’a constaté», contre-attaque Joseph Segura, qui a d’ailleurs porté plainte pour «menaces de mort» en début de semaine, après un appel anonyme reçu au centre de supervision urbain lui «promettant de s’occuper de lui».
«Je ne veux qu’une chose : rebondir. J’aime ce métier, je l’ai choisi par conviction, affirme Jean-Louis Perrier. Je ne demande même pas d’indemnités. Je veux juste retrouver mon poste et mon honneur». De son côté, le maire dit ne pas souffrir que «des hommes et des femmes d’honneur, qui font un travail remarquable et qui respectent le droit, soient salis.» Et de répéter qu’il ne «veut pas que le mensonge s’installe». L’édile attribue enfin cette affaire, qui n’est pas sans faire écho à celle du groupe WhatsApp (où des policiers municipaux «fichaient» des délinquants, NDLR), à de la «politique politicienne». Et de pointer le soutien de Patrick Villardry, élu d’opposition et candidat à la mairie de Saint-Laurent-du-Var et lui-même à l’origine de la découverte du scandale du fichage, au policier révoqué. «Je n’accable pas le maire et je ne veux pas faire le buzz», martèle pour sa part l’ancien premier adjoint de la Ville. «Ni d’ailleurs les policiers municipaux. Mais quand les choses sont mal faites, il faut le dire».