Internet débutait laborieusement, en 1995, lorsque Louis Nègre a été élu maire de Cagnes-sur-Mer pour la première fois. À l’époque, les réseaux sociaux n’existaient qu’en serrant des paluches au marché, sur le bord de mer ou dans les ruelles du vieux bourg. Il était question d’occuper le terrain, en chair et en os. Trois décennies plus tard, c’est désormais dans l’arène numérique que se joue une partie de la course aux élections.
Alors qu’il briguera en mars 2026 un septième mandat, l’édile Les Républicains a donc dû se mettre au diapason. « C’est une évolution communicationnelle qui est contrainte par l’offensive de ses opposants, très virulents sur Facebook ou Twitter (actuel X). Il y a Philippe Touzeau-Menoni, conseiller d’opposition, mais aussi et surtout le député (Rassemblement national) Bryan Masson, tous deux candidats. Ça inquiète la majorité », remarque un observateur de la vie politique cagnoise.

« Lors de la précédente mandature, les réseaux sociaux n’étaient pas une priorité, poursuit-il. En 2020, les posts ne se sont intensifiés qu’à l’approche du scrutin. Au printemps, un virage à 180 degrés s’est opéré. Plus d’un an avant l’échéance électorale ! »
Une spin doctor pour donner un « coup de neuf » ?
Pour élaborer cette nouvelle formule, « une collaboratrice a même été embauchée au cabinet », rappelle un proche de la municipalité. Une sorte de spin doctor ? « Elle s’occupe du maire, pas du candidat. Mais comme toujours, à l’approche des votes, la frontière peut être floue. Concrètement, elle donne un coup de neuf à l’image de Louis Nègre. Réactive, elle crée du contenu plutôt tendance. »
En témoignent ces vidéos rythmées où l’édile est mis en scène sur un fond musical à la mode, ou encore ces publications souhaitant une belle journée aux Cagnoises et Cagnois, photos de dauphins, de cygnes ou de levers de soleil à l’appui. « Vous imaginez le choc pour un briscard du RPR, habitué à une posture classique, un brin paternaliste ? », note la même source. « Mais finalement, il se prête au jeu avec une certaine aisance. »
Plus surprenant encore, l’élu a posté sur Facebook, un GIF (courte vidéo qui se répète en boucle) de lui avec l’un de ses petits-fils. « Il est très rare que je dévoile ma vie privée sur les réseaux sociaux, notamment par pudeur et par souci de protéger les miens, écrit-il. Mais en cette journée célébrant les grands-pères, je voulais partager avec vous cet instant de complicité. »
Sur un plan plus politique, l’élu s’adonne désormais à des commentaires, face caméra, sur les actualités nationales et locales, la défense de son bilan ou les attaques de ses détracteurs. Avec le hashtag « réaction » mais aussi « coup de gueule », l’édile sort ainsi de « sa zone de confort, relate-t-on en mairie. Il y avait quelque chose de sage à ne pas souffler sur les feux de paille. Mais il est désormais impossible de ne plus se défendre. »

« Il disait vouloir rester au-dessus de la mêlée des réseaux sociaux »
Sur les accusations de bétonnage intempestif, lancées par le collectif de la Casa du Cros, sur le projet de création d’une mosquée, vilipendée par le député d’extrême droite, Louis Nègre riposte avec parcimonie. « Du temps où j’étais sa première adjointe (2014-2017), il disait vouloir rester au-dessus de la mêlée des réseaux sociaux, comme si ça ne le concernait pas », raconte Josiane Piret.
La conseillère d’opposition, soutien de Bryan Masson, tacle ce virage numérique : « Son équipe de com’ a dû énormément insister. Mais ça n’est pas vraiment lui, ça ne prend pas. » Côté mairie, où nos sollicitations sont restées lettres mortes, un proche bondit malgré tout : « C’est le problème des réseaux, quoi que tu fasses, quoi que tu dises, il y aura toujours quelqu’un pour te tomber dessus. »