« On a créé une ville qui ne fonctionne plus, qui ne produit plus de commun ». Alain Carignon, a toujours le verbe haut et la pique facile à l’égard de ses adversaires politiques. Interviewé sur France 3 Alpes, ce mardi, celui qui est élu d’opposition depuis 2020, a même convoqué Pierre Mendès France dans un discours de « réconciliation » qui structure son programme de campagne pour l’élection municipale de mars 2026.
Le conseiller municipal d’opposition Alain Carignon avait annoncé en juin dernier qu’il allait se porter une nouvelle fois candidat aux élections municipales de 2026, après 2007 et 2020.
« J’accepte de conduire, en mars 2026, une belle équipe, animée par l’amour de Grenoble, au service de tous les Grenoblois », expliquait-il dans une vidéo mise en ligne sur les réseaux sociaux. Âgé de 76 ans, l’ancien ministre RPR des années 1990 ne veut pas lâcher la rampe alors même que le maire Éric Piolle a décidé lui de ne pas se représenter.
L’affaire dite « Dauphiné News »
Alain Carignon, n’est rien moins que l’élu français ayant purgé la plus longue peine de prison pour des faits de corruption, en tant que maire… de Grenoble (Isère). En 1996, l’ex-maire de la ville a été condamné en appel à quatre ans de prison ferme et cinq ans d’inéligibilité pour « corruption passive, abus de biens sociaux et subornation de témoins », dans l’affaire dite « Dauphiné News » liée au financement de sa campagne électorale.
Libéré en mai 1998 après avoir effectué un total de vingt-neuf mois de détention, il devient aussi l’homme politique français ayant effectué le plus long séjour en prison, 29 mois. Car le casier de l’ancien ministre d’Édouard Balladur contient aussi une condamnation en 1999 à dix-huit mois de prison avec sursis pour « abus de biens sociaux et usage de faux » pour sa gestion d’une société d’économie mixte, Grenoble Isère développement (GID).
« Le tristouille de Grenoble »
En 2011, Enfin, il a dû rembourser une somme importante au conseil départemental de l’Isère, après une condamnation prononcée par la chambre régionale des comptes, et confirmée par la Cour des comptes, au sujet de la construction d’un échangeur qui avait donné lieu au versement d’une commission au montant « inhabituellement élevé », rappelait il y a peu Mediapart. Voilà pour le CV.
Dans ce contexte, sa campagne tient dans un mot d’ordre : tirer sur le bilan d’Éric Piolle. « La ville est idéologiquement enfermée dans les thématiques régressives et stigmatisantes de l’extrême gauche. Elle a aussi perdu sa grande tradition des débats ouverts. Éric Piolle est ainsi devenu le tristouille de Grenoble. Tout est triste », attaquait-il dans une tribune au Figaro, parue à la mi-août.
L’ironie de la stratégie est qu’Éric Piolle, lui-même a été pris récemment par la patrouille de la justice hexagonale. Il a été condamné pour favoritisme en septembre 2023, et est menacé par une seconde affaire de détournement de fonds publics. Son avenir politique se jouant plus du côté de la direction nationale des Verts qu’à Grenoble.
« Front républicain anti-LFI »
L’ancien espoir du RPR croit en sa chance, car la gauche s’avance en ordre dispersé pour remporter la ville au pied des Alpes : les Insoumis menés par Allan Brunon font bande à part, tandis que le reste du rassemblement qui avait porté Éric Piolle au pouvoir (les écologistes et sept partis de gauche et associations) est mené par Laurence Ruffin.
Le Parti socialiste, porté par sa cheffe de file Amandine Germain, et une autre coalition de gauche, Grenoble Capitale Citoyenne menée par Romain Gentil, pourraient également présenter des candidats. Le risque de dispersion pourrait alors profiter au septuagénaire qui appelle à un « front républicain anti-LFI ».
« Moi j’appelle tous ceux qui sont conscients de la crise sociale et sécuritaire que connaît la ville à se rassembler, on ne peut pas laisser ce parti politique gérer cette ville », a martelé Alain Carignon auprès de la presse locale. La peur du « rouge », une vieille recette du RPR, remise au goût du jour. L’avenir dira si les électeurs grenoblois adhèrent à cette version de « Retour vers le Futur », dirigé par Alain Carignon.