Comme chaque année en Ukraine depuis le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, l’approche de l’hiver est source de bien d’inquiétudes pour les populations civiles. La campagne russe contre les infrastructures énergétiques, qui a déjà causé de lourds dommages au réseau ukrainien, menace l’accès de millions de personnes au chauffage et à l’électricité, comme lors des derniers hivers.
Difficultés d’interception
Mais l’année 2025 semble pire que les précédentes à plusieurs égards. La Russie a progressivement augmenté les ressources dédiées à ces attaques, employant désormais des centaines de drones ainsi que des dizaines de missiles plusieurs fois par semaine. Ces armes ont été grandement améliorées par rapport à leurs versions de 2022, tandis que les forces russes ont étoffé leur arsenal tactique, diminuant l’efficacité des capacités d’interception des forces armées ukrainiennes.
L’Ukraine, sous-équipée au début du conflit pour faire face à une force aérienne russe bien mieux dotée, est pourtant parvenue, au prix d’efforts colossaux, à constituer un robuste système de défense antiaérien. Ce dernier repose aussi bien sur des armements de pointe occidentaux, tels que les Patriot livrés par les États-Unis, que des solutions plus économes, allant de mitrailleuses montées sur des pick-up et de drones intercepteurs à un réseau de milliers de capteurs acoustiques, Sky Fortress.
Mais les cibles russes ont évolué : là où durant la campagne de l’hiver 2022, la Russie attaquait principalement des infrastructures de transport d’électricité, facilement réparables, les forces de Moscou visent désormais également les centres de production d’énergie, bien plus coûteux et difficiles à remettre en marche rapidement.
Séparer en deux le réseau électrique ukrainien
La nuit du 3 octobre, une frappe menée contre le réseau gazier a ainsi mis hors-service 60 % des infrastructures de production de gaz, poussant Kiev à demander en urgence de l’aide au G7 pour réparer les dégâts. En plus de financer les réparations de ce réseau, ainsi que de centrales techniques, le pouvoir ukrainien est forcé d’augmenter ses importations de gaz pour subvenir à ses besoins, une manœuvre qui devrait lui coûter quelque 2 milliards de dollars d’ici la fin de l’hiver.
Moscou n’est pas en mesure de démanteler l’ensemble des centres de production énergétiques ukrainiens : les centrales nucléaires installées dans l’ouest du pays ne peuvent en effet être ciblées par les forces russes, au vu des conséquences diplomatiques cataclysmiques d’une telle option. Les forces russes continuent donc de cibler plusieurs postes électriques cruciaux, servant à la transmission et la distribution d’électricité, qui ne peuvent tous être protégés simultanément.
Selon The Economist, les attaques menées par Moscou sur cette seconde cible pointent vers une nouvelle stratégie : détacher des centres industriels des régions de Soumy, Tchernihiv et Kharkiv, dans le nord-est de l’Ukraine, des zones de production d’énergie plus à l’ouest.
Les forces russes « veulent d’abord couper l’électricité sur la rive est [du fleuve Dniepr], et non pas dans tout le pays », souligne auprès du magazine britannique un officiel du gouvernement ukrainien : des parts entières des régions de Tchernihiv, Kharkiv et Soumy ont déjà été privées d’électricité pendant plusieurs jours cette année. Une bien mauvaise nouvelle pour Kiev, qui doit déjà défendre ces deux derniers oblasts contre des offensives périphériques, détournant des hommes et des ressources du front du Donbass.