Par
Martin Arrot
Publié le
25 oct. 2025 à 14h40
Depuis le début du mois d’octobre, une étrange sculpture est en cours d’installation sur la Presqu’île de Caen (Calvados), près du tribunal judiciaire, non loin du port et de la bibliothèque Alexis-de-Tocqueville. Il s’agit de Molecular Cloud, une œuvre pour le Millénaire de Caen signée du Normand Vincent Leroy, ayant fait une partie de ses études à Caen.
Passé par le lycée technique Laplace à Caen
Avant d’exposer ses œuvres à Séoul, New York ou encore Singapour, l’histoire de Vincent Leroy commence loin des galeries parisiennes, dans une petite ferme du sud de la Manche. Fils de deux parents agriculteurs, il occupe ses journées à bricoler avec les différents matériaux qu’il trouve.
Quand tu es à la campagne, tu as de l’espace, du temps et des matériaux, donc tu fais bosser ton imagination.
Vincent Leroy
C’est ainsi qu’il fabrique plusieurs jouets, un planeur ou encore un char à voile. Mauvais élève, il se retrouve à Caen (Calvados) au lycée technique Laplace. Après sa formation, il tâtonne, « je ne savais pas trop quoi faire de ma vie ». Il se rend alors à l’espace orientation de l’université de Caen. Un peu par hasard, il tombe sur une brochure d’une école de design parisienne. C’est la révélation : « ça décrivait exactement ce que je faisais petit, dans la ferme de mes parents. »
Vincent Leroy, l’artiste normand qui crée Molecular Cloud, une sculpture intrigante sur la Presqu’île de Caen (Calvados). ©Vincent Leroy« Que la municipalité de Caen me demande de créer quelque chose, c’est touchant »
Il se rend alors à Paris, à l’Ecole Nationale Supérieure de Création Industrielle. À peine arrivé dans la capitale, il se fait connaître avec ses premières créations, des mobiles motorisés fabriqués avec des rebuts de matériel scientifique. C’est un succès. Il en vend plus de 300, ce qui lui permet de financer ses études et d’obtenir des premiers contacts dans le monde de l’art.
Depuis ses 25 ans, Vincent Leroy expose dans le monde entier – en Chine, aux États-Unis, en Europe,… et collabore avec des marques de luxe telles qu’Yves Saint-Laurent. Malgré tout, lorsqu’il reçoit un mail de la mairie de Caen, il est surpris.
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Je pensais que c’était un spam. Ils voulaient me rencontrer pour que j’expose dans le cadre du millénaire de la ville. Que la municipalité me demande de créer quelque chose, c’est touchant.
Vincent Leroy
Molecular Cloud, une œuvre inspirée de la ville et née d’un « chemin artistique »
Imaginer une œuvre pour la Ville de Caen n’a pas été simple. Mais Molecular Cloud est né d’un constat. « J’étais en voiture sur l’A13 et je me suis fait une remarque. Les nuages en Normandie sont plus bas qu’à Paris ». Deux idées se rejoignent ensuite. Plus jeune, la ville lui apparaissait comme scientifique et la municipalité avait la volonté de propager Caen dans le futur. L’idée lui est alors venue de donner cet aspect moléculaire à un nuage, pour créer une œuvre alliant science et poésie.
Une étrange sculpture prend vie actuellement sur la Presqu’île de Caen. ©Martin Arrot
La version de « Molecular Cloud » qui sera exposée à Caen n’est pas la première. Une autre avait été présentée au festival de musique californien de Coachella en 2023, puis à la Design Foundation de Séoul en 2025. Contrairement à ces versions « mobiles et temporaires », celle de Caen sera pérenne.
Une sculpture qui sera pérenne à Caen, derrière le port
Ces deux premières esquisses constituent le chemin artistique de Vincent Leroy. À chaque œuvre, il réfléchit à ce qu’il peut modifier, améliorer, ajouter…
Tu ne fais pas une œuvre et tu repars sur autre chose derrière, ce n’est pas comme ça que ça fonctionne, tu cultives ton chemin.
Vincent Leroy
C’est ainsi qu’il a affiné sa vision pour arriver à l’œuvre qui sera exposée à Caen. Il a notamment appris que les spectateurs jouaient avec les nombreux reflets sphères et accordaient une importance à la vision du dessous. Il a alors eu l’idée de percer un petit trou en dessous de chaque sphère. Au-delà de l’avantage technique, cette ouverture permettra aux Caennais d’observer le ciel à travers l’œuvre, leur offrant alors une seconde lecture, plus aérienne.
L’œuvre monumentale Maolecular Cloud, du Normand Vincent Leroy, s’installe sur la Presqu’île ambitionne de devenir le miroir de la ville. ©Vincent LeroyUne œuvre vivant au rythme de Caen
Molecular Cloud prendra place sur la Presqu’île de Caen, un lieu choisi d’un commun accord entre la mairie et l’artiste. La municipalité avait la volonté de poursuivre la valorisation de cette nouvelle zone urbaine. Vincent Leroy a tout de suite été séduit par l’idée, « pouvoir redonner vie à cette ancienne zone industrielle, c’est génial ».
L’œuvre s’installe donc sur la grande pelouse, « un peu vide » selon l’artiste, mais idéalement située grâce à sa richesse visuelle. Elle réunit à elle seule le passé, avec l’Abbaye-aux-Dames visible au loin, la modernité des nouveaux bâtiments de la Presqu’Île et la sérénité du canal.
Selon l’endroit où l’on se trouve, la perception de l’œuvre sera différente. De l’autre côté du canal, depuis les rues adjacentes, l’œuvre apparaîtra de manière inattendue, au détour d’un regard. À l’inverse, depuis certains points dégagés, on l’apercevra de loin, tel un diamant scintillant.
La sculpture Molecular Cloud est en cours de montage sur la Presqu’île, dans le cadre du Millénaire de Caen (Calvados). ©Christophe JacquetQue l’installation devienne le miroir de la ville de Caen
L’artiste souhaite que son installation devienne le miroir de la ville. Les sphères refléteront les couleurs du ciel – au lever du jour, à midi ou au coucher du soleil. Aucun spot lumineux ne sera installé à proximité : « Le but c’est que ce soit la ville qui l’éclaire », explique l’artiste. La nuit, la vie nocturne caennaise se reflétera donc dans ces nuages. « C’est un choix osé mais la municipalité a adhéré », confie Vincent Leroy.
À travers cette installation, Molecular Cloud ambitionne de devenir un point de repère pour les habitants, une œuvre vivante, évoluant au rythme du ciel et de la ville. Et c’est avant tout ce que l’artiste cherche à exprimer : créer des œuvres immersives, empreintes de rêve et de poésie pour rassembler.
Il va falloir encore patienter quelques semaines, avant de pouvoir observer l’œuvre de Vincent Leroy, dont la livraison est estimée à la mi-novembre 2026.
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