Alors que le « shutdown » fédéral entre dans sa cinquième semaine, la décision de l’administration de Donald Trump de suspendre le versement des aides alimentaires (SNAP) provoque un bras de fer judiciaire. Selon les médias américains, la juge fédérale Indira Talwani, à Boston, s’est montrée particulièrement sceptique face aux arguments du gouvernement, laissant entendre qu’elle pourrait ordonner le déblocage d’urgence des fonds destinés à nourrir des millions d’Américains.
Le ministère de l’Agriculture (USDA) a annoncé qu’il cesserait de financer le programme SNAP (communément appelé « food stamps ») à compter du 1er novembre, faute d’autorisation budgétaire du Congrès. Ce programme, qui coûte environ 8 milliards de dollars par mois, assure la sécurité alimentaire de près de 42 millions de personnes à travers le pays. Pourtant, comme le rapporte The New York Times, l’administration dispose encore de milliards de dollars répartis dans plusieurs comptes fédéraux, dont plus de 5 milliards de réserves prévues précisément pour les situations d’urgence.
Une juge excédée par les justifications du gouvernement
Mais les avocats du ministère de la Justice ont affirmé devant le tribunal qu’il existait des obstacles juridiques et techniques empêchant l’utilisation de ces fonds. Ils ont insisté sur le fait que le gouvernement ne pouvait pas transférer d’argent sans l’aval explicite du Congrès, même pour maintenir un programme vital.
Face à ces arguments, la juge Indira Talwani a fait part de son incompréhension. Elle a estimé que la situation répondait clairement à la définition d’une urgence, soulignant que le Congrès avait prévu un fonds spécial précisément pour éviter qu’une crise budgétaire ne plonge des millions d’Américains dans la faim. Selon CNN, elle a déclaré qu’il était difficile de concevoir que « l’absence totale de prestations pour des familles démunies » ne constitue pas une urgence nationale.
La fronde des Etats et la riposte judiciaire
La magistrate a également rappelé que le droit fédéral prévoyait, en cas de pénurie budgétaire, une réduction des allocations plutôt qu’une suspension pure et simple du programme. Elle a laissé entendre qu’elle pourrait forcer le gouvernement à puiser dans les fonds de réserve, tout en reconnaissant que la mise en œuvre serait lente et que les paiements de novembre risquent d’être retardés ou partiels.
Vingt-cinq Etats et le District de Columbia ont saisi le tribunal de Boston, accusant le gouvernement fédéral de violer la loi et d’agir de manière arbitraire. Leur plainte affirme que l’USDA dispose bien des moyens financiers pour financer tout ou partie des allocations de novembre. Les procureurs généraux estiment que refuser d’utiliser ces fonds, alors même qu’ils sont disponibles, contrevient à l’esprit du programme et met en péril la sécurité alimentaire de millions de foyers.
Un choix politique assumé par l’administration Trump
Les représentants de l’administration de Donald Trump, eux, soutiennent que le tribunal ne peut pas les contraindre à redistribuer des fonds non approuvés par le Congrès. Ils ont également averti que forcer le recours aux réserves d’urgence créerait un précédent dangereux et entraînerait de lourds problèmes logistiques.
Notre dossier sur les Etats-Unis
L’issue du dossier, que la juge Talwani promet de trancher rapidement, déterminera si des millions de familles américaines continueront à percevoir leurs bons alimentaires en novembre. En attendant, la tension monte dans tout le pays, où plusieurs Etats envisagent déjà des plans de secours pour éviter que la crise budgétaire ne se transforme en crise humanitaire.