Après deux années d’élan prometteur, la relance industrielle française s’essouffle. Selon le baromètre de la Direction générale des entreprises (DGE) publié jeudi, le solde net entre ouvertures et agrandissements d’usines d’une part, et fermetures ou réductions d’effectifs d’autre part, n’atteint que + 9 sur les six premiers mois de 2025. Un chiffre en nette baisse par rapport aux + 48 du second semestre 2024, signe d’un ralentissement désormais bien installé.
Bercy reconnaît qu’« après des tendances très positives observées en 2022 et 2023, 2024 a marqué un ralentissement de la dynamique de réindustrialisation », une tendance qui perdure en 2025. Ce coup de frein intervient alors que le gouvernement a fait de la reconquête industrielle une priorité nationale, après des décennies de déclin : le poids de l’industrie dans le PIB est tombé à environ 10 %, contre 17 % en 1995.
Une inquiétante perte de vitesse
Les politiques successives d’Emmanuel Macron visaient à inverser cette tendance en favorisant l’investissement, l’innovation et la relocalisation de la production. Mais les signaux récents montrent une perte de vitesse dans la création de nouveaux sites et la transformation d’usines existantes, malgré les efforts de financement public et les aides ciblées aux filières stratégiques.
Le ministre délégué à l’Industrie, Sébastien Martin, se veut toutefois combatif : « On s’est fixé un cap très clair : maintenir l’industrie dans ce pays et aller se battre auprès de l’Union européenne, parce qu’il est temps de sortir de la naïveté sur certains sujets, notamment la concurrence internationale asiatique. » Il appelle à une réponse européenne coordonnée pour protéger les filières émergentes, notamment celles liées aux véhicules électriques et aux énergies nouvelles.
Plus de fermetures que d’ouvertures d’usines
Selon le cabinet Trendeo, la situation se dégrade également dans ses propres relevés : le solde entre ouvertures et fermetures d’usines est redevenu négatif depuis fin 2024, avec 25 sites perdus au premier semestre 2025. L’organisme souligne une triple fragilité : la concurrence asiatique, la pression sur les industries traditionnelles et l’incertitude politique qui pèse sur les décisions d’investissement à long terme.
Du côté syndical, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, parle d’« un moment de désindustrialisation massive », évoquant « plus de 300.000 emplois menacés » et « 444 plans sociaux depuis les élections européennes de juin 2024 ». Pour elle, « c’est juste le petit bout de l’iceberg », un constat alarmant qui relance le débat sur la politique de l’offre et la stratégie industrielle de l’exécutif.